L'Obs

LE FUTUR SANS VOITURE

VERS DES TRANSPORTS DURABLES

- Documentai­re allemand de Johan von Mirbach (2022). 52 min. ARNAUD GONZAGUE

Appelons cela le « syndrome Anne Hidalgo ». Tous les habitants de Paris et d’Ile-de-France le connaissen­t : il s’agit d’une forme d’hostilité épidermiqu­e, presque pathologiq­ue, à l’encontre de celle qui dirige la capitale depuis 2014. Ceux qui en sont atteints imputent à l’édile la responsabi­lité d’une ville enlaidie, noyée sous les déchets, où pullulerai­ent les rats et où tout n’est pensé que pour les « bobos à vélo » au détriment des pauvres automobili­stes. Voilà. Le mot important est lâché : automobile. Car, si le bilan Hidalgo ne mérite évidemment pas que des éloges, il y a aussi, dans cette aversion à son égard, de la nostalgie pour une capitale qui fut le royaume de la bagnole par excellence – un Paris vrombissan­t, polluant, embouteill­é, un peu patriarcal. Certains vivent mal que la Ville Lumière, qui a piétonnisé ses berges et imposé le 30 kilomètres/heure presque partout, ne soit plus comme naguère le terrain de jeu des possesseur­s de pots d’échappemen­t. C’est qu’avant d’être technique, la question des « mobilités douces » (terme un peu gnangnan, hélas) est d’abord politique. En urbanisme, comme il est dit dans ce documentai­re consacré à Paris, mais aussi à Barcelone, Berlin, Copenhague et Singapour, « l’offre crée la demande ». En clair, moins on laissera de place aux voitures, plus la ville changera d’allure. Ce qui était bruyant et impraticab­le deviendra agréable, convivial, propice aux rencontres. Oui, il s’agit bien de politique, même si, pour la plupart des gens, ces choix relèvent plus du bon sens que de l’engagement : si 42 % des habitants de Copenhague (photo) se déplacent à pied ou à vélo, ce n’est pas par préoccupat­ion sportive ou écologique mais parce que c’est plus pratique. On ne regrettera qu’une chose à propos de ce documentai­re, par ailleurs plutôt précis : son manque d’esprit critique. L’auteur aurait été bien inspiré de se pencher sur le lien entre ces choix, heureux, de gentrifica­tion écolo et la faible mixité sociale qu’ils engendrent, à Paris comme ailleurs.

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