L'Obs

Paul Ecole, un auteur très demandé

JULIEN CLERC, Christophe Maé, CALOGERO et d’autres chanteurs mettent en musique les textes de PAUL ÉCOLE. Rencontre avec un auteur très demandé

- Par SOPHIE DELASSEIN Photo FABRICE PICARD

CENTRE VILLE, par Calogero (Polydor). TERRIEN, par Julien Clerc (Play Two).

Nice, 14 juillet 2016. Un camion fonce dans la foule, tue 86 personnes, en blesse 458. Un an après, pour commémorer l’innommable, les familles des victimes de l’attentat invitent Calogero à interpréte­r « les Feux d’artifice », la chanson qui donnait son titre à l’album de 2014. Au moment d’entamer le dernier couplet, l’émotion le submerge, il s’interrompt, incapable de chanter « Nous sommes comme les feux d’artifice/Vu qu’on est là pour pas longtemps », et il quitte la scène en larmes. Paul Ecole assiste à l’événement à la télé, depuis sa Bretagne : « Le texte parle d’un homme qui se souvient des feux d’artifice de son enfance. A la fin, il réalise que nous sommes tout aussi éphémères, alors pour le peu que nous avons à vivre, essayons de faire rêver les autres. Quand Calogero a quitté la scène, mon texte a pris tout son sens. »

Paul Ecole, l’un des auteurs les plus prisés depuis 2014, l’année de la révélation avec « les Feux d’artifice » et son premier succès, « le Portrait ». Trois petites minutes pour exprimer la douleur d’un enfant couché contre la silhouette, tracée à la craie sur le sol, de sa mère morte. Tout est parti de là et, depuis, ceux qui n’ont pas la foi d’écrire eux-mêmes leurs chansons veulent du Paul Ecole, pour la qualité de ses textes, leur élégance, leurs fulgurance­s, et cette capacité à toucher beaucoup de monde sans racoler. Face aux demandes qui affluent, il répond en substance par un très flegmatiqu­e « faut voir ». « Je fais les choses par plaisir, sans jamais me forcer, dit-il. Je refuse plein de propositio­ns pour cette raison. C’est comme ça que j’aime travailler. »

Avant que tout commence, Paul Ecole, né à Drancy il y a presque quarante ans, Breton d’adoption, d’un caractère « pas timide, mais réservé », a joué les garçons de piscine, les brancardie­rs et même les conseiller­s Pôle Emploi. A 11 ans, pourtant, lorsqu’une prof avait demandé aux élèves de dessiner leur avenir, le petit Paul avait répondu qu’il se voyait auteur compositeu­r-interprète. Comme Gainsbourg, MC Solaar et Souchon – l’influence est manifeste. Le collégien avait ajouté que pour mener à bien son projet, il devrait s’inscrire à la Sacem et avoir écrit au moins cinq chansons. Comment est-il parvenu à ses fins ? « Sans rien faire. J’ai eu l’imprudence de croire que tout allait forcément arriver, raconte-t-il. Et c’est arrivé quand Oxmo Puccino a entendu mes chansons chez un ami commun. Il a voulu me rencontrer, m’a dit que je pourrais en vivre et m’a présenté à Warner qui m’a signé un contrat en 2013. »

Après quelques années de concerts, dont des premières parties d’Oxmo Puccino, Paul Ecole finira par renoncer à la scène mais sans frustratio­n, parce que, dit-il, « ma carrière de chanteur ne m’emmenait nulle part ». L’ermite de la Côte d’Emeraude compose parfois, écrit beaucoup. Plein de chansons, dont certaines deviendron­t de gros tubes. Quand Christophe Maé demande « Il est où le bonheur ? », lorsque la jeune Maëlle dénonce le harcèlemen­t scolaire dans « l’Effet de masse », Paul Ecole est à la manoeuvre. Mais c’est dans l’ombre de Calogero qu’il donne le meilleur : « 1987 », « Fondamenta­l », « Voler de nuit », et récemment « Celui d’en bas » et « le Temps ». Calogero dit de lui qu’il est ce qu’Etienne Roda-Gil fut pour Julien Clerc : l’auteur fétiche, complice, idéal. Ce dernier a d’ailleurs mis en musique « Brexit », sur son album de 2021, une chanson déposée par Paul Ecole il y a quelques années chez Warner avec l’espoir que Jane Birkin tombe dessus. Birkin, son voeu le plus cher, son inaccessib­le étoile. Pour l’instant. ■

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