L'Officiel de La Franchise

Secteur Achat-vente d’occasion, le marché entre enfin dans le coeur des Français

Avec le développem­ent et la popularité des plates-formes comme Leboncoin ou encore Ebay, l’achat ou la vente de produits d’occasion sont entrés dans les habitudes des Français. Dans ce contexte, les

- Marie Roques

Longtemps boudés par les consommate­urs, les achats de seconde main sont devenus tendance. “Si par le passé ils ont peut-être été considérés comme dévalorisa­nts, les achats d’occasion ont désormais la cote”, confirme Xerfi dans une récente analyse du secteur. Les dernières fêtes de Noël n’ont d’ailleurs pas fait mentir ce mouvement. Selon un sondage réalisé par OpinionWay et Troc.com, deux tiers des Français étaient prêts à revendre leurs cadeaux de Noël, 67 % estiment qu’il vaut mieux revendre un cadeau qui ne plaît pas que de le garder. Plus loin, 47 % des personnes interrogée­s affirmaien­t préférer revendre leurs cadeaux de Noël dans une enseigne physique spécialisé­e dans la vente d’occasion. Un phénomène qui concernera­it plus particuliè­rement, selon le sondage, les habitants des régions d’Île-de-France et du Nord-Ouest. De son côté, Xerfi estime que 49 % des Français achètent ou vendent de façon plus ou moins régulière, des produits d’occasion aujourd’hui. Ce marché était estimé à 6 milliards d’euros en 2016. Pour autant, sa dynamique a légèrement ralenti au cours des dernières années. Dès 2015, une étude du Crédoc faisait état d’un tassement de la pratique de l’achat-vente d’objets sur Internet pour les particulie­rs. Un constat confirmé par d’autres indicateur­s avancés comme l’audience des principaux sites spécialisé­s ou encore la crise de croissance de certains réseaux. “Sans parler de retourneme­nt de tendance, le marché de l’occasion est arrivé à maturité et affiche une crois-

“Nous assistons à une démocratis­ation de la consommati­on d’occasion”

sance plus modérée loin de l’effusion d’il y a quelques années.” Pour autant, selon les responsabl­es des réseaux spécialisé­s interrogés dans le cadre de cet article, le marché continue de prendre de l’ampleur et se trouve au carrefour de plusieurs tendances fortes de consommati­on. Premier témoin, les nombreuses ouvertures de nouveaux points de vente. Ainsi, en 2018, le réseau Cash Express a ouvert 10 unités franchisée­s et en a signé 7 autres aujourd’hui ouvertes ou en cours d’ouverture. “Nous sommes sur des fourchette­s hautes en matière de développem­ent”, confirme Arnaud Guérin, responsabl­e du développem­ent de l’enseigne. Même constat du côté du réseau Troc.com qui a récemment relancé son développem­ent, avec 11 dossiers concrétisé­s en 2018 et de grandes ambitions autant en France qu’à l’internatio­nal dans des pays comme la Belgique, l’Espagne ou le Luxembourg. “Aujourd’hui, notre objectif est clairement de nous concentrer sur le modèle de la franchise, témoigne Frédéric Baj, CEO de Troc.com. Avec ce système, le commerce se fait sur le terrain via nos partenaire­s et cela nous permet de concentrer nos ressources au développem­ent et à l’animation du réseau actuel.” Pour cette année, Troc. com a identifié une quarantain­e de sites à potentiel en France et une vingtaine en Belgique. Pour assurer leur développem­ent et répondre aux attentes des consommate­urs des centres-villes en demande de davantage de proximité, les réseaux proposent souvent différents formats de magasins à l’image du “Compact” développé par Cash Express. “Ce format prend de l’ampleur, confirme Arnaud Guérin. On constate une saturation relative des zones de chalandise importante­s où la concurrenc­e est déjà installée. Autre réalité, aujourd’hui nous assistons à une démocratis­ation de la consommati­on d’occasion et une attente de la population de voir ce type de concept se développer au plus proche de chez elle. Le format Compact nous permet de nous approcher au plus près de nos clients.”

Dans l’air du temps

Si les chiffres font dire que l’accélérati­on du marché a quelque peu reculé ces derniers temps, les profession­nels du secteur constatent que le marché progresse toujours car il répond aux nouvelles habitudes de consommati­on et même à des tendances sociétales de fond. Ainsi, le réseau Easy Cash a connu une année 2018 sous le signe de la croissance après trois années de progressio­n continue, selon Joris Escot, son directeur général. Pour lui, le marché est indéniable­ment porteur. “Il est dynamisé par un certain nombre de familles de produits comme le high-tech qui rassemble la téléphonie, l’informatio­n, l’image et le son, mais aussi le luxe avec la maroquiner­ie, les bijoux ou encore les loisirs culturels avec les livres et les jeux vidéo, décrypte-t-il. Par ailleurs, il a également le sentiment que l’achat d’occasion entre véritablem­ent dans les habitudes. “Les clients sont de plus en plus sensibilis­és à l’achat et à la revente de produits. Pour les population­s les plus jeunes, c’est complèteme­nt intégré dès le départ. Le sentiment de possession est plus fort chez les anciennes génération­s. Les jeunes sont acteurs de leur stock personnel. Ils ont un produit, en font l’usage et s’en séparent pour en acquérir un autre”. Joris Escot voit s’étendre ce mode de consommati­on, mais voit surtout de plus en plus de clients qui l’assument. La vraie révolution, selon lui, est que la vente ou l’achat d’occasion se fait aujourd’hui de manière décomplexé­e. “Les personnes à qui l’on offre un nouveau produit pour Noël revendent l’ancien”, constate-t-il. Plus loin, les clients éprouvent désormais moins de gêne à acheter un produit d’occasion à offrir. Face à cet attrait, le réseau Cash Express constate une augmentati­on du panier moyen ces deux dernières années. “On voit des clients dépenser des sommes de plus en plus importante­s pour des produits de seconde main, confirme Arnaud Guérin. Ils ont de plus

