Keith Haring : Street Art Boy
Documentaire anglais de Ben Anthony (2020). 50 min.
Comment un gamin originaire d’un milieu modeste est-il devenu, à l’âge de 25 ans à peine, l’un des plus grands artistes de la scène new-yorkaise des années 1980 et une icône de la pop culture célèbre dans le monde entier ? Dans ce documentaire foisonnant, Ben Anthony revient sur la trajectoire fulgurante de Keith Haring, mort du sida à 31 ans, en 1990, en laissant derrière lui plus de 10 000 oeuvres. Le documentariste s’appuie sur des confidences inédites de l’artiste lui-même : se sachant condamné, Haring s’était en effet livré pendant cinq jours au micro de son biographe, le critique et historien d’art John Gruen. « Pour moi, l’art devrait s’adresser à un maximum de gens et non à une élite fortunée censée le comprendre », explique-t-il. De son enfance à Reading, en Pennsylvanie (il dessine déjà sur les listes de courses de sa mère), à son arrivée à New York à la fin des années 1970, ville où une criminalité galopante cohabite avec une scène artistique underground très vivante, le film montre comment ce fan de graffiti a eu l’idée d’utiliser les emplacements désertés par la publicité. Inondant le métro de ses dessins, il attire alors l’attention d’un public très différent des privilégiés qui fréquentent musées et galeries. Soucoupes volantes, humains aux traits grossiers, animaux au museau carré… autant d’illustrations qui ont « fait naître la totalité de [s]on vocabulaire », comme ces figures de chiens ou de bébés à quatre pattes. Bientôt, la vente de ses oeuvres dans un vernissage où les Blancs habitués aux mondanités n’en reviennent pas de croiser des Noirs et des Portoricains lui rapportera 250 000 dollars… Il expose ensuite aux quatre coins du monde. Et accepte tous les contrats, quitte à essuyer les critiques. Il peint Grace Jones à même la peau pour deux concerts mythiques au Paradise Garage (New York), crée un logo pour un médicament en Allemagne, dessine trois montres pour Swatch… Ses proches témoignent de la formidable énergie créatrice qui l’anima jusqu’à la fin. « Je ne vais pas devenir vieux, lâche Keith Haring. Mais les oeuvres que j’ai créées resteront pour toujours. » C’est peu dire que le temps lui a donné raison.