L'Obs

La pierre et ses avantages

Pour réaliser un investisse­ment locatif en profitant d’un coup de pouce fiscal, il faut se montrer très sélectif. Car les bons produits se font de plus en plus rares

- G. M.

DANS LE NEUF, PROFITEZ DES DERNIERS PINEL

L’investisse­ment locatif Pinel, réservé à un achat dans le neuf, a été prorogé jusqu’en 2024, alors qu’il devait initialeme­nt prendre fin le 31 décembre 2021. Mais l’avantage fiscal qu’il procure va être progressiv­ement revu à la baisse. Ce régime permet de bénéficier d’une réduction d’impôt de 12%, 18% ou 21% du prix d’un logement acheté neuf selon que son propriétai­re s’engage à louer pendant six, neuf ou douze ans. L’avantage sera raboté en 2023 à respective­ment 10,5%, 15% ou 17,5% et davantage encore pour les acquisitio­ns signées en 2024 (soit 9%, 12% et 14%). Mieux vaut donc signer chez le notaire avant fin 2022, sans pour autant se précipiter à l’aveugle sur n’importe quelle opération. L’étude préalable à une prise de décision rationnell­e nécessitan­t quelques semaines.

La réduction d’impôt Pinel est calculée sur le prix du bien en incluant les frais (honoraires du vendeur, frais de notaire…), plafonné à 300 000 euros au total et à 5 500 euros par mètre carré. La réduction

d’impôt est étalée sur la durée de l’engagement de location, soit par exemple 1,75% par an sur douze ans. Mieux vaut disposer d’un minimum de visibilité sur le niveau de ses revenus et de son imposition dans les années à venir pour être sûr de pouvoir bénéficier intégralem­ent de ce gain fiscal. Car si le montant annuel de l’impôt sur le revenu est inférieur à celui de la réduction fiscale, le delta est perdu.

Vous devez acheter un logement neuf en habitat collectif dans les villes éligibles au dispositif. Il s’agit des cités dans lesquelles l’o re de biens à louer est inférieure à la demande, ce qui prémunit en principe contre le risque de vacance locative : zone A (Paris, Côte d’Azur..), zone A bis (banlieue parisienne) et zone B1 (métropoles régionales). Le bailleur doit satisfaire à une double contrainte : les revenus du locataire et le loyer ne doivent pas excéder des plafonds réglementa­ires fixés par zone. « En zone A, dans les villes où le marché locatif est le plus tendu, les loyers autorisés sont inférieurs à ceux du marché libre, ce qui bride la rentabilit­é. Par ailleurs, cette dernière pâtit aussi du prix du neuf, de 20 à 30% plus cher que l’ancien », prévient Quentin Petit-Prestoud, conseiller patrimonia­l chez Artémis Courtage Gestion privée.

Comptez au mieux entre 3% et 3,5% de rentabilit­é brute (calculée en divisant les loyers annuels par le prix du logement). « Un appartemen­t situé dans une localité très recherchée, notamment en première couronne parisienne, rapportera plutôt de 2 à 3% maximum, prévient Norbert Fanchon, président du groupe de promotion immobilièr­e Gambetta. Mais le potentiel de valorisati­on du bien est supérieur à celui construit dans une ville moyenne moins attractive. » Car la plus-value à la revente est incertaine. La concurrenc­e entre les nombreux propriétai­res bailleurs souhaitant céder leur bien en même temps, c’est-à-dire à la fin de la période obligatoir­e de location, pèse en e et à la baisse sur les prix. C’est notamment vrai dans les « nouveaux » quartiers urbains foisonnant de constructi­ons neuves. Pour revendre avec plus-value, vous devrez donc parfois faire preuve de patience.

DANS L’ANCIEN, ÉCONOMIES D’IMPÔTS RIMENT AVEC TRAVAUX

Défiscalis­er en achetant dans l’ancien, c’est possible avec le mécanisme fiscal dit du déficit foncier. Il s’agit d’acquérir un logement nécessitan­t des travaux de réparation, d’entretien et d’améliorati­on que vous faites réaliser par un profession­nel. Objectif : déduire ces dépenses de vos revenus fonciers imposables en location nue (non meublée). Le montant des loyers de votre nouveau logement locatif est insu sant pour éponger l’intégralit­é du coût des travaux ? Deux solutions : premier cas, si vous disposez d’autres biens locatifs, vous reportez ce déficit sur vos autres revenus fonciers et contribuez ainsi à les soustraire de l’impôt et des 17,2% de prélèvemen­ts sociaux. Second cas, si vous n’avez

“LE POTENTIEL DE VALORISATI­ON D’UN BIEN DANS UNE LOCALITÉ RECHERCHÉE EST SUPÉRIEUR À CELUI CONSTRUIT DANS UNE VILLE MOYENNE MOINS ATTRACTIVE.”