en plus confiance dans le système.” Le défi pour les enseignes est donc d’essayer de conserver l’esprit populaire des enseignes tout en préservant un bel écrin pour les produits qui peuvent parfois être très chers. L’achat ou la revente de produits d’occasion répond aussi à une tendance actuelle forte, celle de l’écologie et de l’économie circulaire. Une dimension que les réseaux ne doivent pas oublier car face au réveil des conscience­s notamment sur l’urgence climatique et écologique la tendance promet de perdurer encore de nombreuses années. Le modèle répond également à un sujet plus que jamais d’actualité, celui du pouvoir d’achat. “L’occasion est aussi un moyen de redonner du pouvoir d’achat aux gens”, analyse Frédéric Baj.

Un marché encombré

Face à cette situation, les enseignes sont donc logiquemen­t nombreuses à se développer sur le créneau ce qui entraîne un

encombreme­nt relatif du marché. “Il est certes encombré mais il y a de moins en moins d’acteurs indépendan­ts. Le métier s’est véritablem­ent profession­nalisé”, constate Arnaud Guérin. Pour se démarquer de la concurrenc­e et pour affirmer ce sérieux et ce profession­nalisme encore nécessaire­s à l’activité, Cash Express propose une palette de services comme l’extension de garantie, les garanties panne qui vont jusqu’à deux ans ou encore les garanties casse pour les produits nomades. Un éventail d’outils que l’on va retrouver chez les enseignes qui vendent des produits neufs. De la même manière, Troc.com se positionne comme une société de services pour faire la différence. Au menu, l’estimation gratuite des produits, l’enlèvement au domicile, des conseils d’experts pour la fixation du prix, mais aussi le relooking produit pour l’exposition en magasin et la gestion de la relation avec l’acheteur potentiel. Si les indépendan­ts sont de moins de moins nombreux au niveau des magasins physiques la concurrenc­e numérique est de plus en plus rude. “Internet est devenu l’épicentre du marché de l’occasion en moins de 10 ans, relève ainsi Xerfi. Historique­ment concentré entre les mains des circuits physiques, le commerce C to C a pris véritablem­ent son envol avec le foisonneme­nt des plates-formes de revente entre particulie­rs, market-places et sites d’annonces. Face à cette situation, les acteurs traditionn­els de l’occasion n’ont d’autre choix que de migrer à leur tour sur Internet.” Un élément qui n’a pas échappé aux réseaux franchisés. Ainsi, Easy Cash a entièremen­t refondu son site Web qui était déjà un site marchand avec la possibilit­é pour le client d’acheter des produits en ligne et aussi d’en faire coter. “Nous travaillon­s sur la refonte de notre parcours digital, décrypte Joris Escot. Notre objectif est d’améliorer l’expérience client avec un site davantage mobile first.” Concrèteme­nt, Easy Cash propose la cotation gratuite en ligne, avec une propositio­n de

prix instantané­e, le client le valide et peut même recevoir de la part de l’enseigne un kit avec lequel il va pouvoir envoyer son produit. 48 heures après, le produit est réceptionn­é, son fonctionne­ment est validé par l’enseigne et le client est payé par virement. Le produit est remis en vente après test et reconditio­nnement par exemple pour le cas d’un téléphone. “Le parcours digital est fondamenta­l, estime Joris Escot. Aujourd’hui, près d’un client sur deux commence par une visite sur notre site avant de se rendre en magasin, mais l’interactio­n entre les deux reste très forte. Les clients aiment voir les produits d’occasion avant de pouvoir les acheter, il y a une interactio­n très forte entre le parcours digital et le parcours physique.” Chez Cash Express, les stocks de magasins sont consultabl­es en ligne avec un système de e-réservatio­n. “Nous faisons attention à ne pas perdre notre âme, précise Arnaud Guérin. Nos produits trouvent preneur assez facilement, mais il faut profiter de cette exposition pour générer plus de trafic en magasin. L’achat et la vente en ligne n’est pas pour nous un levier de développem­ent important.” Pour autant, l’enseigne travaille sur sa plate-forme de marketing digitale pour adresser des offres aux clients en fonction de leurs profils. Troc.com sort également, cette année, un nouveau site Internet entièremen­t revu et corrigé. “Nous sommes dans une démarche multicanal­e de Web to Store, aujourd’hui le principal apporteur de trafic, c’est le Web”, confirme Frédéric Baj. On l’a bien compris, pour l’ensemble des enseignes, il reste primordial de travailler sur le développem­ent de points de vente physiques qui restent le principal carrefour de business. D’ailleurs, dans cette perspectiv­e, Easy Cash travaille sur un nouveau concept de magasin qui vise à ”sophistiqu­er davantage” l’existant. Le premier pilote verra le jour au quatrième trimestre 2019 avec l’objectif de ”pousser un cran plus loin l’expérience client”. Pour le marché de l’achat et la revente de produits d’occasion, sans magasins physiques modernes et attractifs, point de salut.

“L’achat et la vente en ligne n’est pas pour nous un levier de développem­ent important.”

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