Katja Novitskova
La banalité du mal
Le travail de Katja Novitskova explore notre perception des systèmes biologiques, écologiques et informatiques, ainsi que la production vertigineuse des documents qui s’y rattachent sous forme d’images numériques en ligne. L’artiste évoque pour L’Officiel Art sa participation à la Biennale de Venise, la veine sci-fi et la possibilité d’une sentience non-humaine.
L'OFFICIEL ART : Vous représentiez l'Estonie cette année à la Biennale de Venise. Le titre de l'exposition, “If Only You Could See What I've Seen with Your Eyes” est une citation magnifique et bien connue tirée d'un film culte, Blade Runner. Que pouvez-vous me dire de l'exposition et du processus qui la sous-tend ?
KATJA NOVITSKOVA: Je réalise d'ordinaire des installations sculpturales à partir d'images numériques que je découvre sur internet. Je m'approprie cette matière première et je la modifie jusqu'à en faire quelque chose de neuf, qui raconte une tout autre histoire. Je m'intéresse à l'origine de ces images : pourquoi ont-elles été produites ? Par qui ? Comment ? Sous quelle forme matérielle ? D'un projet à l'autre, l'atmosphère se modifie un peu. Je réagis à l'environnement du lieu de l'exposition. Le pavillon estonien à Venise est situé dans un palazzo un peu lugubre avec de nombreuses pièces, et non pas dans un pavillon national véhiculant un message fort. J'ai donc voulu que l'exposition ait une tonalité qui se distingue nettement de ce que représente Venise et de cette expérience touristique qu'est devenue la Biennale. L'idée de départ était la suivante : si un individu se promène dans les rues de Venise, avec son petit café à la main, en admirant cette ville merveilleuse avec un regard de touriste, et pousse la porte du pavillon, alors il fera l'expérience de cette pénombre presque surnaturelle qui est toujours virtuellement présente dans cette ville, mais qui reste cachée. L'obscurité est cachée au sens où elle constitue un autre front touristique qui ne demande qu'à être découvert. J'ai voulu proposer une expérience qui évoque un donjon dans un film d'horreur — sauf qu'il s'agirait ici d'un donjon dans un film d'horreur de science-fiction. Il s'agit d'imaginer comment on peut faire l'expérience d'un film ou d'un jeu vidéo de ce genre-là : on se déplace dans un environnement fermé, et on rencontre des objets que l'on n'a jamais vus auparavant et qui sont terrifiants sur un plan subliminal. Au lieu d'exposer des monstres ou des créatures fantastiques, j'ai recréé une atmosphère de terreur en produisant des sculptures à partir de photographies d'animaux et de créatures qui existent dans notre monde. En guise de perversion supplémentaire, mais aussi d'hommage au genre de la “science-fiction d'épouvante” par le biais de notre rapport à la technologie, je n'ai utilisé que des images empruntées au champ de la recherche biotechnologique. La plupart des images représentent des animaux de laboratoire. Ceux-ci sont utilisés pour la recherche médicale : drosophiles, nématodes (vers microscopiques), etc. Agrandies cent fois, ces images produisent quelque chose de nouveau. Un vers microscopique en vient à évoquer toutes sortes de références cinématographiques, d'Alien à Tremors en passant par Dune, ainsi que tous ces films d'horreur autour d'un monstre qui ressemble à un serpent marin ou à un insecte géant. Les mouches rappellent aussi l'univers de Cronenberg. Chaque salle abrite une série d'expériences qui jouent avec ces tropes. Mais, fondamentalement, il s'agit de questionner la nature même de ces images. Par exemple : d'où proviennent-elles ? Pourquoi existe-t-il des milliards d'animaux de laboratoire, pourquoi prendre des millions de photos de ces animaux ? Comment fonctionne ce secteur ? Je voulais que le spectateur vive l'exposition comme quelque chose d'effrayant, alors qu'en réalité je ne fais que montrer des images assez banales. Il s'agit d'images de documentation empruntées à des labos un peu partout dans le monde. Ce qui me semble intéressant, c'est qu'il n'existe aucune production de connaissances, ni de découverte scientifique, ni de recherche génétique qui n'entraînent pas une production d'images.