NORBERT FANCHON, PRÉSIDENT DU GROUPE DE PROMOTION IMMOBILIÈR­E GAMBETTA

pas d’autres revenus fonciers, ce déficit est déductible de vos autres ressources imposables jusqu’à hauteur de 10 700 euros, le surplus étant reportable sur les dix années suivantes. En contrepart­ie, vous avez l’obligation de louer le logement pendant au moins trois ans. Et vous devez renoncer au micro-foncier pour passer « aux frais réels » (toutes vos dépenses, dûment justifiées, se déduisent de vos recettes). Attention, les travaux de constructi­on, reconstruc­tion ou d’agrandisse­ment sont exclus : en cas de contrôle, l’administra­tion fiscale reprendrai­t l’avantage fiscal accordé. Le recours à un expert-comptable est vivement conseillé car l’imputation du déficit foncier sur le revenu global répond à des règles très spécifique­s.

Une solution plus simple consiste à investir dans un produit clé en main auprès d’un distribute­ur spécialisé qui gère le chantier. « Nos opérations éligibles au régime du déficit foncier génèrent entre 2 et 3% de rentabilit­é, assure Loïc Guinchard, directeur commercial chez Buildinves­t Patrimoine. Nous privilégio­ns les quartiers centraux gérés par des municipali­tés qui ont une politique active de revitalisa­tion de leur centre-ville permettant aux bailleurs de trouver des locataires facilement. »

Vous investisse­z dans des emplacemen­ts ayant un meilleur potentiel que le neuf (aujourd’hui quasi inexistant dans les hypercentr­es). Mais gare à ne pas le payer trop cher ! Un logement acquis dans le cadre d’un programme déficit foncier sera en moyenne 10 % plus coûteux qu’un Pinel dans la même ville. Idem pour un bien acquis dans le cadre du dispositif Denormandi­e. Ce dernier procure un avantage fiscal calqué sur celui du Pinel. Mais le régime Denormandi­e est réservé aux logements anciens nécessitan­t des travaux importants (40% du coût final de l’opération). Par ailleurs, le programme doit être mené dans l’une des quelque 250 communes éligibles au programme national « Action coeur de ville » ou ayant conclu une opération de revitalisa­tion du territoire.

Autre voie pour défiscalis­er dans l’ancien avec travaux : souscrire à une opération éligible au régime fiscal dit Malraux. Un tel investisse­ment génère une économie fiscale forte pendant trois ou quatre ans d’affilée, à réserver aux contribuab­les très fortement imposés sur leur revenu. En pratique, vous achetez un lot dans un immeuble devant faire l’objet d’une réhabilita­tion lourde. Il s’agit de biens présentant un caractère historique ou architectu­ral, situé dans un quartier classé ou faisant l’objet d’un plan de rénovation (cinq dispositif­s différents coexistent). L’investisse­ur bénéficie d’une réduction d’impôt de 22% à 30% des dépenses de réhabilita­tion, selon la nature juridique du plan de rénovation portant sur le quartier. Cet avantage fiscal est habituelle­ment étalé sur 3 ou 4 ans, les travaux étant retenus à hauteur maximale de 400 000 euros au total.

LOUER EN MEUBLÉ : GARE À LA RENTABILIT­É

Le marché de la location meublée est victime de son succès ! Offrant de généreux avantages sur le plan fiscal, il a connu un développem­ent fulgurant ces dernières années. Hélas, le voilà dans l’oeil du cyclone depuis la crise sanitaire. Les bailleurs qui louaient jusqu’alors en mode courte durée aux touristes, via des plateforme­s comme Airbnb ou Abritel, se replient en masse, faute de locataires, sur le marché du meublé traditionn­el de longue durée : avec le statut de LMNP (loueur en meublé non profession­nel), ils ont la solution fiscale avantageus­e de déclarer leurs revenus en BIC (bénéfices industriel­s et commerciau­x ou micro-BIC, voir encadré). Résultat : l’offre explose et les bailleurs sont obligés d’accepter des baisses de loyer de 20% s’ils veulent avoir une chance de louer dans les grandes villes. Faute d’une visibilité suffisante sur la sortie définitive de la crise sanitaire, mieux vaut aujourd’hui jouer l’attentisme.

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