Le corps brisé de Sinéad Gleeson
CONSTELLATIONS, PAR SINÉAD GLEESON, TRADUIT DE L’ANGLAIS (IRLANDE) PAR CÉCILE ARNAUD, LA TABLE RONDE, 304 P., 22 EUROS.
dès l’âge de 13 ans, elle a une hanche qui « s’effrite » et une vie placée sous le signe de la souffrance physique. on lui diagnostique une monoarthrite. L’Irlandaise sinéad Gleeson (photo), en plus d’un pèlerinage à Lourdes, subit à l’hôpital plusieurs interventions dont une arthrodèse (opération de soudure des os « désormais plus pratiquée que sur les chevaux »). Ce corps brisé et maintes fois rapiécé, telle « une constellation de métal neuf et vieux », la primo-romancière le transforme en voyage littéraire à travers les cheveux, les os ou le sang. un récit autobiographique lumineux dans lequel elle essaie de dire l’expérience, pourtant incommunicable, de la maladie, et dénonce le poids de l’institution médicale (« Le royaume des malades n’est pas une démocratie ») et de la société irlandaise qui a historiquement refusé le contrôle de leur corps aux femmes. Miraculée (elle survit à une leucémie et mène deux grossesses à terme), sinéad Gleeson convoque la politique, la science et l’art, qui, comme chez Frida Kahlo, virginia Woolf ou jo spence, est une manière de panser les plaies. Ces « Constellations » brillent très fort.