La Ligue du Midi sévit toujours
Génération identitaire, le groupe parisien les Zouaves, L’Alvarium à Angers : ces derniers mois, Gérald Darmanin a multiplié les dissolutions de groupes d’ultra-droite. Mais d’autres escouades fascisantes passent entre les mailles du filet.
C’est le cas de la Ligue du Midi, implantée en Occitanie, dont la violence n’a rien à envier aux groupes récemment interdits. Dès 2019, Muriel Ressiguier, députée (LFI) de l’Hérault et présidente d’une commission d’enquête parlementaire sur l’extrême droite, avait demandé la dissolution de ce groupe, à l’origine de très nombreuses agressions. « Je vais revenir à la charge. J’accumule les victimes des nombreuses violences de ce groupe, et je vais carrément écrire au président de la République », explique-t-elle. Le 21 janvier, des gros bras partisans d’Eric Zemmour ont violemment chargé des manifestants qui protestaient pacifiquement contre la venue du candidat à Nîmes. Parmi les agresseurs, ces antifas ont reconnu Olivier Roudier, fils du fondateur du groupe, Richard Roudier; on le voit sur une vidéo donnant des ordres aux « nervis ». Olivier Roudier compte près d’une dizaine de condamnations pour des violences. Son frère Martial, lui, a notamment été condamné à quatre ans de prison en 2013 pour avoir poignardé un jeune antifa. Le 11 décembre dernier, à Montpellier, le bar alternatif Le Barricade a été attaqué, et plusieurs personnes parmi les agressés ont reconnu de jeunes militants de la « Ligue ». En août dernier, lors d’une manif anti-passe, des témoins ont vu Olivier Roudier frapper un manifestant qui arborait un drapeau rouge. Contactées, ni la Ligue du Midi ni l’équipe d’Eric Zemmour n’ont répondu à nos questions. T. V.
Quel bilan tirer de la Primaire populaire qui a désigné, ce 30 janvier, Christiane Taubira comme candidate d’un improbable rassemblement des gauches ? Avec ses presque 470 000 inscrits et ses 392738 votants, cette initiative citoyenne a en partie tenu son pari : mobiliser des électeurs à gauche en mal d’union. Certes, le vote était gratuit, et le nombre de participants à la « désignation préférentielle » – mode de scrutin inédit consistant à distribuer des mentions aux candidats proposés – est demeuré bien inférieur à la participation enregistrée à la primaire citoyenne de 2017 (2,8 millions de votants). Mais la mobilisation de ce mois de janvier dépasse celle de la primaire écologiste (122 000 inscrits), du congrès du parti Les Républicains (140 000 inscrits), ou même le nombre de parrainages revendiqués par JeanLuc Mélenchon (272 000).
S’inspirant du mouvement américain Sunrise lancé par des militants proclimat, la start-up citoyenne, lancée par de jeunes activistes autour de Samuel Grzybowski et Mathilde Imer, a prouvé que la politique peut désormais renaître hors des partis – comme le Printemps marseillais l’avait en partie démontré aux dernières municipales à Marseille. Les organisateurs de la Primaire populaire ont ouvert le dialogue avec toutes les forces de gauche et proposé un socle commun : un revenu de solidarité dès 18 ans, le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), une taxation des revenus du capital à 40 %, alignée sur la proposition de Joe Biden, une convention citoyenne pour une VIe République ou encore la socialisation de la dette des agriculteurs passant au bio. Reste à savoir si la candidate issue du processus reprendra bien toutes ces propositions…
C’est le système du jugement majoritaire qui a départagé les différents candidats. Une innovation bienvenue en ces temps de désamour de la politique. Mais qui a aussi montré des défauts, dont le premier est son manque de lisibilité pour l’électeur et le grand public. Comment expliquer par exemple la différence entre « assez bien + » (Jadot) et « assez bien – » (Mélenchon)? Réponse : l’écolo et l’« insoumis » ont eu une majorité de mentions « assez bien », mais l’eurodéputé a recueilli plus de mentions « bien » ou « très bien » que le député de Marseille… Avec un tel mode de départage, une contestation peut vite virer au casse-tête.
Autre point faible : l’incompréhensible casting des sept candidats proposés. Trois d’entre eux – Mélenchon, Jadot et Hidalgo – ne souhaitaient tout simplement pas participer. Et pourquoi avoir écarté le communiste Fabien Roussel? Christiane Taubira, la gagnante, avait accepté la règle du jeu : c’est heureux pour les organisateurs. Mais quel effet aurait produit un tout autre résultat ? Jean-Luc Mélenchon avait par exemple qualifié le scrutin de « farce »…
En définitive, le processus aboutit à un paradoxe. Censé contribuer à la réunion des candidats de gauche, il produit une candidature supplémentaire. D’où l’incrédulité générale. Sitôt le résultat connu, la candidate à la Primaire populaire Anna Agueb-Porterie ( jugée « insuffisante ») a annoncé qu’elle ralliait Jean-Luc Mélenchon. Une démonstration par l’absurde ?
Il n’y a pas un scandale Orpea, il y en a trois. Le premier découle des pratiques dénoncées dans le livre « les Fossoyeurs », de Victor Castanet (Fayard). Une enquête administrative et financière est lancée. Nous saurons bientôt quelle est l’ampleur des dysfonctionnements dans les établissements du groupe.
Nul doute que les corrections nécessaires seront faites. Déjà, le DG, Yves Le Masne, a été renvoyé. Mais revenons en arrière : avant la publication du livre, Orpea était une action qu’il fallait avoir dans son portefeuille : il s’agissait de miser sur un marché porteur, la dépendance, qui ne peut que progresser avec l’allongement de la durée de la vie. Et d’empocher les dividendes d’un business rentable : Orpea et les autres opérateurs d’Ehpad sont des entreprises privées – et non des associations à but non lucratif ou des services publics – dégageant des marges très confortables. Le deuxième scandale Orpea tient à l’hypocrisie de ceux qui font mine de découvrir aujourd’hui qu’Orpea et les autres groupes d’Ehpad cherchent à faire des profits. Or c’est bien pour cette rentabilité exceptionnelle qu’Orpea et Korian étaient les chouchous de la Bourse. Le troisième scandale, c’est le pseudo-blanc-seing, la bénédiction apportée par la notation ESG (sur des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Le consensus des agences extra-financières était ultra-favorable et plaçait Orpea dans le top des acteurs de son secteur : 14e sur 90. De beaux schémas présentaient sa performance en matière de qualité des soins, de relation avec les employés et d’environnement de travail. Ça ne s’invente pas.