SNOWPIERCER
SÉRIE AMÉRICANO-CORÉENNE DE JOSH FRIEDMAN ET GRAEME MANSON (2020) Avec Jennifer Connelly, Daveed Diggs, Mickey Sumner. Dix épisodes de 50 minutes. ùù
Dans un avenir proche, la rébellion d’une horde de sans-grade, tentant de renverser le régime autoritaire établi dans un train roulant en boucle au sein d’un monde cerné par les glaces. Variation du blockbuster éponyme de Bong Joon-ho, illustre réalisateur coréen de « Parasite » (ici coproducteur), « Snowpiercer » en reproduit fidèlement le postulat et le style post-apocalyptiques. A une nuance près : à l’épais filigrane de la lutte des classes, illustré par l’édifiante compartimentation sociale du train (les pauvres, entassés en queue de convoi, partent à l’assaut des wagons des riches), la série tresse une énigme policière à la Chandler, dans laquelle un révolutionnaire à dreadlocks, malicieusement tiré de sa misère par le haut commandement, est sommé de jouer les Philip Marlowe du futur. De quoi complexifier encore davantage les innombrables postures métaphoriques de cet univers créé de toutes pièces, le récit se trouvant condamné à décoder le moindre détail exotique apparaissant sur l’écran, de la fonction d’un micropersonnage à la spécificité d’un gadget. Mais c’est un mal pour un bien. En suivant les pas du flic, jonglant entre son enquête et ses désirs de putsch, la série opte pour une aimable déambulation dans les entrailles de la machine, renforcée par le point de vue d’une chef cheminote à laquelle la fabuleuse Jennifer Connelly prête son visage d’ange et son regard métallique. Pas de quoi non plus crier au génie. Conçu dans la douleur (démission du showrunner Josh Friedman en plein tournage), « Snowpiercer » traîne une impression brouillonne où les fulgurances le disputent à une certaine lourdeur conceptuelle – un peu comme le film originel de Bong Joon-ho, l’un de ses plus faibles.