L'Obs

SOUS LES PAILLETTES, LA FEMME ALINE

Comédie dramatique franco-canadienne de Valérie Lemercier (2020). Avec Valérie Lemercier, Sylvain Marcel. 2h03.

- NICOLAS SCHALLER

20h55 CANAL+ CINÉMA

Valérie Lemercier aura dû en passer par le kitsch d’une vie de diva populaire pour signer son film le plus personnel. Le moins drôle mais le plus touchant. A travers ce faux biopic inspiré de la vraie Céline Dion, Valérie Lemercier célèbre la chanteuse ordinaire à la voix spectacula­ire autant qu’elle se raconte, elle, en fille de la campagne aimantée par les feux de la rampe. A cette différence près que Céline, elle, trouva l’homme de sa vie et de sa réussite en René (rebaptisé ici Guy-Claude), de vingt-six ans son aîné. Dans ce couple hors norme qu’elle filme amoureusem­ent (et ce hiatus entre Céline et elle), Lemercier trouve le supplément d’âme de ce drôle de long-métrage, où elle joue Aline dès l’enfance ! La voir en gamine de 7 ans, sa grande marotte depuis ses spectacles et son sketch parodique de « l’Ecole du fan » avec Les Nuls, insuffle une étrangeté vite supplantée par des scènes de concert sans autre intérêt que son plaisir d’actrice à pasticher son modèle. Le c(h)oeur d’« Aline » est ailleurs, dans ses séquences intimes, ses moments en creux : le « couple à trois » que forme Aline avec sa mère hyperprote­ctrice et Guy-Claude (fabuleux Danielle Fichaud et Sylvain Marcel), la relation avec son maquilleur (le trop rare Jean-Noël Brouté), le quotidien en vase clos et la solitude de la célébrité. S’y déploie enfin, après plusieurs comédies ratées (« Marie-Francine », « 100 % cachemire »), le regard de portraitis­te doucement taquin de Lemercier, entre un premier degré de roman-photo et un humour du détail à la Sempé. Si, parfois, elle tire à la ligne, reconnaiss­ons-lui ce petit miracle, proche de celui d’Alex Lutz dans « Guy », d’éclairer au-delà de la ringardise, et sans ironie aucune, les (dés)illusions de la vie d’artiste. Nul besoin d’ailleurs d’aimer Céline Dion pour apprécier Aline Dieu, qui, lorsqu’elle chante « Ordinaire », de Robert Charlebois (réadapté pour elle), parle pour Valérie : « Je suis une fille bien ordinaire / Des fois j’ai plus le goût de rien faire / J’ferais d’la musique autour d’un verre / Avec ma mère, mes soeurs, mes frères / Mais faut que j’pense à ma carrière / Je suis une chanteuse populaire. »

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