L'Obs

CONFESSION­S INTIMES

CONVERSATI­ON AVEC ROMY SCHNEIDER

- Documentai­re de Patrick Jeudy et Charly Buffet (2018). 53 min. SOPHIE DELASSEIN

Le document est exceptionn­el : dans la nuit du 12 décembre 1976, Alice Schwarzer, journalist­e allemande et féministe de la première heure, reçoit en secret – et à sa demande – l’actrice Romy Schneider (photo dans « les Choses de la vie », avec Michel Piccoli). Cette année-là, elle est la Mado de Sautet et « Une femme à sa fenêtre » sous l’oeil de Granier-Deferre. Mais de cinéma, il sera peu question ; elle vient graver sur bandes quelques confession­s, ces douloureux secrets qui font d’elle une grande brûlée de l’existence et donnent tant de profondeur à son jeu. A Alice Schwarzer, elle dit tout, sans réprimer ni les sanglots ni la colère, privilégia­nt le français car l’allemand de son enfance est la langue du ressentime­nt, de cette colère, justement, longtemps mise en sourdine. Près de cinquante ans après, cet enregistre­ment sert de base au film de Patrick Jeudy et Charly Buffet. Il est entre autres question des parents de l’actrice, Magda Schneider et Wolf Albach : deux comédiens, deux purs nazis. Romy confie à la journalist­e que sa mère (dont la maison donnait sur le nid d’aigle du Führer à Berchtesga­den) avait même « couché avec Hitler ». Un document d’archive inédit montre Magda Schneider tout sourire en sa compagnie. De son enfance, il lui revient aussi, jusqu’à la nausée, les traits de l’immonde

Hans Herbert Blatzheim, le deuxième mari de sa mère, qui la poursuivai­t de ses avances libidineus­es et lui dérobait d’autorité ses cachets colossaux des « Sissi ». La trilogie des « Sissi », parlons-en : à l’insu des gamines rêveuses que nous étions, elle a notamment servi à redorer après-guerre l’image de Magda Schneider, qui jouait le rôle de la mère de l’ingénue impératric­e d’Autriche. Depuis le premier volet de la série, l’Allemagne pensait que Romy Schneider (qui n’avait que 16 ans) lui appartenai­t. Alors, elle lui en a voulu de l’avoir quittée pour la France et les beaux yeux d’Alain Delon. De son côté, la comédienne, qui n’avait pas pardonné à l’Allemagne son passé nazi, jouait des juives et des résistante­s. Devenue mère, elle appela son fils David et sa fille Sarah.

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