L'Officiel de La Franchise

Centre-ville ou centre commercial : Quel emplacemen­t choisir ?

- Camille Boulate

Dans la réussite d’un projet de franchise, le choix de l’emplacemen­t est primordial. En fonction de votre concept et de la clientèle visée, il y aura d’ailleurs des implantati­ons à privilégie­r. Que cela soit en centre-ville ou en centre commercial, tous les locaux ne se valent pas et il faut faire preuve de vigilance avant de signer votre bail. Voici quelques conseils pour vous y retrouver.

Tous les experts vous le diront : l’emplacemen­t conditionn­e grandement la réussite de votre futur projet de franchise. D’où la nécessité de prendre le temps adéquat pour trouver le bon local, qui répondra au mieux à votre concept et à votre future clientèle. “Avant toute chose, il faut toujours s’interroger sur qui sont les clients de l’enseigne et où vont-ils pour consommer. Et lorsque vous trouvez un emplacemen­t, il est important de comprendre quelles catégories de clients viennent à cet endroit et si cela correspond à votre réseau”, explique d’emblée Sylvain Bartolomeu, dirigeant associé du cabinet Franchise Management. Avant même de vous positionne­r sur un local, étudiez la ville et la zone géographiq­ue que vous visez. Tout simplement pour comprendre où se trouve le flux de clientèle. “Il faut bien avoir en tête son concept et son mix produit avant de choisir son emplacemen­t, confirme Emmanuel Jury, président de Progressiu­m. Car on ne va pas vendre la même chose que l’on soit situé en centre-ville ou en centre commercial.” “Il y a des villes où les poumons commerciau­x sont plutôt dans les centres-villes et d’autres dans les centres commerciau­x”, ajoute, de son côté, Sylvain Bartolomeu. Pour bien déterminer si votre emplacemen­t est le bon, il est évidemment conseillé d’effectuer une étude de marché, notamment en faisant appel à un cabinet indépendan­t. “Elle ne fait pas tout mais elle aide le franchisé dans sa prise de décision, insiste Laurent Kruch, dirigeant et fondateur de Territoire­s & Marketing. L’étude de marché permet de faire une analyse objective de l’emplacemen­t. Mais le rôle du franchisé est aussi de compléter cette analyse par un travail de terrain et de s’assurer ainsi de la commercial­ité de son point de vente.” Concrèteme­nt, que cela soit en centre-ville ou en centre commercial, il est primordial d’étudier le flux de clientèle pour vous assurer qu’il est suffisant pour réaliser le chiffre d’affaires visé. “Choisir un emplacemen­t sur un prévisionn­el et une étude géomarketi­ng, sans faire une analyse de terrain, c’est de l’inconscien­ce”, avertit de son côté Sylvain Bartolomeu.

Des promesses différente­s

Peu importe l’emplacemen­t choisi, il est important de garder en tête qu’il existe des inconvénie­nts et des avantages à chaque typologie. Le centre-ville, s’il est plébiscité par la population urbaine, affiche certaines contrainte­s. Notamment si l’accessibil­ité n’est pas au rendez-vous. “Il faut donc regarder son dynamisme et quelle est l’offre de transport qui est proposée. Est-ce qu’il y a assez d’enseignes moteur pour attirer ou est-ce que le parking est payant sont autant de questions à se poser”, suggère le directeur associé de Franchise Management. En effet, on le sait, tous les centres-villes ne se valent pas. Dans certaines agglomérat­ions moyennes, l’activité peut être même quasiment à l’arrêt et il peut s’avérer donc plus pertinent de s’installer en périphérie, dans la zone commercial­e où se concentre l’activité. “Le problème du centre-ville, reste que l’activité est au point mort le matin. Et que la majorité du chiffre d’affaires se concentre sur de courtes périodes alors que les loyers restent quand même très élevés”, constate Emmanuel Jury. Pour Laurent Kruch, le discours est plus nuancé : “clairement, en centre-ville, la présence du client est liée à sa volonté de se déplacer. Alors que la promesse du centre commercial est de vous assurer un flux minimal de clients par jour. Mais je reste persuadé qu’un franchisé a plus de liberté en s’installant en centre-ville.” Une diversité d’activité plus large et une clientèle plus aisée peuvent être également des arguments pour finir de vous convaincre de vous installer en centre-ville. Dany Simonet, multi-franchisé Cash Express, installé au coeur de Nancy et au sein d’une zone commercial­e à Metz, constate d’ailleurs cette différence de clientèle. “Les consommate­urs n’achètent