Revenons-en au titre de l'exposition, qui pose la question du regard machinique. Dans votre travail, certains motifs récurrents comme les courbes, les flèches ou les graphiques matérialisés dans l'espace n'ont rien d'arbitraire : ils sont indéchiffrables pour la plupart des humains, mais pas par des algorithmes.
Absolument : la question est aussi de savoir à qui l'oeuvre est destinée. De cette manière, je questionne l'idée selon laquelle nous serions les seuls destinataires du tableau. Celui-ci est au fond une matrice de données. En d'autres termes, nous pouvons le lire de telle ou telle manière, par exemple de manière émotionnelle, mais en même temps un algorithme verra dans ce même tableau, par exemple, la croissance économique de l'Allemagne aux cours des deux dernières décennies.
C'est une approche originale de l'abstraction…
Peut-être, mais c'est abstrait pour qui ? C'est aussi une manière de révéler nos propres limites en matière de gestion des images. Nous disposons aussi d'autres approches, plus émotionnelles (un mode de filtrage très personnel), et je souhaite que les deux approches soient possibles. Mon travail est profondément personnel car je m'en remets spontanément, de manière intuitive, au filtrage de mes yeux et de mon coeur quand je sélectionne les images sur lesquelles je veux intervenir. Il n'y a là aucune décision rationnelle, et en même temps j'aime créer cette traduction froide, machino-compatible, pour que les machines puissent aussi en retirer quelque chose.
L'écrivain Kathy Acker a écrit : “Le monde où n'existe aucune sensation, le monde robotique n'existe pas.”
Est-ce pour cette raison que, pour vous, les animaux se rapprochent de ce que deviendra la technologie, dans la
mesure où nous avons un rapport émotionnel avec eux que nous n'avons pas avec la technologie pure ?
Nous n'avons pas de relation émotionnelle avec la technologie au sens traditionnel du terme. Mais je pense que, sans l'affect, il n'y aurait eu aucune avancée technologique. C'est impossible, tout simplement. Où la complexité existe, la beauté existe aussi – tout comme l'affect. En ce sens, je pense que la sentience est présente chez tous les animaux. Je ne pense pas qu'elle commence avec les primates. Des articles magnifiques sont consacrés à l'esthétique et aux sensations esthétiques que l'on observe dans des écologies non-humaines. Ils donnent des exemples d'animaux qui manifestent du goût pour quelque chose de beau, et eux-mêmes peuvent être beaux. Je ne pense pas qu'il y ait de démarcation nette au-delà de laquelle commenceraient l'émotion, l'esthétique et la beauté : tout cela débute pour ainsi dire d'emblée. Je crois que c'est ce que veut dire Nora Khan quand elle écrit que, à partir du moment où la machine (c'est-à-dire l'intelligence artificielle) produit de la complexité, on obtient une complexité comportementale qui est comparable à la complexité affective. C'est une façon de voir les choses. Je tiens à souligner le pouvoir de ce monde non-humain en observant toutes ces créatures qui sont bien vivantes dans notre monde, et dont l'expérience est en réalité comparable à la nôtre. On a vu apparaître un nouveau champ, l'écologie queer, qui prend en compte tous ces stades intermédiaires, cet entre-deux. Je pense à ce dauphin dont l'aileron a été équipé d'une caméra par l'armée américaine – Manuel DeLanda parle à ce propos d'“assemblage”. C'est une relation très particulière : ce dauphin communique avec les humains, puisqu'il peut entendre des ordres tout en restant maître de ses décisions. Il existe de nombreuses situations insolites comme celle-là, par exemple des animaux qui interagissent avec des drones, etc. Bien sûr, ce sont les humains qui produisent toutes ces technologies. Ce qui suscite ma curiosité, c'est d'imaginer le moment où ces processus deviennent incontrôlables. C'est pour cette raison, par exemple, que j'utilise ces balançoires pour bébé dans mes sculptures, l'idée étant de produire un assemblage où les choses restent indécidables.
Cette idée que l'affect est externalisé, confié à des machines, peut mettre mal à l'aise…
Sans doute, mais c'est déjà ce qui se produit quand on offre un jeu vidéo à un enfant : on externalise son attention et son rapport au monde, qui ne sont plus reliés à un autre être humain mais à un algorithme. C'est un phénomène très banal. Tout le monde en fait autant, mais ce geste n'a rien de terrifiant, il n'y a pas de musique menaçante en arrière-fond comme dans Blade Runner.
