Tribune Va-t-on vers la mort du point de vente physique ? Par Pierre Creuzet, directeur et fondateur de Centre-Ville en Mouvement
Devons-nous nous alarmer devant les chiffres publiés par l’institut CSA et la Fevad ? Ils montrent nettement une augmentation des achats sur Internet (+ 7 % comparé à l’année dernière). Parmi les produits plébiscités, l’habillement, les produits culturels… Mais à ces chiffres il est intéressant d’en opposer d’autres ! Par Pierre Creuzet, directeur et fondateur de Centre-Ville en Mouvement.
Chaque année, nous réalisons avec l’institut CSA le Baromètre du Centre-Ville et des Commerces. La “morale” de cette enquête est le fort attachement des Français à leurs coeurs de villes. En 2017, ils étaient 24 % à déclarer fréquenter davantage les commerces de centre-ville (soit 4 % de plus comparé à 2016), 35 % à se rendre en coeur de ville car il fait bon y “flâner”. Et si l’alchimie des centres-villes s’opère, c’est en grande partie grâce à l’attractivité des commerces. C’est bien le traiteur local qui saura aiguiller les consommateurs sur l’association des mets, le libraire qui proposera une découverte coup de coeur, le gérant d’une boutique qui saura apporter un conseil personnalisé... Ce sont eux qui pourront finir par connaître personnellement leurs clients. Ces commerces bien spécifiques aux centres-villes ont de nombreux avantages pour tirer leur épingle du jeu.
EXPÉRIENCE CONNECTÉE
Le point de vente physique n’est pas déserté, cependant pour continuer à attiser la curiosité des consommateurs, il doit se réinventer. Le commerce en ligne sera une menace tant qu’il n’aura pas été approprié par les commerçants et transformé en atout. Aménager ses horaires d’ouverture, proposer des services connectés, décliner une offre multi-services… Le nouveau consommateur ou plus précisément le “consom’acteur” a des exigences nouvelles qu’il s’agit de comprendre. Une présence sur Internet pour n’importe quel commerce est devenue indispensable. Il faut jouer avec la complémentarité offerte par les nouvelles technologies. On ne peut pas stopper le progrès, au contraire le numérique est une bonne chose pour accélérer les échanges, proposer du choix, mais il faut alors que les commerces s’adaptent à cette nouvelle génération, aux nouvelles façons de consommer, pour faire du centre-ville une destination car le commerce ne pourra n’être qu’un commerce de proximité. Vitrine interactive, miroir connecté ou encore la révolution du paiement sans contact, c’est désormais avant tout une expérience connectée qui est souhaitée par le client. De nouveaux types de commerces émergents peuvent également répondre à la demande. En offrant plusieurs services, ils répondent aux différents besoins des clients : comme cette pâtisserie-verrerie à Metz, les librairies-salon de thé, ou encore les services de relooking personnalisés dans les boutiques de prêt-à-porter.
MAINTENIR L'ATTRACTIVITÉ
Les managers de centre-ville ou développeurs d’enseignes ont un rôle à jouer dans la métamorphose et l’attractivité des commerces dans les centres-villes. Nous venons d'ailleurs de lancer l’Observatoire de Gestion de Centre-Ville, notre 4e Observatoire national. Il fait suite à 10 ans d'actions et de réflexions avec la Délégation au Management de Centre-Ville portée par notre association. Il viendra se nourrir de la multitude d’informations des 3 autres observatoires nationaux créés en 2015 : commerce et artisanat, mobilité et énergie, environnement et vie urbaine. Il va permettre d’accompagner les professionnels du centre-ville avec des données concrètes et innovantes (études, expérimentations, outils juridiques…) afin de pouvoir oeuvrer en faveur du renouveau des centres-villes, et notamment d’accompagner les commerçants. Nous sommes, par ailleurs, en discussion avec plusieurs universités pour créer à la rentrée prochaine un diplôme de manager ou développeur de centre-ville. Après un an de spécialisation sur ce métier, les développeurs se retrouvent ainsi qualifiés pour être capables de traiter des sujets relevant à la fois de l’urbanisme et de l’aménagement, du commerce et du marketing territorial.