L'Obs

LA DIVA DE DETROIT ARETHA FRANKLIN, SOUL SISTER

Documentai­re français de France Swimberge (2020). 52 min.

- NEBIA BENDJEBBOU­R

Des funéraille­s dignes d’une souveraine… Quoi de plus normal pour la reine de la soul ? Aretha Franklin était si control freak qu’elle organisa ses propres obsèques, jusqu’à décider de sa tenue pour l’éternité – robe flamboyant­e et Louboutin. Tenu dans la ville de Detroit à laquelle elle était si intimement liée, cet ultime show, qui débuta le 31 août 2018, va durer trois jours. Aretha Franlkin avait 76 ans. Truffé d’archives et de témoignage­s, ce documentai­re, qui occulte sa vie privée tumultueus­e, retrace son parcours hors du commun. Son père, pasteur charismati­que proche des figures emblématiq­ues de la communauté noire dont Martin Luther King (Aretha chantera, d’ailleurs, à ses funéraille­s), entraîne la gamine en tournée avec sa chorale de gospel à travers tout le pays. Sa voix puissante « à faire exploser une maison entière », selon sa petite-fille, lui permet de sortir très vite du lot. A 14 ans, elle devient mère et enregistre son premier album. A 18 ans, elle signe chez Columbia Records : mauvaise pioche car la maison de disques entend faire d’elle « une Barbra Streisand noire, et l’obliger à chanter une pop très standardis­ée et aseptisée », rappelle Matt Dobkin, directeur de la création du Metropolit­an Opera. La carrière d’Aretha ne décollera qu’en 1967, grâce à sa rencontre avec le producteur Jerry Wexler, d’Atlantic Records. Il la met au piano, lui offre l’occasion de se révéler. Les tubes s’enchaînent. Le succès ne la quittera plus. Elle reprend la chanson d’Otis Redding « Respect », la transforme en hymne pour tous les opprimés. « C’était la première fois qu’on entendait le point de vue d’une femme, cette chanson ressemblai­t à une masterclas­s du féminisme », souligne Daphne Brooks, professeur d’études afro-américaine­s à Yale. « Elle a donné tant de force à ses soeurs, conclut Vera Cunningham, une militante de Detroit. Elle nous a appris à dire haut et fort que nous sommes noires et fières de l’être, à croire en nous, à montrer qui nous sommes. Elle nous a aidées à trouver la diva qui est en nous. »

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