En 2016, vous avez participé à la Berlin Biennale sous l'égide du collectif DIS. Celle-ci a connu une réception mitigée, et a été frontalement critiquée par la presse traditionnelle. Récemment, certains critiques ont tenté de la réévaluer, notamment à la lumière des critiques sdont a fait l'objet la Documenta cette année.
Je n'en ai pas été surprise car, d'emblée, le geste “anti-art” de cette Biennale a suscité la méfiance, avec sa manière d'utiliser des matériaux synthétiques, publicitaires et inesthétiques pour faire de l'art. L'idée du branding comme art est apparue très suspecte aux yeux des institutions artistiques établies qui, depuis le siècle dernier, fonctionnent sur une perception anticapitaliste de l'art et de ce qu'il représente. Et on voit soudain surgir des artistes très jeunes qui disent : “Adoptons la culture commerciale !” Ça peut faire peur, bien sûr. Mais l'intention des commissaires n'avait rien de cynique. C'est toute l'ironie de l'affaire, je crois : au fond, les oeuvres n'étaient pas commercialement viables. Un tableau poussiéreux reste une oeuvre d'art de bien plus grande valeur commerciale que les bizarreries présentées à Berlin. Ce n'est pas parce que ces oeuvres reprennent les codes du commercialisme qu'elles sont commerciales. Tout personne évoluant dans le milieu de l'art, et se prétendant dotée d'un regard exercé, doit pouvoir le comprendre.
Pouvez-vous nous dire quelques mots de l'oeuvre que vous y avez présentée ?
On m'avait confié un lieu d'exposition très particulier pour la Berlin Biennale, et j'étais très enthousiaste parce que ce lieu était en soi un diagramme logique de tout ce qui nous semble confus dans le monde. Le bâtiment était à l'origine un immeuble communiste de l'Allemagne de l'Est, et son hall d'entrée était décoré de vitraux dans le style du réalisme socialiste. On y voyait des agriculteurs, des ouvriers de divers secteurs industriels, etc. — ce qui m'a vivement intéressée dans la mesure où les discours sur le marxisme et les ouvriers suscitent encore la sympathie du public. Plus tard, le bâtiment est devenu une école de commerce (l'ESMT), si bien que, dans le même hall d'entrée, le nom des soutiens financiers de l'école (notamment des compagnies pétrolières russes) étaient gravés en lettres d'or. Toutes les semaines, l'école accueillait des conférences sur des sujets liés aux affaires, et les salles de réception comportaient encore des bannières annonçant ces événements, dans un style maladroit caractéristique de ce type d'événement. Les commissaires voulaient donc que je travaille dans ce hall, et j'ai vite compris que je ne pourrais pas proposer un travail qui renvoie directement à ces conférences, ou au langage visuel des foires commerciales, car Simon Denny préparait déjà quelque chose de similaire dans la pièce adjacente. J'ai donc réfléchi aux origines de l'esthétique communiste, ou de l'esthétique capitaliste – puisque toutes deux sont nées avec la société agricole. Cette période historique a vu la naissance d'une civilisation fondée sur la propriété privée, et j'ai eu l'idée de créer une atmosphère de temple néolithique – ou, si vous voulez, de temple néolithique satanique. Je voulais faire quelque chose de très simple qui renvoie à une période disparue. Le feu et les cornes s'opposent sur le plan esthétique, mais c'est là une trajectoire bizarre qui, à mon avis, produit un sens cohérent.
Au fond, vous évoquez une tension entre le monde rationaliste actuel et quelque chose de plus mystique ?
Oui. Il en existe divers exemples, comme le club Bilderberg – ces capitalistes qui se réunissent une fois par an pour discuter de la marche du monde, mais dans une atmosphère très Eyes Wide Shut. Le satanisme n'est jamais loin. On m'a envoyé une photo du dîner donné pour les actionnaires de Gazprom, qui s'est déroulé dans ce hall, avec mes sculptures sataniques en arrière-plan. Katja Novitskova, Pattern of Activation, 2014, impression sur aluminium, PLV, polyuréthane, acier inoxydable, 250 x 200 x 35 cm, trampoline et sculpture, 145 x 250 x 200 cm, pièce unique.
