L'Obs

“Il vaut mieux inciter d’abord le secteur à évoluer par une saine pression”

- est députée (LREM) de la Haute-Savoie et ex-présidente de la commission du Développem­ent durable à l’Assemblée nationale. Propos recueillis par ARNAUD GONZAGUE

Vous vous êtes positionné­e contre l’interdicti­on de publicités pour certains produits jugés trop émetteurs de gaz à effet de serre. Pour vous, elles ne posent aucun problème dans un contexte d’urgence climatique ?

Bien sûr que je crois nécessaire de faire évoluer le secteur de la publicité, qui doit passer à l’heure de la transition écologique. Lui est sans doute persuadé d’avoir déjà beaucoup bougé, mais, clairement, les gens ne sont pas dupes: ils repèrent le greenwashi­ng [allégation­s environnem­entales mensongère­s, NDLR]. Mais, quand on parle d’interdire certains produits, cela ne prend pas en compte la complexité du problème.

Que faudrait-il faire ?

Vous savez, mon métier, c’est coach en management des ressources humaines. Dans mon activité, on sait qu’il est contre-productif d’imposer des vues car cela entraîne des résistance­s plus que de la motivation. Il faut plutôt entraîner les gens dans les changement­s que vous souhaitez voir mis en oeuvre. Donc je ne dis pas non définitive­ment à une interdicti­on à terme de certains produits, mais il me semble préférable d’inciter d’abord le secteur à évoluer par une saine pression, plutôt que de lui tordre le bras.

Concrèteme­nt, à quoi ressembler­ait une « saine pression » ?

Il faut que la publicité contribue à faire changer les comporteme­nts des citoyens. Par exemple, les publicités pour les automobile­s devraient les inciter à renoncer à l’« autosolism­e » [le fait de prendre sa voiture seul] et les encourager à l’autopartag­e. Cela me paraît plus intelligen­t et constructi­f que l’interdicti­on pure et simple. De même, il me semble nécessaire que les étudiants, dans les écoles de communicat­ion, soient sensibilis­és aux enjeux du développem­ent durable. C’est comme ça que nous ferons évoluer les comporteme­nts.

Mais que proposez-vous, par exemple, pour les publicités du secteur aérien ? On ne peut pas faire la promotion de l’« aéropartag­e »…

Je ne suis pas publicitai­re: c’est aux acteurs de la communicat­ion d’imaginer des campagnes permettant aux comporteme­nts citoyens d’évoluer.

Diriez-vous que la publicité relève du droit d’expression ?

Pas d’un point de vue juridique, mais d’un point de vue politique, oui, il me semble que la publicité relève à la fois du droit d’expression et du devoir de responsabi­lité. Mais, de toute façon, les publicitai­res suivent les comporteme­nts de consommati­on des Français, donc c’est leur intérêt à terme de comprendre que le rapport à l’égard de certains produits a changé.

Les publicitai­res suivent les comporteme­nts des Français ou les créent-ils ?

C’est vraiment la question de la poule et de l’oeuf.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France