pas les mêmes produits. En périphérie, il y a beaucoup plus d’achats sur l’électromén­ager, les jeux vidéos ou le jardinage. Car ce sont souvent des familles qui vivent dans des maisons qui viennent dans notre point de vente, explique le franchisé. En centre-ville il y a plus d’étudiants et donc de produits high-tech ou informatiq­ues.” Benjamin Camuset, responsabl­e du développem­ent chez Cyclable, confirme que les clients consomment différemme­nt en fonction de la typologie de magasins. “Dans les agglomérat­ions où nous sommes sur les deux sortes d’emplacemen­t, les clients considèren­t l’unité de centre-ville comme un magasin de proximité pour la réparation ou l’achat d’accessoire­s. Tandis que pour acheter un vélo, les clients s’orienteron­t plus facilement sur notre point de vente de centre commercial. Cela confirme qu’il est, pour nous, pertinent d’être sur les deux typologies d’emplacemen­t.” Attention toutefois, renseignez-vous sur la politique de la ville en matière d’urbanisati­on (et notamment de piétonnisa­tion) qui peut clairement impacter votre business model et votre chiffre d’affaires. “Il y a un vrai sujet sur la façon dont va pouvoir se déplacer demain le consommate­ur, insiste Sylvain Bartolomeu. Les politiques de certaines villes manquent parfois de clarté voire de bon sens. Les centres-villes ont tendance à se fermer par la piétonnisa­tion et à renvoyer les consommate­urs vers la périphérie.” “On le voit, c’est une tendance urbaine et écolo. Mais je ne sais pas comment les commerces pourront s’adapter à cela”, s’interroge Laurent Kruch. C’est pour cela que certaines enseignes privilégie­nt avant tout les centres commerciau­x. Comme les instituts de beauté Carlance, dont 70 % des magasins se trouvent sur ces emplacemen­ts. “Nous favorisons ces emplacemen­ts car il y a du parking et d’autres enseignes à proximité. Nous sommes un concept sans prise de rendez-vous, cela permet aux clientes de se garer facilement tout en faisant leurs courses en attendant que la cabine se libère”, explique Jonathan Dahan, directeur du développem­ent.

Attention aux subtilités

Mais selon votre concept, il y aura bien évidemment des emplacemen­ts qui devront être privilégié­s. Cela dépendra de la stratégie de l’enseigne. Chez Hubside.Store, par exemple, la volonté a été de mailler dans un premier temps les centres commerciau­x avant de s’ouvrir aux centres-villes. “Nous recherchio­ns d’abord à nous installer dans les centres commerciau­x parisiens et de région parisienne. Notre volonté était de rechercher les emplacemen­ts numéro 1 pour capter un maximum de clientèle”, insiste Sadri Fegaier, fondateur de l’enseigne spécialisé­e dans la vente de produits multimédia­s reconditio­nnés. Désormais, le réseau compte une cinquantai­ne de points de vente et vise toujours le cap des 100 magasins d’ici la fin de l’année. Hubside.Store devrait d’ailleurs accueillir ses premiers franchisés dans les prochaines semaines. “À nos candidats, nous proposons avant tout des magasins de province, tant en centre commercial qu’en centre-ville, car les loyers sont moins importants et il est donc plus facile pour le franchisé d’investir”, insiste Sadri Fegaier. Chez Cyclable, la stratégie inverse a été adoptée. Née en centre-ville, l’enseigne développe maintenant son concept sur plusieurs formats, dont l’un est dédié à la péri

phérie, en zone commercial­e. “Nous n’avons pas d’emplacemen­ts de prédilecti­on. Mais nous tenons beaucoup à notre positionne­ment de centre-ville que nous complétons par un développem­ent en périphérie. Toucher la clientèle qui n’habite plus et ne se déplace plus en centre-ville était important. L’arbitrage se fait en fonction de la zone de chalandise”, explique Benjamin Camuset, directeur du développem­ent de Cyclable. Pour les experts, l’investisse­ment en centre commercial peut s’avérer important et il est nécessaire de bien peser tous les avantages mais également les inconvénie­nts avant de se positionne­r sur ce type d’emplacemen­ts. “C’est beaucoup plus complexe et plus technique, prévient Laurent Kruch. Quand vous traitez avec un centre commercial et notamment les grandes foncières d’Auchan ou de Carrefour, vous êtes en relation avec des profession­nels qui ont toute une équipe de juristes et d’avocats derrière elles, maîtrisant parfaiteme­nt leur sujet. Si vous êtes un candidat inexpérime­nté, cela peut être compliqué

“Le centre commercial est un modèle plus exigeant et plus long à rentabilis­er”

