L'Obs

THIERRY MARX “Passons aux carottesbo­euf”

Pour le chef cuisinier, la révolution écologique se fera aussi dans nos assiettes

- S. B.

Les écologiste­s, Thierry Marx les a longtemps regardés avec un peu de moquerie. « Gamin, puis ado, je ne rêvais que de consommer, d’avoir de belles fringues et une belle bagnole », confesse le chef cuisinier, qui a grandi dans une cité HLM de Champigny-sur-Marne. Aujourd’hui, il le reconnaît: « Ils avaient raison de nous alerter. » Sa prise de conscience, assez récente, doit beaucoup à ses rencontres avec l’ex-patron du WWF, Serge Orru, ou avec le biologiste Gilles Boeuf, ancien président du Muséum national d’Histoire naturelle. Il en a tiré la conviction que la révolution écologique passerait forcément par l’assiette. « Les quarante dernières années ont été celles de l’agricultur­e intensive, de la grande distributi­on, puis du low cost. Le résultat ? Pollution, malbou e, et drame social des paysans. » Lui rêve d’une agricultur­e moins gourmande en eau, moins dépendante de la chimie. Quant à notre consommati­on de viande, elle doit diminuer. « Il y a eu la génération du boeuf-carottes, passons aux carottes-boeuf, avec 80% de protéines d’origine végétale dans une assiette et seulement 20 % d’origine animale. »

SON EMPREINTE CARBONE : 20,5 TONNES D’ÉQUIVALENT CO2*

Thierry Marx présente une empreinte deux fois plus importante que la moyenne française. Ses déplacemen­ts le pénalisent fortement – ils représente­nt 76% de son bilan total. Ce qui tranche avec un mode de vie très sobre, surtout en matière d’alimentati­on et de consommati­on.

ALIMENTATI­ON 370 kg d’éq. CO2 par an (1,8 tonne pour le Français moyen)

Végétarien depuis vingt ans, il a appris « à cuisiner la viande » mais n’a « jamais vraiment aimé la manger ». Il s’approvisio­nne en partie grâce à son potager parisien. Pas fan des supermarch­és, il s’y rend surtout pour se fournir en produits ménagers et de toilette.

LOGEMENT 2,5 tonnes d’éq. CO2 par an (2 tonnes pour le Français moyen)

Il vit avec sa compagne à bord d’une péniche de 120 mètres carrés, amarrée à Paris, sur la Seine. Un logement chau é au fioul: « 19 °C dans les chambres, de 20 à 21 °C dans les espaces de vie. » Si cela alourdit son bilan carbone, vivre sur une péniche permet pourtant d’être plus écolo, estime-t-il. « Ça oblige à vivre léger. Faute de grandes capacités de stockage, nous ne pouvons pas consommer de manière débridée. »

TRANSPORTS 15,7 tonnes d’éq. CO2 par an (3,2 tonnes pour le Français moyen)

Dans ses déplacemen­ts quotidiens, il utilise le vélo à Paris, et sa moto (une BMW 1 200 RT) pour se rendre dans un dojo – il pratique les arts martiaux – situé à 10 kilomètres de la capitale. « La moto, c’est le premier objet qui m’a émancipé de mon quartier pourri. Aujourd’hui, je reste très attaché à la liberté, à tout moment, de me barrer avec. » Il ne possède pas de voiture, mais prend beaucoup l’avion, notamment tous les deux mois pour le Japon, où il possède des établissem­ents. Il voyage aussi aux Etats-Unis, environ deux fois par an, pour rendre visite à ses enfants. Au total, Thierry Marx émet donc 8,2 tonnes d’éq. CO2 pour ses déplacemen­ts personnels et 7,5 tonnes pour ses déplacemen­ts profession­nels.

BIENS DE CONSOMMATI­ON 510 kg d’éq. CO2 par an (1,7 tonne pour le Français moyen)

S’il a longtemps vu dans la consommati­on un symbole de réussite, il dit en être revenu. « Dans le bouddhisme zen, on dit : “Les objets t’appartienn­ent et puis un jour tu appartiens aux objets.” » Il précise qu’il ne possède que trois pantalons et trois paires de chaussures… Question numérique, il utilise un ordinateur portable et un smartphone, qu’il change « tous les trois ans environ ».

Dont 1,4 tonne d’équivalent CO2 par an, correspond­ant pour chaque Français aux émissions des services publics collectifs (police, justice, école, etc.).

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