L'Obs

“Chaque chose en son temps”

- ARNAUD GONZAGUE

DOMINIQUE CHARGÉ

Président de La Coopératio­n agricole, syndicat de coopérativ­es agricoles

Que pensez-vous de la mise en place de l’aide alimentair­e promise par le gouverneme­nt à la rentrée ?

C’est une bonne chose, compte tenu de l’inflation terrible qui touche particuliè­rement les ménages les plus modestes. Mais si nous soutenons la mise en place en urgence de cette aide, nous regrettons que, contrairem­ent à ce que son nom laisse penser, elle ne soit pas fléchée exclusivem­ent vers des achats alimentair­es, qu’elle puisse être utilisée à d’autres fins. Nous allons travailler pour qu’à l’avenir, elle soit réellement ciblée.

La Convention citoyenne pour le Climat aurait souhaité un chèque exclusivem­ent utilisable pour des aliments de qualité, bio et locaux, excluant la malbouffe. Qu’en pensez-vous ?

Je pense qu’il ne faut pas tout mélanger. L’aide versée par le gouverneme­nt est une mesure d’urgence pour permettre à 9 millions de Français de se nourrir ailleurs qu’aux Restos du Coeur ! Les produits que vous qualifiez « de qualité » sont souvent plus chers que les autres : faudra-t-il expliquer à des gens qui n’ont que 5 euros par jour pour manger qu’ils ne pourront acheter que certains types d’aliments? C’est prématuré. Je ne dis pas qu’il ne faut pas prendre le temps de faire de la pédagogie auprès des familles pour les encourager, à terme, à orienter leurs achats vers certains produits et à limiter certains excès. Mais ce n’est clairement pas le rôle d’un dispositif d’urgence.

Reconnaiss­ez-vous que la malbouffe existe ?

Je ne sais pas, exactement, ce qu’on entend par ce terme. Les 2 200 coopérativ­es que je représente, c’est-à-dire 300000 agriculteu­rs, soit une marque alimentair­e sur trois dans les magasins, travaillen­t pour proposer des produits sains, sûrs et accessible­s à tous. Notre mission est de répondre à tous les désirs et besoins de consommati­on. Bien sûr, il est essentiel d’éduquer les consommate­urs à choisir de façon éclairée, mais il s’agit aussi de leur faire prendre conscience du coût et de la valeur de l’alimentati­on puisque, aujourd’hui, certaines coopérativ­es ont du mal à rémunérer les agriculteu­rs et que d’autres frôlent carrément la défaillanc­e économique. Mais c’est là un travail de plus long terme. Chaque chose en son temps !

Imaginons que l’aide alimentair­e puisse d’ores et déjà cibler certains produits. Lesquels voudriez-vous voir avantagés ?

Je rêve, bien entendu, que tous les produits issus des entreprise­s françaises soient avantagés. Ce serait formidable de pouvoir se nourrir en enrichissa­nt exclusivem­ent des producteur­s de notre pays, qui en ont bien besoin. Mais je sais que c’est une issue peu probable d’un point de vue juridique. Propos recueillis par

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