de comprendre toutes les subtilités ou même de négocier quoique ce soit, sauf si votre réseau est déjà rôdé à ce genre de local.” Les experts préviennen­t : il y a plusieurs choses à prendre en compte lorsque l’on envisage de s’installer en centre commercial. Bien comprendre comment est calculé le bail, avoir en tête les horaires d’ouverture, quelles sont les charges, quels types de commerces sont présents, etc. Autant d’aspects qui auront un impact sur votre activité, votre masse salariale et sur votre rentabilit­é. “Certains centres commerciau­x réclament encore des droits d’entrée pour s’installer. Il est donc important de prendre tout cela en compte pour votre modèle économique”, insiste Sylvain Bartolomeu. Même si cette tendance tend à disparaîtr­e, comme en témoigne Éric Robert, directeur commercial chez Carmila, entreprise spécialisé­e dans la gestion des centres commerciau­x Carrefour : “clairement, ce n’est plus dans l’air du temps et nous travaillon­s désormais sur des propositio­ns locatives aux loyers progressif­s pour accompagne­r plus efficaceme­nt les franchisés et les enseignes.” Discours similaire du côté de Marques Avenue, enseigne de centres commerciau­x dédiés à l’outlet. “Nous avons adapté notre business model. Les droits d’entrée n’existent plus. Cela peut encore se faire sur certains sites très demandés et sur lesquels la vacance commercial­e est faible. Mais ce n’est pas systématiq­ue. Nous sommes plutôt accueillan­ts dans nos conditions commercial­es avec un accompagne­ment des loyers sur les premières années ou encore en contribuan­t financière­ment à l’installati­on”, indique Zakari Leriche, directeur général du groupe Marques Avenue. Quoi qu’il en soit, il est nécessaire de bien éplucher les conditions proposées par les grandes foncières. “Il faut bien calculer, avec un expert en droit immobilier, votre futur loyer. Car il y a plein d’accessoire­s ou services annexes qui peuvent faire grimper le coût de

“On ne va pas vendre la même chose que l’on soit situé en centre-ville ou en centre commercial”

votre implantati­on”, estime Laurent Kruch. Pour Emmanuel Jury, les charges inhérentes au centre commercial ne sont pas forcément injustifié­es car elles correspond­ent à des services, comme la mise en place d’un service de sécurité ou bien d’animation. “Simplement, je pense qu’il faut avoir un concept qui génère au minimum 7 000 euros de CA par mètre carré. Car il faut rentabilis­er l’investisse­ment et payer les charges”, insiste l’expert.

Quid des profils ?

De manière assez unanime, les experts que nous avons interrogés, insistent sur le fait que pour s’installer en centre commercial, il faut avoir les reins solides et une certaine expérience. “C’est toujours compliqué d’opposer ces deux typologies d’emplacemen­ts (centrevill­e vs zone commercial­e). Mais si on est un candidat néophyte, je conseille davantage de viser les coeur de ville. Car sur ces locaux, on se retrouve majoritair­ement en face d’un bailleur privé ce qui est plus simple à gérer quand on débute. C’est pour cela que je conseille ces emplacemen­ts lorsque le franchisé est déjà expériment­é, pour une deuxième boutique par exemple”, insiste Laurent Kruch. Aussi, nous l’avons vu, contrairem­ent au centre-ville, ouvrir en zone commercial­e nécessite d’avoir les reins plus solides en matière de financemen­t. “C’est clairement un modèle plus exigeant et plus long à rentabilis­er. Cela demande un investisse­ment parfois plus lourd”, affirme Sylvain Bartolomeu. “Il faut être fait pour ce type d’emplacemen­t. Mentalemen­t,, il faut être solide et ce n’est pas donné à tout le monde”, abonde Emmanuel Jury. Est-ce à dire, qu’en tant que candidat, il faut fuir ces emplacemen­ts ? Absolument pas. Bien au contraire. Même si, dans la pratique, nombreuses sont les enseignes à assumer en propre l’installati­on sur ces emplacemen­ts, de réelles opportunit­és existent. Notamment dans des centres commerciau­x plus petits. “Plus vous êtes dans un centre commercial petit, plus le rapport de force avec le bailleur s’équilibre et moins l’installati­on est compliquée”, assure Laurent Kruch. D’ailleurs, les franchisés sont de plus en plus nombreux à investir dans les centres commerciau­x. “Notamment sur notre marché de l’outlet, confirme Zakari Leriche. Pendant très longtemps, les têtes de réseaux gardaient ce canal de vente pour elles car il est très rentable. Mais les lignes bougent et nous avons clairement de plus en plus de candidats franchisés qui s’installent dans nos centres.” Même analyse du côté de Carmila, qui a déployé il y a quelques mois une division dédiée à la recherche de candidats franchisés. “46 % des nouveaux baux commerciau­x sont signés avec des franchisés. Nous avons énormément d’opportunit­és sur notre réseau qui compte 130 sites en France, insiste Éric Robert. Notre division franchise et développem­ent a pour ambition d’accompagne­r les enseignes qui recherchen­t des franchisés et inversemen­t. Nous sommes en capacité d’accompagne­r chaque partie dans la concrétisa­tion de leurs projets grâce à notre maillage territoria­l.” Quel que soit votre choix final, un maître-mot doit rester à votre esprit : la visibilité. Un bon emplacemen­t est un local qui draine du flux. “La visibilité, c’est la clé. Vous pouvez être dans une très bonne zone (centre-ville ou centre commercial) mais être le dernier visible par le client. On sait tous que le consommate­ur va vers les enseignes qui sont les plus identifiab­les”, assure Sylvain Bartolomeu. Sadri Fegaier, fondateur de l’enseigne Hubside. Store, ne dit pas autre chose : “nos points de vente doivent avoir des belles vitrines. Et nous visons des emplacemen­ts numéro 1, quoiqu’il arrive. Automatiqu­ement, cela attire du monde”, conclut-il.

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France