Les Prévert toujours verts
COFFRET LES FRÈRES PRÉVERT. « L’AFFAIRE EST DANS LE SAC » ET « VOYAGE SURPRISE », AVEC JULIEN CARETTE, MARCEL DUHAMEL, MARTINE CAROL, MAURICE BAQUET (1932 ET 1947). TROIS DVD, CHEZ DORIANE.
revoir carette et Brunius discuter de l’achat d’un béret (prononcez « bêêêrai ») en essayant divers galurins, c’est un bonheur. un grand moment de cinéma, même. farce surréaliste dans laquelle un chapelier décide de kidnapper le fils du roi du buvard, « L’affaire est dans le sac » est du pur Jacques prévert : « Si j’avais à choisir, disait-il, c’est encore le film que je préfère de tous ceux que j’ai faits comme scénariste et avec mon frère comme metteur en scène. » nous sommes alors en 1932, et les prévert brothers sont « économiquement faibles ». pour manger (et boire), Jacques fait de la figuration de temps en temps, et pierre s’essaie à la réalisation. puis, ensemble, avec la complicité de leurs copains (etienne decroux, mime, Lou Bonin, costumier, eli Lotar, caméraman), ils tournent cette comédie poétique qui fait les délices de simone de Beauvoir et met en rage les croixde-feu, qui veulent foutre le feu à la salle à cause de la participation du groupe octobre, proche du parti communiste. revu aujourd’hui, le film est tout simplement délicieux (et Jacques joue le rôle d’un joueur de flûte). quinze ans plus tard, en 1947, rebelote : avec « Voyage surprise », prévert junior (pierre) invente une virée en autocar, avec des personnages dingues (dont piéral, le nain le plus célèbre et le plus dévergondé du cinéma français). donc : délicieux (bis). Mais ce joli coffret offre d’autres surprises, dont les courts-métrages que pierre a consacrés à sa ville préférée : « paris la belle » (1960, remontage d’un film de 1928), « paris mange son pain » (1958) ainsi que ses téléfilms, « le petit claus et le grand claus » (1964) et « la Maison du passeur » (1965). L’ensemble a été restauré en 4K, dieu merci. certaines de ces images, oubliées depuis des années, en avaient fort besoin, entreposées dans des coins de la cinémathèque française. où, vers 1960, on voyait souvent un spectateur à cheveux blancs, amical et souriant : c’était pierre prévert, qui venait se mêler aux discussions entre étudiants, et raconter une époque disparue. passaient les ombres de Buñuel, de renoir, de Vigo. La réplique que son frère avait placée dans la bouche de Louis XiV nous tenait lieu de passeport : « Soldats de Fontenoy, vous n’êtes pas tombés dans l’oreille d’un sourd ! »