Quand la mode entravait le corps des femmes
L e’enfer est pavé de bonnes intentions. Au milieu du siècle, grâce aux progrès de l’industrie métallurgique, les modistes inventent la cage crinoline, comme le raconte la nouvelle exposition du Musée industriel de la CorderieVallois, à Notre-Dame-de-Bondeville, près de Rouen. Cette armature métallique, dont plusieurs exemplaires d’époque sont présentés, remplace l’amoncellement de jupons qui donnait à la jupe l’ampleur et l’arrondi souhaités. Les cerceaux qui la constituent sont souples et légers, l’élégante qui les porte est moins entravée dans sa marche. Il n’empêche, quel symbole de la condition des femmes de l’époque que de les voir a ublées d’une cage !
Le haut du corps n’est pas épargné, avec l’ajout de baleines métalliques au corset. Jamais les femmes n’auront la taille aussi serrée. Des robes de visite, de soirée et de bal visibles ici attestent des mensurations irréalistes que l’on imposait aux femmes. Selon Nathalie Harran, historienne du costume et collectionneuse de vêtements historiques qui a prêté l’ensemble des pièces de l’expo, les fillettes portaient aussi des corsets dès l’âge de… 7 ans. Leurs organes internes en pleine croissance subissaient de telles pressions qu’ils pouvaient en être déformés. Le sexe dit faible ne s’en trouvait guère renforcé…
Le rehausse-fesses – sorte de coussin attaché à la taille – est, lui, inventé pour répondre à la nouvelle mode des années 1880 : l’accent mis sur la chute des reins. Pour s’asseoir, les femmes devaient d’abord soulever discrètement leur prothèse rembourrée. Parfois, elles disposaient d’une tirette retrousse-jupe ou retrousse-tournure (demi-cage crinoline alors à la mode) dissimulée dans un pli du tissu. Le diable s’habille dans les détails. ■
« Quand la mode façonne le(s) corps », Musée industriel de la Corderie-Vallois, Notre-Damede-Bondeville (76), jusqu’au 8 avril 2023.