“Nous avons besoin de la solidarité nationale”
Comment avez-vous accueilli les A vous entendre, la Corse n’aurait donc annonces du gouvernement sur l’au- pas les moyens économiques de son indétonomie de la Corse ? pendance ?
C’est une volonté un peu superficielle d’éteindre un incendie. Le ministre de l’Intérieur a été dépêché en Corse [le 16 mars 2022, NDLR] après l’assassinat d’Yvan Colonna, en pleine présidentielle. À une autre période, jamais l’Etat n’aurait parlé d’autonomie.
Mais pour les indépendantistes, cette autonomie n’est qu’une première étape…
C’est la politique des petits pas : autonomie, puis autodétermination et au bout du compte, au regard de la progression de la haine contre la France, je crains que nous finissions par débattre de l’indépendance. Il y a une forme de contamination des esprits, reposant sur une mythification de ce qu’a été la Corse indépendante au siècle des Lumières. Si cela fonctionne dans l’opinion corse, c’est parce que les gens ont besoin de cette part de rêve.
Que pensez-vous de la comparaison entre la Corse et la Catalogne ?
Elle est ridicule ! La Catalogne est le moteur économique de l’Espagne, avec un PIB de plus de 200 milliards d’euros, soit 20 % du PIB espagnol. La Corse, c’est moins de 9 milliards d’euros, soit moins de 0,5 % du PIB français… dont 6 milliards qui dépendent de la solidarité nationale ! Une région pauvre comme la nôtre ne peut pas s’en passer.
Clairement pas. Toute l’économie de la région repose sur le tourisme, un secteur très concurrentiel, le BTP, dont la croissance est d’environ 1 % par an, et les services publics, qui dépendent des subventions de l’Etat. L’agriculture locale représente moins de 1 % du PIB, l’industrie, moins de 10 %, et nous n’avons aucune activité à forte valeur ajoutée… Comment la Corse assumera-t-elle les salaires de ses fonctionnaires, l’assurance chômage, le paiement des pensions de retraite ? Ajoutons qu’une hypothétique Corse indépendante devrait prendre sa part de la dette française, soit 0,5 % de 2 000 milliards d’euros, soit 10 milliards d’euros ! Il faudrait plusieurs générations pour rembourser ! D’autant plus que la Corse peine déjà à emprunter. Quant aux impôts, ils ne suffiraient pas, car il n’est pas acceptable de surtaxer des pauvres. En revanche, une région pauvre dépend énormément des subventions : comment aurions-nous traversé la crise de 2008 ou la crise du Covid si la Corse n’avait pas été adossée à un pays riche comme la France ? Et comment affronterions-nous les futurs flux migratoires liés au réchauffement climatique ? C’est impossible. Et les indépendantistes le savent parfaitement…
Propos recueillis par