L'Obs

Florian Zeller

Son film “The Father”, qu’il a réalisé à partir de sa propre pièce de théâtre, a reçu deux oscars lundi dernier

- JACQUES NERSON

1 TRIOMPHE

Un premier oscar pour le scénario tiré de sa pièce « le Père »; un second, celui du meilleur acteur, attribué à son interprète principal, Anthony Hopkins : Florian Zeller exulte. Ce triomphe n’était pas inattendu car la pièce a partout rencontré le succès : dès sa création en France, mise en scène en 2012 par Ladislas Chollat, avec Robert Hirsch, inoubliabl­e dans le rôle du vieil homme égaré dans un monde rendu incertain par la démence sénile; puis quand « le Père », rebaptisé « The Father », a été sacré à Londres meilleure pièce de l’année par « The Guardian » et désigné par l’« Evening Standard » comme l’une des meilleures pièces du XXIe siècle. Zeller est aujourd’hui le dramaturge français le plus joué dans le monde.

2 SORTIE

Covid oblige, « The Father » n’est pas encore sorti chez nous mais, depuis sa première projection aux Etats-Unis l’an dernier au Festival de Sundance, les récompense­s pleuvent.

3 DUPLEX

Toujours pour cause de virus, Zeller n’a pas pu se rendre en personne à la cérémonie des Oscars. Il faut croire qu’on avait vendu la mèche puisqu’un duplex avait été organisé. Grâce à quoi le lauréat a pu remercier en smoking et en direct les Américains qui ont récompensé son oeuvre, et brandir fièrement la statuette dorée de 3,9 kilos.

4 CHÉRUBIN

A son arrivée dans le monde du théâtre et de la littératur­e, on ne savait rien de ce blondinet aux yeux d’émail bleu azur et à la tignasse en pétard. Placé sous l’aile protectric­e de Jean d’Ormesson et de Philippe Tesson, ce chérubin tombé du ciel a su se frayer un chemin. Il a aujourd’hui 41 ans. Il est marié depuis 2010 avec Marine Delterme, rencontrée sept ans auparavant, avec qui il a un fils, né en 2008, prénommé Roman.

5 ÉPOUSE

Pendant la cérémonie des Oscars, Marine Delterme, sa femme, se tenait à ses côtés, radieuse. Elle est davantage connue des Français que lui : c’est elle qui tient sur TF1 le rôle d’Alice Nevers dans la série télévisée du même nom, laquelle vient de s’achever après 18 saisons.

6 DÉBUTANT

Avec « The Father », Zeller a réalisé son premier long-métrage mais ce n’est pas son premier film. En 2008, il avait tourné un court-métrage,

« Nos dernières frivolités ». Mécontent des adaptation­s cinématogr­aphiques de ses pièces (« Une heure de tranquilli­té », de Patrice Leconte, et « Floride », de Philippe Le Guay), il a décidé de passer lui-même derrière la caméra.

7 PERSÉVÉRAN­CE

Il semble y avoir pris goût. Il est déjà en train de préparer le tournage d’une autre de ses pièces, « le Fils », créée en 2018 par Ladislas Chollat, avec Yvan Attal et Rod Paradot. Coadapté avec Christophe­r Hampton, comme « le Père », le film sera joué par Hugh Jackman et Laura Dern, l’actrice fétiche de David Lynch.

8 PRÉCOCITÉ

Zeller n’a pas eu besoin de courtiser longtemps la gloire. En 2002, à 22 ans, il reçoit un prix pour son premier roman, « Neiges artificiel­les ». La même année, il devient maître de conférence­s à Sciences-Po d’où il vient à peine de sortir. Mais c’est la scène qui va lui apporter le succès. Dès sa première pièce, « l’Autre », en 2004, la critique salue ce jeune auteur prometteur. Après quoi les succès s’enchaînent.

9 HOPKINS

Très vite, il a compris l’importance d’être servi par de grands acteurs comme Catherine Frot, Laetitia Casta, Catherine Hiegel, Pierre Arditi, Robert Hirsch, Fabrice Luchini, Daniel Auteuil, Yvan Attal… Pour

« The Father », c’est lui qui est allé, avec Christophe­r Hampton, porter son manuscrit à Anthony Hopkins, « le plus grand acteur vivant ». Le petit rusé avait au préalable changé le prénom du personnage principal (André) pour celui d’Anthony. Il assure que c’était pour que Hopkins ne soit pas « protégé par son rôle comme par une cuirasse ».

10 STYLE

Il dit lui-même que son théâtre n’est pas lyrique, que sa langue est un matériau simple et même banal. C’est « ce qui se tient derrière le dit et dans les silences » qui l’intéresse. On ne peut pas non plus le cerner en fonction des sujets choisis : « Je ne sais pas ce que c’est qu’un thème. »

Il n’est « pas sensible au théâtre d’idées » et dit ne pas chercher à « forger une arme politique ». La scène est pour lui « un lieu de questions plus que de réponses, d’abîmes plus que de certitudes ».

Ce n’est pas sans raison qu’il a choisi Harold Pinter pour modèle. De lui, il a appris à « employer des mots simples pour énoncer des choses cruelles », à « écrire oui en faisant comprendre que le personnage pense non ».

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