L'Obs

CLASSIQUE DES CLASSIQUES RIO BRAVO

Western américain de Howard Hawks (1959). Avec John Wayne, Dean Martin, Ricky Nelson, Angie Dickinson. 2h14.

- FRANÇOIS FORESTIER

Un bon réalisateu­r ? « C’est celui qui ne vous ennuie pas », disait-il. Howard Hawks a été un grand artiste : il est né avec le cinéma (en 1896) et a touché à tout, western, comédie musicale, aventure, drame, tragédie, comédie, avec la même classe et le même sens du style. Fils d’un industriel fortuné, il est venu au cinéma par vocation : porté aux nues par les cinéphiles français des années 1950 et 1960, celui que les Américains ne voyaient qu’en artisan doué a gagné, via la Cinémathèq­ue française, le statut de géant, aux côtés de Hitchcock, Buñuel, Bergman et Orson Welles. Il a signé des grands films comme « Sergent York », « la Patrouille de l’aube », « la Rivière Rouge », « Scarface », « Boule de feu », « Ville sans loi »… Henri Langlois, le boss de la Cinémathèq­ue, comparait Hawks à un architecte : ses films, si précisémen­t structurés, valent bien les constructi­ons de Gropius, disait-il. C’est juste : sans effets inutiles, sans recherches compliquée­s, Hawks parvient toujours à l’essentiel, raconter une histoire, susciter des émotions, toucher à l’universel. On ne se lasse pas de revoir ses films. Combien de fois avons-nous vu « Rio Bravo » ? Sur une trame simple (un shérif courageux arrête le frère du nabab du coin. Il devra se défendre avec l’aide d’un poivrot et d’un vieux grincheux), les deux scénariste­s les plus talentueux de l’époque, Jules Furthman et Leigh Brackett, ont concocté un script parfait. Hawks voulait prendre le contrepied du « Train sifflera trois fois », film qui mettait en valeur la lâcheté d’une communauté et la solitude d’un shérif (on était à l’époque du maccarthys­me). En réaction, le cinéaste montre un personnage courageux, droit dans ses bottes, joué par John Wayne (photo) – notez bien que la boucle de sa ceinture est ornée du sigle « Red River 1946 ». Au cours des ans, « Rio Bravo » est devenu un grand classique du western, adoré du public (avec raison). Le casting est dément : Dean Martin (l’alcoolo), Angie Dickinson (craquante, photo), Walter Brennan (pittoresqu­e) et Ward Bond (granitique). Seul Ricky Nelson, pâle copie d’Elvis, détonne. Mais tant pis : « Rio Bravo » est cultissime.

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