L'Obs

Cendrillon, le retour

CENDRILLON, DE JOËL POMMERAT. PORTE SAINT-MARTIN, PARIS-10E, 01-42-08-00-32, 20 HEURES. A 20H30 LE SAMEDI. JUSQU’AU 19 JUILLET.

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Il y a dix ans, on avait trouvé « Cendrillon » inférieur aux précédente­s adaptation­s du « Petit Chaperon rouge » et de « Pinocchio » par Joël Pommerat. On lui reprochait de ricaner du conte de Perrault, de le dépoétiser en le démythifia­nt. Le spectacle a-t-il changé entre-temps ? Pas fondamenta­lement. Sans doute sommes-nous plus réceptifs. Tout vient, dans cette version, de ce que Sandra (à qui est donné le sobriquet de Cendrier et non de Cendrillon) a mal compris les ultimes paroles de sa mère sur le point de rendre son dernier soupir. Elle pense qu’elle lui a demandé de ne jamais l’oublier plus de cinq minutes pour lui permettre de ne pas mourir tout à fait. Mais on ne peut fixer ses idées comme un tableau au mur et Sandra, qui s’en veut de ne penser à elle que par intermitte­nce, s’en punit en priant sa future marâtre de l’accabler de tâches ménagères éreintante­s.

La volonté de Pommerat de démêler le masochisme de la petite fille d’avec le chagrin normal de la mort d’une maman est au coeur de la pièce. L’humour n’en est pas absent pour autant. Notamment quand la marâtre se méprend sur les intentions du prince et, bouffie de vanité, croit que c’est sa main à elle qu’il demande. Le texte et la mise en scène sont inventifs, fluides, et les acteurs (Léa Millet, Catherine Mestoussis, Noémie Carcaud, Caroline Donnelly, Alfredo Cañavate, Damien Ricau) d’un parfait naturel. Edmond Jaloux disait les contes « plus nécessaire­s aux jeunes intelligen­ces que l’orthograph­e ou l’arithmétiq­ue ». D’autant plus quand un artiste comme Pommerat leur apporte comme ici un surcroît de profondeur. JACQUES NERSON

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