L'Obs

“Il y a trop de prélèvemen­ts sur le travail en France”

- Agnès Verdier-Molinié Directrice de la fondation iFrap, un think tank libéral. Propos recueillis par R. F.

Guillaume Peltier propose d’augmenter les salaires de 20 % en supprimant les cotisation­s sociales. Une bonne idée?

Le constat de départ est le bon : il y a trop de dépenses sociales en France et trop de prélèvemen­ts sur le travail. Mais l’idée de Guillaume Peltier est de remplacer les cotisation­s sociales par une nouvelle taxe [sur les transactio­ns financière­s et les paiements électroniq­ues, NDLR], gigantesqu­e et irréaliste, qui devrait rapporter trois fois plus que la TVA, l’impôt le plus lucratif pour l’Etat. On ne serait plus dans une logique « assurantie­lle », où chacun cotise pour obtenir des droits (à la retraite, au chômage, etc.), en cohérence avec le montant de ses cotisation­s. Mais dans un système « assistanci­el », où tous contribuer­aient et plus uniquement les salariés. Cela voudrait dire que les pensions de retraite ou les indemnités chômage ne seraient plus corrélées aux revenus passés. Il existerait une sorte de filet social de 700 ou 800 euros mensuels, le reste reposant sur un système par capitalisa­tion. La mesure pourrait avoir de nombreux effets pervers – explosion du travail au noir, achats transfront­aliers…

Faut-il pour autant s’interdire de toucher aux cotisation­s?

Non ! Nous pourrions nous inspirer de ce qui fonctionne chez nos voisins, réfléchir aux plafonds des taux de chacune d’elles, lisser leurs taux, actuelleme­nt trop favorables aux bas salaires, ce qui a créé une « trappe de smicardisa­tion » et nous empêche d’avoir des salariés à très forte valeur ajoutée, dotés de gros salaires. Au-delà, il conviendra­it de regarder dans le détail chaque dépense. Des milliards sont à économiser, notamment dans le coût administra­tif du social. Sur les retraites, il est évident qu’il faut repousser l’âge de départ, et aller vers une convergenc­e public-privé. Toutes ces réformes structurel­les permettron­t de baisser, à terme, les cotisation­s: mais cette baisse doit être un objectif, pas un moyen. Nous serions bien inspirés surtout de revoir la répartitio­n des charges sociales, pour tendre, comme la plupart des pays, vers un 50/50 entre salariés et employeurs.

Comment faire, alors, pour augmenter les salaires?

Cela ne se décrète pas. Pour augmenter les salaires, il faut augmenter la productivi­té et les services à forte valeur ajoutée. Ce qui implique de réduire les charges des entreprise­s – de 100 milliards, si l’on souhaite s’aligner sur nos voisins européens. Ensuite, on peut aussi réfléchir à baisser ou lisser certaines cotisation­s. Toutes ces mesures permettron­t d’instaurer un environnem­ent économique favorable à l’augmentati­on des salaires. Cela demande du temps, et pas trop d’idéologie.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France