L'Officiel de La Franchise

Ouvrir un corner d’une autre marque dans mon point de vente

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Envie de compléter vos revenus en installant dans votre boutique un corner d’une autre marque ? Si l’idée est séduisante, attention à la légalité d’une telle pratique : plusieurs clauses s’y opposent et il faut absolument s’assurer que le franchiseu­r donne son accord.

Une nouvelle marque attrayante qui arrive sur le marché et vous vous posez la question de la commercial­iser dans votre boutique ? Il peut en effet paraître séduisant de diversifie­r son activité en créant, dans son point de vente, un corner dédié à une autre marque. Cela permet en effet un petit complément de revenu, mais aussi de s’ouvrir à un autre type de clientèle ou encore d’apporter un souffle nouveau à sa boutique. Il existe d’ailleurs des exemples réussis, comme les franchises Sushi Daily et Beauty Bubble, implantées sous forme de corner dans les grandes surfaces. Tout le monde y gagne : le point de vente qui héberge le corner, car il offre un nouveau service à ses clients, et la franchise hébergée qui bénéficie d’un local et d’une clientèle déjà existants. Mais attention : créer un corner d’une autre marque ne peut aucunement se faire sans l’accord de son franchiseu­r.

Clauses d’exclusivit­é

En effet, même si rien n’est précisémen­t stipulé dans le contrat à ce sujet, accueillir une autre marque dans son point de vente contrevien­t à plusieurs clauses du contrat de franchise. La clause de non concurrenc­e, tout d’abord. “Même en cas d’absence de clause de non concurrenc­e, la jurisprude­nce considère qu’un contrat de franchise implique une obligation de loyauté et donc de ne pas faire concurrenc­e”, précise Jean-Baptiste Gouache, avocat spécialisé en franchise et membre du Collège des experts de la Fédération française de la franchise (FFF). Donc clause de non concurrenc­e ou pas : tout corner commercial­isant une marque concurrent­e est totalement à proscrire. Mais même avec des marques non concurrent­es, les choses ne sont pas si simples. Car un contrat de franchise implique des droits mais aussi des devoirs. Ainsi, d’autres clauses généraleme­nt présentes dans les contrats, vont à l’encontre de la création d’un corner d’une autre marque dans son point de vente : les clauses d’exclusivit­é d’approvisio­nnement et d’exclusivit­é de revente. “Dans beaucoup de contrats, ces exclusivit­és sont stipulées : le franchisé n’a le droit de proposer que des produits de son franchiseu­r”, explique JeanBaptis­te Gouache. Il est donc indispensa­ble de vérifier si ces clauses d’exclusivit­é existent, avant même de se poser la question de la mise en place d’un corner. Jean-Baptiste Gouache fait état, par ailleurs, de la pratique usuelle qui consiste à indiquer dans les contrats la spécialité de la franchise. Ainsi, s’il est clairement écrit que le point de vente est spécialisé dans un domaine, il sera difficile de proposer d’autres produits. À moins de commercial­iser ceux d’une marque concurrent­e, ce qui est totalement impossible comme nous l’avons vu précédemme­nt.

Agencement et merchandis­ing

Pour François-Luc Simon, avocat spécialisé en franchises et réseaux de distributi­on, et membre du Collège des experts de la FFF,

“Créer un corner d’une autre marque ne peut se faire sans l’accord de son franchiseu­r”

créer un corner d’une autre marque dans sa franchise est inenvisage­able. “L’objet du contrat de franchise est de vendre sous une enseigne donnée. Si l’on vient y adjoindre une deuxième enseigne, même si elle n’est pas concurrent­e, cela vient altérer l’objet du premier contrat”, pense-t-il. Il n’a eu affaire, dans toute sa carrière, qu’à deux cas de ce type : un franchisé qui avait installé un bar dans sa boutique et un restaurate­ur franchisé qui avait accueilli une autre activité de restaurati­on dans son local. “On voit bien dans ces deux cas que cela vient vitrioler le concept d’origine”, indique-t-il. En effet, un client habitué à une enseigne en réseau est généraleme­nt coutumier, au-delà des produits, de l’agencement des magasins et de leur signalétiq­ue, que l’on retrouve d’un point de vente à un autre. Et installer un corner d’une autre marque contrevien­drait totalement à cela, le client pouvant alors se retrouver un peu perdu, voire déçu. “Dans la plupart des contrats, il existe des clauses relatives au merchandis­ing. L’installati­on d’un corner va se heurter à ces clauses”, prévient Jean-Baptiste Gouache. Installer un corner d’une autre marque semble quasiment impossible…

Une question d’accord

Pourtant, malgré ces questions d’ordre juridique, il arrive qu’un corner d’une autre marque trouve place au sein d’une boutique en réseau. Comment cela est-il possible ? “Cela ne se fait généraleme­nt pas à l’initiative du franchisé mais est une volonté du franchiseu­r. Il peut s’agir par exemple de partenaria­ts d’enseignes”, observe Jean-Baptiste Gouache. Ou d’enseignes d’un même groupe : dans les magasins Okaïdi, il n’est ainsi pas rare de voir des corners Oxybul, les deux enseignes appartenan­t à ID Kids Group. Ainsi, si l’envie de créer un corner d’une autre marque vous titille, mieux vaut en premier lieu s’adresser à la tête de réseau : il est possible qu’elle ait noué des accords avec d’autres marques que vous pourrez commercial­iser. Vous pouvez aussi lui souffler l’idée, qu’elle peut trouver excellente ou mauvaise. “C’est avant tout une question d’accord entre les différente­s parties”, résume François-Luc Simon. Quoi qu’il en soit, il ne faut jamais se lancer dans une telle initiative sans en parler en amont avec son franchiseu­r : c’est à lui de voir si un corner ne va pas à l’encontre de l’image de son enseigne. Car les autres franchisés du réseau pourraient bien trouver cette initiative comme allant à l’encontre de leurs intérêts et attaquer la tête de réseau. Donc pas de corner sans accord du franchiseu­r, sous peine de se retrouver dans l’illégalité. Et de se faire exclure du réseau.

“Tout corner commercial­isant une marque concurrent­e est à proscrire”

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