El Khomri raconte “la peur”
J’ai personnellement incarné la trahison des idéaux de la gauche au pouvoir. » C’est ainsi que Myriam El Khomri, celle qui a porté la très controversée loi travail en 2016, revient sur son expérience du pouvoir dans « On a les politiques qu’on mérite » (Fayard), signé Chloé Morin, politiste associée à la Fondation Jean-Jaurès. « Mon nom a cristallisé tout le rejet de Hollande. Mes combats politiques depuis plus de vingt ans n’existaient plus, ils ont été évacués, e acés », dit encore celle dont le texte, adopté par 49.3, avait suscité une vive opposition dans la rue, malgré, dit-elle, les « progrès réels » qu’il comportait. Dans ce livre, qui se penche sur la dureté du métier politique, si décrié, et dans lequel témoignent aussi Valérie Pécresse et Marine Le Pen, l’ancienne ministre raconte l’enfer qu’elle a vécu : le procès en incompétence après sa bourde chez Jean-Jacques Bourdin sur le nombre de CDD qu’on peut renouveler ; « les tags “49.3”, “sale Arabe”, “on sait où sont tes filles, elles finiront sur des grilles”, que les enfants, forcément, finissent par voir » ; la cinquantaine d’intermittents qui débarquent une nuit sous les fenêtres de son domicile privé. « Je n’en reviens pas. C’est donc allé jusque-là, jusque dans ce sanctuaire, mon intimité, ma vie de famille. Il n’y a plus de limite. Mes filles, du coup, sont empêchées d’aller à l’école. » Tout cela en valait-il la peine ?, lui demande l’auteure. « Quand tu as 40 ans, avec cette énergie-là, à quoi ça rime, si cela t’amène de la peur? Quand j’ai été attaquée, le soutien aurait dû être unanime. La classe politique a manqué de courage. Aller en politique dans ces conditions, ça n’a plus de sens. » Battue aux législatives à Paris en juin 2017, elle s’est depuis reconvertie dans les ressources humaines.