L'Obs

Les Délices de tokyo

- François Forestier

Comédie dramatique japonaise de Noami Kawase (2016). Avec Kirin Kiki. 1h53.

C’est du cinéma culinaire, japonais et rose bonbon. Je m’explique : Tokue, une vieille dame de 76 ans aux mains déformées par l’arthrose, s’impose dans une petite pâtisserie de Tokyo. Elle sait comme personne fabriquer des dorayaki, sortes de petites crêpes fourrées de haricots rouges sucrés (faut être japonais pour aimer ça, c’est insipide en diable, on a l’impression de manger de la pâte à modeler, enfin, c’est mon avis) dans la boutique de Sentaro. Lequel a une dette dont il ne peut s’acquitter. Chemin faisant, on apprend que Tokue habite dans une ancienne léproserie, et qu’elle a peut-être été victime de cette maladie… Forcée de s’en aller, elle laisse derrière elle une recette pour Wakana, une jeune fille qui… Bon, vous avez compris. Passation du savoir entre génération­s, goût du temps qui passe, beauté des joies simples, toute la philosophi­e feelgood new age est concentrée dans le film, et la réalisatri­ce, Naomi Kawase, n’en est pas avare. Si on est dans un bon jour, le spectacle est charmant, délicieuse­ment lent, agréableme­nt parsemé de mélancolie et de bonté d’âme. Si on est dans un jour grognon, il faut éviter : ces personnage­s qui n’arrêtent pas de démontrer que la vie est belle (au fond) et que l’homme doit être en accord avec son environnem­ent peuvent être agaçants. Cerisiers en fleur (obligatoir­es), images magnifique­s des rues de Tokyo, patience et longueur de temps (presque deux heures), changement de saisons, rythme méditatif… On est bien loin des films de mangeaille (du « Festin de Babette » à « la Grande Bouffe », c’est un sous-genre cinématogr­aphique, au même titre que les films de sousmarins ou les polars de prison), et Naomi Kawase continue à filer son thème favori (de « Naissance et maternité » à « Vers la lumière »), la quête d’une harmonie intérieure. Ce qui explique qu’elle ait été choisie pour être la réalisatri­ce officielle des JO de 2021. Ces « Délices de Tokyo » sont, avant tout, poétiques. On aime ou pas, tout est question d’humeur.

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