L'Obs

RIFIFI À ROME

MEURTRE À L’ITALIENNE

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Film policier italien de Pietro Germi (1959). Avec Claudia Cardinale, Pietro Germi, Franco Fabrizi. 1h49.

Commençons par le début : avant le film de Pietro Germi, il y a le livre de Carlo Emilio Gadda, publié en 1957. Personnage fantasque de la littératur­e italienne, Gadda est une sorte de Gorki lombard, qui a débuté dans la vie en étant ingénieur en aéronautiq­ue en Sardaigne et en Argentine et dont les livres sont souvent traduits en français (mais aussi souvent oubliés). Son roman « l’Affreux Pastis de la rue des Merles », qui raconte une enquête sur un braquage dans un quartier bourgeois de Rome, est en fait une sorte de déambulati­on dans la conscience des personnage­s, presque tous malfaisant­s, médiocres ou déplaisant­s. On est loin de la comédie à l’italienne, notamment dans l’adaptation qu’en a faite Pietro Germi, cinéaste proche du Parti communiste, préoccupé par la lutte des classes et la condition du petit peuple prolétaire. Dans « Meurtre à l’italienne » (Gadda n’a pas participé à l’écriture du scénario), Germi dépeint des personnage­s peu recommanda­bles, que ce soit la jolie Assuntina (la servante) ou la rêche Liliana (la patronne). Le plus remarquabl­e, c’est que Germi lui-même tient le rôle principal, celui de l’inspecteur (il refera le coup dans « Jeux précoces » et « Il sicario », de Damiano Damiani) et, ma foi, pour un acteur non profession­nel, il s’en tire super bien. Passent, dans ce film en noir et blanc, Nino Castelnuov­o, charmant garçon qui ne va pas tarder à séduire Jacques Demy pour « les Parapluies de Cherbourg », et Claudio Gora, grand seigneur de la scène italienne. Mais, évidemment, on n’a d’yeux que pour Claudia Cardinale, alors à ses débuts (elle a 20 ans), qui est craquante, non, craquissim­e. Détail amusant : ce film mettra à la mode les titres « à l’italienne », dont « Divorce à l’italienne » (1962), « Viol à l’italienne » (1963), « Mariage à l’italienne » (1964), « A l’italienne » (1965) et, en 2014, « Je t’aime à l’italienne ». Pietro Germi finira par abandonner le réal-socialisme pour se tourner vers la comédie acide (« Séduite et abandonnée » et « Ces messieurs dames »). Quant à Claudia Cardinale, quatre ans plus tard, elle sera Angelica dans « le Guépard » et elle est tellement belle que je ne m’en suis pas encore remis.

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