Épluchez le contrat de franchise, étape par étape
“Ce n’est pas l’enseigne qui compte, c’est ce qu’il y a dans la boutique !”
Pour créer, vous avez décidé de miser sur un concept qui a déjà fait ses preuves en rejoignant un réseau de franchise, de partenariat ou une coopérative. Vous avez sélectionné une enseigne et la tête de réseau vous a remis, conformément aux dispositions de la loi Doubin, le Document d’information précontractuelle (DIP). En annexe, vous avez donc trouvé le projet de contrat. Si vous avez au minimum 20 jours devant vous pour le décortiquer et le signer, la lecture des premières pages vous laisse sans doute perplexe. Voici nos conseils pour vous aider à y voir clair.
La viabilité et la rentabilité du projet. Voilà la première chose qui doit guider votre analyse. Si la dimension juridique est cruciale, la question première pour tout candidat doit rester : Vais-je gagner de l’argent ? “Vous pouvez avoir un très mauvais contrat avec un concept qui marche très bien. Dans ce cas-là, vous ne le sortez jamais du tiroir”, lance Olga Zakharova-Renaud, avocat associé au cabinet BMGB. Mais attention, ce n’est pas pour autant qu’il faut négliger celui-ci. La période d’échanges avec le franchiseur et les informations transmises avant la signature du contrat sont décisives. Comme l’impose la loi Doubin, le projet de contrat est annexé au Document d’information précontractuelle. C’est la première fois que vous allez le voir et il s’agit généralement d’un document type. Agnès Parent, responsable juridique franchise et commerce à la Fédération française de la franchise (FFF), insiste sur l’importance de se faire assister, en remettant la documentation à un avocat. Pour vous aider à prendre vos repères dans des paragraphes parfois abscons, elle fait remarquer que “les clauses principales du contrat sont mises à part et identifées dans le DIP. C’est un petit indice qui permet aussi de savoir ce qui est véritablement important”. La durée du contrat proposé, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités et les conditions financières doivent obligatoirement apparaître.
QUESTION D’ÉQUILIBRE
Lorsque vous allez étudier le contrat, ce que vous verrez en premier, c’est son titre. Si certains portent le nom de
franchise, d’autres emploient des termes différents comme partenariat. Ne vous focalisez pas là-dessus. Pour Olga Zakharova-Renaud, l’intitulé “n’a aucune importance, ce qui compte, c’est ce qui est écrit dans le contrat”. Même s’il s’appelle contrat de partenariat, il se peut que ce soit un vrai contrat de franchise, parce qu’il en contient trois éléments constitutifs : la transmission du savoir-faire, une enseigne commune et une assistance. Ce que l’avocate résume en ces termes : “Ce n’est pas l’enseigne qui compte, c’est ce qu’il y a dans la boutique !” Si a contrario tous les documents parlent de franchise, du franchisé et du franchiseur, mais qu’il n’y a pas de savoir-faire, le “franchisé pourrait attaquer le franchiseur pour dol, en disant qu’il lui a menti sur l’exact contenu du contrat qu’il lui a vendu”. Le juge pourra considérer qu’il y a eu tromperie, “sauf si le franchiseur prouve que ce n’est pas le mot franchise qui a poussé le candidat
à rejoindre le réseau mais son enseigne et la qualité de
ses produits”. De manière générale, veillez à l’équilibre entre les obligations du franchiseur et du franchisé. Et ne vous contentez pas de comparer la taille des paragraphes respectifs. Olga Zakharova-Renaud met en garde, sur le fait que certains contrats emploient par exemple le conditionnel ou une tournure de ce type dès qu’il est question des “obligations” de la tête de réseau. Les transformant alors en simples options, que le franchiseur appliquera selon son bon vouloir : “Cela reflète un état d’esprit. Toutes ces pseudo obligations, on ne pourra pas les réclamer.”
TOUT NE SERA PAS NÉGOCIABLE
Dans l’encadré ci-contre, nous relevons 5 éléments clés nécessitant une vigilance particulière. Mais peut-on vraiment négocier en tant que candidat, si le contrat ne nous convient pas en l’état ? Certains points peuvent l’être,
“Veillez à l’équilibre entre les obligations du franchiseur et du franchisé”
comme le montant des redevances si vous faites partie des tout premiers franchisés. Mais Agnès Parent pointe que la franchise repose tout de même sur une uniformisation du savoir-faire. Ce qui en fait le squelette même, ne sera pas négociable. Pour le reste, tout dépendra – soyons directs – de l’intérêt que le franchiseur vous porte. Olga Zakharova-Renaud relève que des profils d’investisseurs, les propriétaires d’un emplacement intéressant, ou des personnes qui se porteraient acquéreurs des succursales du franchiseur qu’il a envie de vendre rapidement auront tout de suite plus d’arguments à faire valoir. La réforme des contrats intervenue récemment est “plus protectrice des intérêts du franchisé que du franchiseur dans l’application des contrats d’adhésion, selon l’avocat associé au cabinet BMGB. Si le franchisé apporte la preuve qu’il a voulu négocier mais qu’on lui a répondu que c’était tout ou rien, ce sont des clauses imposées sans aucune négociation. Il a la possibilité ensuite de les annuler en justice, mais cela suppose un contentieux”. Et le but en signant le contrat, n’est pas de partir en contentieux ! Il est alors plus raisonnable, de ne pas signer…