“SECOND LIFE”, LE MÉTAVERS AVANT L’HEURE
2006. Dans cet univers virtuel, tout est possible... même le business
Tous les soirs, l’ingénieur Bruno Cerboni, 58 ans, franchit le miroir. Telle Alice au pays des merveilles, il traverse l’écran de son ordinateur pour s’adonner à sa seconde vie. Dans l’« autre monde », il change de nom. Il s’appelle Bruno Etchegaray. Il rajeunit de vingt ans et perd 20 kilos. […] Comme lui, ils sont chaque jour des milliers à s’inventer une vie idéale sur « Second Life », plateforme de jeux créée en 2002 par le développeur californien Linden Lab. Dans « SL », cet univers parallèle en 3D accessible sur la Toile, près de 2 millions de « résidents » font du commerce, s’adonnent au cybersexe, construisent des maisons de nabab, organisent des concerts […] Ils créent leur avatar des pieds à la tête, choisissent le sexe, la couleur des yeux, la taille. Mais ils peuvent aussi se transformer en loup-garou, en sosie de Brad Pitt ou en Julia Roberts […] « Au début, j’y passais quatorze heures par jour, confesse Bruno Cerboni. […] Maintenant j’y passe seulement quatre heures par jour. » […] Surprise : des multinationales de la publicité, du design, de la mode, […] viennent y « chasser » le client pour tester leurs nouveaux produits. Toyota, Sony, Nissan, Reebok, Adidas, et tant d’autres y font des études de marché. D’autres vont jusqu’à créer des magasins virtuels. […] On trouve de tout, comme à la Samaritaine. Des amateurs de concours de tee-shirts mouillés, des fétichistes, des échangistes, […] des amateurs d’art, des professeurs d’université. Comme dans la vraie vie. […] ■
« Le Nouvel Observateur » n° 2196 du 7 décembre 2006.