KATJA NOVITSKOVA'S WORK EXAMINES OUR UNDERSTANDING OF BIOLOGICAL, ECOLOGICAL AND INFORMATIONAL SYSTEMS, AND THE VERTIGINOUS PRODUCTION OF THEIR DOCUMENTATION AS DIGITAL-BASED IMAGES ONLINE. SHE TALKS HERE ABOUT HER PARTICIPATION AT THIS YEAR'S VENICE BIENNALE, SCI-FI HORROR, AND THE POSSIBILITY OF NON-HUMAN SENTIENCE.
INTERVIEW BY THOMAS BUTLER
L'OFFICIEL ART: You represented Estonia at this year's Venice Biennale. The show's title If only you could see what I have seen with your eyes is a familiar and brilliant quote from the cult classic Blade Runner. Can you tell me a little bit about this show and the processes behind it? KATJA NOVITSKOVA :
I usually make sculptural installations from digital images and digital material that I encounter online. I appropriate this material and modify it to the point that it becomes something new and tells a different story from its origins. I'm interested in how these images were produced, why they were produced, by whom, and what kind of material they exist in. From project to project I switch the mood a little bit. I respond to the environment of the place where the exhibition is taking place. The Estonian pavilion in Venice is a gloomy Palazzo apartment with many rooms. It's not a national pavilion that makes a strong statement. And so I wanted the exhibition to be very different in tone to what Venice is and the kind of touristic experience that the Biennale tends to be. The initial thought was: if a person is walking around the streets of Venice with their little coffee and they are looking at this beautiful city as a tourist and they then enter the door of the pavilion they will experience a kind of uncanny darkness that is possibly present in the city — but it's also hidden. It's hidden in a sense that it's another touristic façade that wants to be seen. I wanted to create an experience reminiscent of a dungeon in a horror movie but in my case a sci-fi horror dungeon. It originates in how you would experience a movie or video game of this genre, where you are navigating a closed environment and you're encountering things you've never seen before, things that are subliminally scary. Rather than depicting monsters or fantastical creatures, I created this mood by making sculptures using photographs of animals and beings that already exist in the world. As an extra twist to the show, and as a homage to the sci-fi horror genre, to our relationship to technology and to how this is visualized, I focused on images taken from the domain of biotechnological research. What you see are mostly images of lab animals. They are used for medical research: Fruit Flies, Sea Elegans (tiny worm organisms) etc. When they are blown up as images they become something else. A tiny worm begins to look like a mix of references from Alien, Tremors, Dune, and all the other horror movies in which you find this big snake-like or insect-like monster. And the flies are also Cronenbergian. Each room has its own little set-up of experiences that are playing on these tropes. But at the core, it was about questioning the nature of these images. Such as, where do they come from? Why do we have billions of lab animals and why are we taking millions of pictures of them? How does this whole industry operate? I wanted people to experience the exhibition as something creepy. When in fact, I'm actually presenting a very banal set of images. They are daily documentation taken from research labs everywhere. And what I find interesting is that, at this point, there's no creation of knowledge, or scientific development, or even genetic research, without the creation of an image.
If we return to the title of the show, it raises this question of the machinic gaze. In your work, the recurring motifs of curves, graphs, and arrows materialized in space are not arbitrary— algorithms can read them, but most humans can't.
Yes, there is exactly this idea of who is the work meant to be for? This undermines the idea that the picture is meant just for us. A picture is basically a data matrix. This just means we can read it one way — we might read it in a very emotional way, but at the same time an algorithm can see that the same image might represent the economic growth of Germany over the last 20 years.
This seems to be a nice play on abstraction?
Yes, abstract to whom? It also signals our own limitations in terms of our capacity to process images, but we also have other ways, which are emotional — a kind of very personal filtering — and I want both to be present. My work is deeply personal because I'm relying intuitively on the filter in my heart and eyes when I select images I want to work with. There's no rational decision about it, but at the same time, I like to create this cold suitable-for-machine translation so they will also get something out of it.
The writer Cathy Acker wrote: “The World in which there is no feeling, the robot world doesn't exist”. Is this why you think animals are an approximation of how technology will develop, because there's an emotional investment in animals, whereas we don't have a connection to pure technology?
