L’écrivain qui a tué Dupont de Ligonnès
Romain Puértolas, auteur de “l’Extraordinaire Voyage du fakir…”, mène l’enquête sur le meurtrier présumé le plus célèbre de France, en cavale depuis 2011
COMMENT J’AI RETROUVÉ XAVIER DUPONT DE LIGONNÈS, PAR ROMAIN PUÉRTOLAS, ALBIN MICHEL, 288 P., 19,90 EUROS.
Depuis le succès phénoménal de « l’Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea » en 2013, adapté au cinéma et en BD, Romain Puértolas n’est pas parvenu à reproduire le miracle. Celui qui avait fait voler une factrice dans les airs, décongelé Bonaparte, et même fait ressortir le fakir de son armoire, s’est reconverti dans l’enquête policière à l’ancienne. Pour la première fois ici, il devient le personnage de son propre roman qui s’ouvre dans le prétoire de la cour d’assises de Toulouse. Puértolas y est accusé d’avoir lardé de 94 coups de couteau à beurre (!) Xavier Dupont de Ligonnès, évaporé dans la nature depuis 2011, après que les cadavres de sa femme et de ses quatre enfants ont été retrouvés enterrés sous la terrasse de sa maison nantaise. On peut tiquer sur le traitement burlesque – d’aucuns en souligneraient même le goût douteux – du coupable présumé de ce macabre fait divers, mais Puértolas, dont on connaît l’humour qui frise parfois le grotesque, innove en menant de front plusieurs lignes narratives qui s’entrecroisent pour examiner une à une les hypothèses sur la cavale de « XDDL ». A l’époque des faits, l’auteur était encore capitaine de police et s’était passionné pour cette affaire. Il reprend les éléments de l’enquête, les triture pour en faire jaillir des spéculations plausibles, complète au besoin avec son « imagination foutraque » et se glisse dans la tête de chacun de ses protagonistes. Comment Ligonnès a-t-il survécu pendant toutes ces années ? Où a-t-il trouvé une planque avant d’arriver à La Bastide-de-Bousignac où l’auteur l’a « supposément » tué en mai 2023 ? Malgré certaines outrances, Puértolas tient son lecteur et, par un ultime et machiavélique retournement, exalte la supériorité de la fiction sur la réalité.