L'officiel Art

VISION RAPPROCHÉE

Edouard Baribeaud

- Propos recueillis par Yamina Benaï

APRÈS DES ÉTUDES À L’ÉCOLE DES ARTS DÉCORATIFS DE PARIS, LE FRANCO-ALLEMAND EDOUARD BARIBEAUD (NÉ EN 1984), S’INSTALLE À BERLIN EN 2010. IL DÉVELOPPE UN TRAVAIL COMPOSÉ AUJOURD’HUI D’OEUVRES SUR PAPIER, DE PEINTURES, LIVRES D’ARTISTES ET DE VIDÉOS MONTRÉES DANS LE CADRE DE DIFFÉRENTE­S EXPOSITION­S, ET PUBLIÉS DANS LES TITRES DE PRESSE (DER SPIEGEL, NEW YORK TIMES...). L’OFFICIEL ART L’A CONVIÉ À LIVRER DES DESSINS INÉDITS.

Edouard Baribeaud, Godhuli, 2015, aquarelle et encre sur papier, 22,5 x 28,5 cm.

L’OFFICIEL ART : Votre pratique fait apparaître une pluralité de genres et techniques au sein même de discipline­s diverses (dessin, peinture, vidéo), comment décririez-vous votre ou vos style(s) artistique(s).

EDOUARD BARIBEAUD : Ma pratique est en constante évolution, évitant de rester contraint dans un certain style ou une technique particuliè­re. Cependant, mes travaux sont unis par le même élément qui est le dessin. Finalement, que ce soit par le biais d’une série de peintures, du dessin, du livre d’artiste ou de la vidéo, ce qui m’intéresse avant tout, est de mettre au point une histoire. Chaque récit développe d’une certaine manière son propre langage plastique. La narration doit suggérer, plutôt qu’imposer un sens de lecture. La toile, qu’elle soit peinte ou écran de cinéma, est un espace de projection sur laquelle l’imaginaire du spectateur se déploie. Le propre de la rêverie poétique est de concilier les contraires, de faire passer le lointain dans le proche, le passé dans le contempora­in. Il s’agit de créer un univers intemporel et universel entre la réalité et mon imaginaire.

En dehors des travaux de commande (presse magazine, livres), quel est votre processus créatif ?

Mes idées prennent forme dans un carnet de croquis que j’ai en permanence avec moi. Je considère ces cahiers comme des laboratoir­es d’expériment­ations graphiques. Ma démarche artistique s’inscrit dans une recherche de motifs dans des lieux insolites, de rencontres ou de dialogues avec des personnes croisées au gré de mes cheminemen­ts. Partant d’impression­s et de croquis recueillis in situ, les oeuvres créées par la suite mettent en scène le vécu dans des visions inspirées et réinterpré­tées par ma sensibilit­é et mes références personnell­es d’artiste. D’un point de vue technique, je peins et dessine un peu comme un imprimeur. C’est-à-dire que je débute par l’applicatio­n des couleurs claires pour fnir avec les teintes sombres. L’élément le plus lumineux de l’image est le blanc du papier ou de la toile resté vierge. Je construis donc une image par couches, de la lumière à l’obscurité.

Quels auteurs, artistes nourrissen­t votre inspiratio­n ?

Trois noms d’artistes me viennent spontanéme­nt à l’esprit : Pierro della Francesca, Pier Paolo Passolini et Saul Steinberg. Le premier, peintre italien de la Renaissanc­e, est auteur d’univers baignés d’élégance et de douceur ; le deuxième est un réalisateu­r visionnair­e et révolution­naire ; le troisième est, comme il se défnissait lui même, “un écrivain qui dessine”. Ils font partie des artistes qui refètent d’une certaine manière trois discipline­s qui me passionnen­t. Bien que diférents en terme de périodes, d’expression­s artistique­s et de médium, ils forment le noyau dur de l’“archipel” d’artistes qui nourrissen­t mon inspiratio­n.

Diriez-vous que la ville de Berlin – où vous résidez – génère un apport en termes de vitalité artistique apte à dynamiser le travail d’un artiste ?

Mon installati­on à Berlin, il y a cinq ans, n’a pas été motivée uniquement par des considérat­ions artistique­s mais aussi des raisons personnell­es, je suis francoalle­mand. Berlin se transforme et, avec elle, la scène artistique. Je ne sais si la vitalité est toujours aussi vive, mais pour moi cette ville fonctionne comme un grand atelier qui permet une facilité matérielle de production. Cependant, je ressens le besoin artistique de changer d’horizon. Tout du moins pour quelques temps. Peut-être pour mieux revenir. Berlin est semblable à une “tour de Babel” de galeries et d’artistes venus du monde entier.

Quels sont vos prochains sujets d’étude ?

Parallèlem­ent à mes nouvelles séries de peintures et de dessins, je travaille sur un projet de court-métrage que je souhaite exposer dans le cadre d’une installati­on artistique. Le thème de ce flm est inspiré par une série de dessins que j’ai publié dans le livre d’artiste Au Pavillon des Lauriers (éditions Nieves Books). Une nuit, un vieux marionnett­iste de Kathputli (art traditionn­el du Rajasthan) entend par hasard l’opéra Les Indes galantes de Jean-Philippe Rameau. Fasciné par cette musique il s’endort et rêve que des marionnett­es fantomatiq­ues enfamment son théâtre. Le vieil homme pressent que cette vision annonce une catastroph­e pour son bidonville et décide de créer un nouveau spectacle... C’est un projet très stimulant pour lequel je rassemble le budget destiné à débuter le tournage en Inde, prévu en octobre. WWW.EDBARIBEAU­D.COM EDOUARD BARIBEAUD EST REPRéSENTé PAR LA GALERIE JUDIN ET SLEEK ART.

“Partant d’impression­s et de croquis recueillis in situ, les oeuvres créées par la suite mettent en scène le vécu dans des visions réinterpré­tées par ma sensibilit­é et mes références personnell­es.”

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