PASSION NEGRONI
Plus subtil que le spritz, ce cocktail indémodable à la morsure amère irrésistible n’est pas compliqué à préparer chez soi et peut se décliner à l’infini
Quand j’ai commencé à travailler ici, je ne connaissais rien aux amers, alors j’ai fait des recherches et beaucoup dégusté à l’aveugle pour travailler mon palais », raconte Julie Martin, cheffe barmaid d’Amaro. Dans ce bar du 9e arrondissement de Paris, monté par Philippe Baranes, amoureux de l’Italie, toute la carte brode autour de l’amertume. Et pour les clients sceptiques ? « S’ils n’aiment pas le cocktail, on le change, nous sommes là pour faire découvrir, pas pour faire peur », expliquent Julie et Maxime, son co-bartender. Il faut dire que cette saveur passionnante n’est pas la plus appréciée des palais français, contrairement à ceux des voisins italiens. L’écrivain Emmanuel Giraud en fait d’ailleurs un éloge savoureux dans son livre « l’Amer » (Editions Argol) : « Là-bas, l’amertume est joyeuse, sociale, évidente. Ce n’est pas cette vilaine cousine arriérée dont on a un peu honte en France. En Italie, l’amer est de sortie à chaque repas, il aiguillonne les sens du premier ristretto matinal jusqu’au sombre amaro digestif que l’on sirote, repu, dans la quiétude nocturne. »
Pas étonnant donc que l’on situe l’apparition du Negroni au Caffè Casoni à Florence. Ce cocktail aurait été inventé en 1919 lorsque le comte Camillo Negroni, qui affectionnait les Americano à l’apéritif, aurait demandé au barman Fosco Scarelli de remplacer l’eau gazeuse par du gin, qu’il avait découvert en Angleterre. Ainsi serait né ce cocktail mêlant à parts égales vermouth rouge, campari et gin, surmonté généralement d’une tranche d’orange. Si la recette est plutôt simple à exécuter, Julie Martin rappelle que « la dilution, elle, doit être très précise ». La diversité des vermouths (apéritifs à base de vin muté et plantes macérées), des gins et des amers ou amaro (liqueurs apéritives, infusion de plantes amères dans de l’alcool distillé) permet des combinaisons et des mélanges subtils et quasi infinis.
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