L'Obs

CONFESSION D’UN VISIONNAIR­E ISAAC ASIMOV, L’ÉTRANGE TESTAMENT DU PÈRE DES ROBOTS

- DIDIER JACOB

Les Russes ont-ils, après Homère, inventé la science-fiction ? Né dans un village proche de Smolensk en 1920, Isaac Asimov (1920-1992) a débarqué à Brooklyn trois ans plus tard. Il se passionne pour la science, apprend l’anglais en quelques minutes, entre à l’Université Columbia où il devient docteur en biochimie. Naturalisé américain en 1928, il est surtout l’enfant des comic books dévorés dans sa jeunesse. Il publie sa première nouvelle en 1939, alors qu’il se destine désormais à l’écriture à temps complet. « J’ai la conviction que la science-fiction peut aider l’humanité », explique l’auteur dans un film adressé aux spectateur­s du futur et qui rend surtout hommage à la mode du passé – ces vestes à carreaux et ces rouflaquet­tes de la mort dont raffolait Isaac. A défaut de filmer des robots détruisant les bureaux d’Arte à Issy-les-Moulineaux, Mathias Théry filme un vieux magnétosco­pe Goldstar où une main introduit la cassette pourrie dont on imagine qu’elle contient l’entretien qui a été, dit la prod, reconstitu­é au moyen des techniques les plus modernes, à commencer par l’intelligen­ce artificiel­le. C’est le futur qui se mord la queue. Fallait-il à ce point se creuser la cervelle pour trouver une justificat­ion visuelle à ce qui finalement nous intéresse : Asimov qui parle. Il est clair, limpide même. Il explique qu’il a écrit sa série la plus populaire, « Fondation », quand il avait 20 ans et s’attribue même, à mots couverts, la paternité de « Star Wars ». Selon Asimov, la science-fiction connaît un tournant dès lors que de véritables scientifiq­ues, comme lui-même, s’en emparent. Les images d’archives sont au rendez-vous ainsi que les multiples artefacts de la pensée asimovienn­e, livres ou objets filmés d’une manière qui fait parfois songer au magasin de jouets de « Toy Story ». Asimov est-il donc résolument moderne ? Pas si sûr. D’abord parce qu’il écrivait, disait-il, treize livres par an – une cadence digne d’une époque révolue. Ensuite parce que, contrairem­ent à la noirceur d’un Philip K. Dick, Asimov croyait dans l’avenir de la science et dans la pérennité de l’humanité, sous une forme ou une autre. L’homme toujours meilleur, l’homme un jour robot.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France