Rallumer le Feu !
PALAIS D’ARGILE, PAR FEU! CHATTERTON (CAROLINE RECORDS).
Il est fort, l’album de Feu! Chatterton. Dix ans après sa fondation, le groupe emmené par Arthur Teboul mature et mature encore. Ce club des cinq nous envoie un disque dense, sombre, où demain est plus qu’incertain. C’est comme la BO du drôle de moment que nous traversons. Dans une ville « à cran », le chanteur songe : « Je me souviens mal du monde d’avant. » Le fil rouge de ce « Palais d’argile » est là, tout en incessants va-et-vient entre hier et demain, comme si aujourd’hui marquait un tournant, un changement d’ère perceptible un peu, beaucoup, partout (« Le monde de demain on le bégayait tous », « Adieu vieux monde adoré »). Il s’agit même de rechercher « le visage qui fut le mien avant qu’il n’y ait le monde ». Et cela dans une tension qui court pratiquement tout du long, dans la voix et les textes, mais aussi la lumière et les couleurs (on les doit au producteur de musique électronique Arnaud Rebotini, qui a fait un travail sublime sur ce coup-là). Quand survient « Cantique », un morceau de plus de six minutes, il y a comme une éclaircie. Et voilà, on a tout écouté. On a pensé à Léo Ferré parfois, à Dominique A souvent, et à sa manière de donner dans le rock littéraire, sur la pointe des pieds, avec une vraie exigence.