VICTIMES DE LA MINE
LES ENFANTS DU PLOMB
Vert de rage. Série documentaire de Martin Boudot (2021). 52 min.
Metaleurop, vous vous souvenez ? En 2003, la fonderie de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) fermait ses portes, laissant sur le carreau quelque 800 employés, symboles d’une désindustrialisation brutale du territoire français. Mais Metaleurop n’est pas seulement une tragédie sociale, elle constitue aussi un scandale environnemental, comme le révèle ce documentaire pugnace qui a réclamé de longs mois d’enquête à ses auteurs. En étudiant divers documents, ils sont parvenus à déterminer que près de 6 000 enfants vivant à proximité de l’usine nordiste ont été atteints de saturnisme, cette intoxication au plomb qui cause des dommages irréversibles sur les jeunes métabolismes (augmentation des risques de cancer, troubles de la mémoire, anémie, maux de tête, baisse du quotient intellectuel…). Et qu’aujourd’hui encore, les abords de l’ancien site industriel soi-disant réhabilités, et où des milliers de familles vivent, sont 774 fois au-dessus des normes dites d’évacuation, c’est-à-dire qui mériteraient que la terre soit tout simplement retirée. Le plomb de Metaleurop ne vient pas de nulle part mais d’une mine péruvienne, celle de Cerro de Pasco, site excessivement lucratif (on a besoin de plomb dans les batteries, l’armement, la joaillerie…) qui empoisonne aussi sans vergogne ses riverains. A Cerro de Pasco, on croise des enfants « plombés » jusqu’à l’os, ayant perdu jusqu’à douze points de QI, ce qui compromet lourdement leurs possibilités de faire des études. Certains (heureusement rares) en meurent, comme la petite Esmeralda, 13 ans, emportée par une aplasie médullaire due à une concentration anormale de plomb dans le sang. Le propriétaire de Metaleurop et de la mine de Cerro de Pasco s’appelle Glencore. C’est un groupe minier basé en Suisse qui, lui, se porte très bien : 4,7 milliards de dollars de bénéfices l’année dernière. Interpellés par les journalistes, ses dirigeants assurent qu’ils font tout pour améliorer la situation péruvienne. Quant à l’existence d’un site dans le Pas-de-Calais, ils semblent ne pas en avoir entendu parler. Etonnant, non ?