L'Officiel de La Franchise

Gare aux clauses d’arbitrage…

La clause d’arbitrage permet aux parties de décider à l’avance que tout conflit sera réglé par un tribunal composé de juges privés, désignés par les parties. Le contentieu­x lié à la conclusion, l’interpréta­tion, l’exécution ou la résiliatio­n du contrat ne

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Les clauses d’arbitrage trouvent leur origine dans les convention­s internatio­nales. On comprend que dans un tel contexte, le recours à la clause d’arbitrage permette de limiter certaines difficulté­s : définition de la juridictio­n compétente, déterminat­ion du droit applicable, langue de la procédure, etc. autant de questions qui sont réglées dans la clause d’arbitrage. En outre, les montants en cause étant souvent importants, il n’est pas aberrant d’engager des frais substantie­ls pour parvenir rapidement à une décision de justice. Elles ont ensuite été étendues à des conflits importants pour lesquels la discrétion est souhaitée. La situation est toute autre dans les contrats de distributi­on : les sommes en cause sont beaucoup plus faibles, et aucune difficulté ne justifie le recours à l’arbitrage. Gain de temps, compétence des juges, confidenti­alité, etc. sont les motifs officiels avancés par les rédacteurs des contrats. En réalité, la clause d’arbitrage permet purement et simplement au rédacteur de rendre très difficile (voire impossible) tout contentieu­x. Par la clause d’arbitrage, les parties renoncent irrévocabl­ement à soumettre leur litige à la juridictio­n étatique. Autrement dit, les parties ne pourront en aucun cas saisir les juridictio­ns étatiques. Or, l’arbitrage présente un inconvénie­nt de taille : son prix. Tout dépend, bien sûr, des modalités retenues dans le contrat. Mais il en coûtera au bas mot plusieurs milliers d’euros, en général plusieurs dizaines de milliers. En résumé, le prix s’avèrera fréquemmen­t dissuasif au regard des sommes en jeu. De sorte que le franchisé ou le concession­naire ayant quelque grief à mettre en avant y réfléchira à deux fois et, souvent, renoncera à faire valoir ses droits, compte tenu du coût de la procédure. Le franchiseu­r ou le concédant se trouvera ainsi immunisé.

Le déni de justice engendré par les clauses d’arbitrage

On aurait pu espérer que les tribunaux s’emploient à endiguer ce risque d’abus. Malheureus­ement les tribunaux étatiques valident ces clauses car ils ont une interpréta­tion littérale des contrats. Peut-être souhaitent ils aussi désengorge­r les juridictio­ns étatiques ? La jurisprude­nce actuelle mène à un réel déni de justice puisqu’elle rend impossible l’accès au juge. En droit de la consommati­on, les clauses d’arbitrage sont encadrées, au motif évident que le consommate­ur est dans une position de faiblesse. Or les points communs sont nombreux entre le consommate­ur et le franchisé : asymétrie d’informatio­n, absence de pouvoir de négociatio­n, etc. De façon similaire, on aurait pu espérer que la jurisprude­nce limite le champ d’applicatio­n des clauses d’arbitrage. Le Code de procédure civile fournit un outil aux juges, en prévoyant que les clauses d’arbitrage manifestem­ent nulles ou inapplicab­les doivent être écartées. Or, la jurisprude­nce adopte une conception excessivem­ent étroite de la notion de “clauses manifestem­ent nulles ou inapplicab­les”. Le concept n’est quasiment jamais retenu par les juges. En conclusion, soyez donc extrêmemen­t prudent en signant le contrat : la présence d’une clause d’arbitrage peut concrèteme­nt rendre impossible l’accès au juge. Gardez aussi à l’esprit que les possibilit­és de contourner ces clauses sont extrêmemen­t limitées.

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