We don't have a connection to technology in the old-school sense of technology. I think there would be no technological advance without affect. It's just not possible. If you have complexity, I think you have beauty and you have affect somehow. In that sense, I do think sentience is present in all animals. I don't believe it starts with primates. There are beautiful articles written about aesthetics and aesthetic sensations that exist within non-human ecologies. They give examples of animals showing appreciation for something beautiful, or they are themselves beautiful. I think that there's no cut-off line where emotion, aesthetics and beauty starts, it kind of starts at the very beginning. And I think it might be similar to what Nora Khan writes about when she says that as soon as you have complexity in machines, which is basically artificial intelligence, you have complexity in behaviour that is similar to affective behaviour. That's one way of looking at it. I'm interested in underlining the power of this non-human world by looking at all these creatures who are alive in the world and who are basically experiencing the same things we are experiencing. There's a new field called Queer Ecology, which is embracing all these in-between stages. The example of a Dolphin, which the U.S. Military had adapted with a camera on its fin — Manuel DeLanda calls this an assemblage. It's a very specific relationship of two things: there is the Dolphin, who is communicating with people because he can listen to commands, but he has his own agency. And so there are a lot of these weird situations, such as animals interacting with drones etc. Of course, humans make all of these technologies. What drives my curiosity is to imagine when these processes get out of control. So that's why, for example, I use the baby swing sculptures. The point of the baby swing sculptures was to create assemblages where things aren't clear. You are forced to ask yourself: Is it a robot? It's animalistic, but it kind of has a character, and yet it's sort of unclear what that character is. I really like that it's unclear.
It's a bit disturbing that care or affect is being outsourced to a machine.
Yes, but this is already happening when you give a kid a video game: it's an outsourcing of their attention and their engagement with the world from another human being to an algorithm. It happens all the time. Everyone is doing it, but it doesn't look scary, there's no dramatic music in the background like in Blade Runner.
In 2016 you took part in the Berlin Biennale curated by DIS. It divided opinion and was roundly attacked by the mainstream media. Lately, it has been the subject of reappraisal by some critics, particularly in light of the criticism Documenta received this year.
I wasn't surprised, because from the start there has been suspicion of what is essentially an anti-art gesture; what you could describe as the employment of very synthetic and nastylooking advertising material to make art. The idea of branding as art is very suspicious to the established art institutions, which since the last century, have been building on an anti-capitalist understanding of what art is. Suddenly there are all these kids saying: “Let's embrace commercial culture.” And that can be very scary. But the curators' intentions were not cynical. I think the irony here is that the work is not that commercially viable. A dusty painting is still a much more valuable art object than any of this weird stuff. Just because this type of art has used the codes of commercialism, it doesn't make it commercial. If you are in the art world and you claim to have a highly attuned visual literacy you should be able to understand that.
Can you speak a little bit about the work you showed?
I was given a very special venue for the Berlin
Biennale that I was excited about because it is already in itself a Venn diagram of everything that is confusing about the world. The building was originally an East-German communist building with stained-glass windows in the lobby that are social realist in style. They depict farming, various industries and the workers etc., which is interesting because discourses around Marxism and the worker still gets sympathy today. Then the building became a business school (ESMT) and all the sponsor's names are displayed in golden letters in the same lobby, many of which are Russian oil companies. Every week they hold conferences on business-related topics and the reception area gets filled with the actual advertisement banners for the events, which have the clumsy designs you would expect from such events. And so the curators wanted my work in the lobby. I knew I couldn't do something that referenced this event or trade fair visual language because Simon Denny was already doing something like this in the room next to my work. So I thought about the origins of the communist aesthetic or these capitalist aesthetics — you can say that both originate in the birth of agricultural society. This historic period signalled the birth of property-based civilization and so I wanted to create this early Neolithic temple vibe or satanic Neolithic temple vibe. The intention was to do something simple and from another time. The fire and the horns clash aesthetically, but it's a weird trajectory that I find makes sense.
Essentially you are evoking this tension between the on-going Enlightenment project with something more mystical?
Yes, and you have examples of this, such as the Bilderberg Group of capitalist that get together once a year to talk about the world but there's also something very Eyes Wide Shut about it. There's always this satanic twist. Someone sent me a photo of a dinner held for people from the company Gazprom, which took place in the lobby, and my satanic sculptures were there looming in the background. Katja Novitskova is represented by Greene Naftali, New York and Kraupa-Tuskany Zeidler, Berlin.