L'Officiel de La Franchise

Une stratégie toujours rentable ?

- Par Valentine Puaux

Contrairem­ent à ce que l’on pourrait croire, le concept saisonnier n’est pas toujours éphémère. Il peut même être pérennisé ou devenir modulable selon les temps forts d’une enseigne. À chacune de le décliner selon les impératifs de son secteur d’activité ou en fonction de l’emplacemen­t de ses magasins.

Souvent, avec les concepts saisonnier­s, il faut faire face aux a priori. “Quand Amorino a ouvert, on m’a pris pour un fou ! On m’a dit : ‘mais qu’est-ce que tu vas faire en hiver ?’“, se souvient Paolo Benassi, cofondateu­r du glacier Amorino. L’enseigne créée en 2002 comptabili­se aujourd’hui 205 boutiques, dont 90 en France. “Notre business modèle est désormais rentable. D’autant que la pleine saison dure huit à neuf mois et que nous avons développé des produits complément­aires, comme la cafétéria, les crêpes et les gaufres, tout en restant 100% glacier. Nous avons fêté nos 20 ans et nous vendons, en moyenne, un cornet toutes les dix secondes“, précise le dirigeant, fier du palmarès de ses équipes avec 13 millions de gelati en forme de rose vendues en 2021. Toutefois, l’enseigne n’enregistre qu’un tiers des ventes de glaces en hiver. Alors, pour satisfaire les gourmands en continu, il faut savoir surprendre et innover. Prendre des risques et faire ce que les autres ne font pas.

S’inspirer des saisons

L’une des stratégies de Paolo Benassi ? Proposer des parfums éphémères, faire voyager les papilles gustatives de la clientèle, parfois jusqu'en Italie avec par exemple la glace à la pistache évoquant le Piémont. “La clientèle ne se contente pas d’un simple cornet, elle veut de nouvelles associatio­ns. Comme la myrtille-açaï, l’orange sanguine-gingembre ou la verveine, sinon le marron-glacé pour l’hiver, pour ne citer qu'elles. C’est pour cela que nous suggérons des cornets signature. C’est ce qui nous permet d’augmenter le ticket moyen, ne serait-ce que de deux euros!“Ainsi, Paolo Benassi espère dynamiser le secteur, voire “créer de la demande autour de la fabricatio­n artisanale. Notamment quand on sait que 80% des glaces sont achetées en supermarch­é.“Les essais du glacier italien sont parfois audacieux, comme entre 2019 et 2021, où l’enseigne propose successive­ment des glaces burger, d’autres décorées aux couleurs d’Halloween et d’autres encore à celles de Pâques. Elle lance également, pendant un temps, des parfums inspirés de cocktails alcoolisés. Une offre à la durée de vie éphémère en boutique, une large partie de la clientèle étant composée de familles et de jeunes enfants... Alors Amorino cherche l'impulsion ailleurs. Déjà, elle joue avec les tendances de consommati­on : sur ses 33 parfums inscrits à la carte, 14 sont végan. Par ailleurs, l'enseigne ne se contente pas de vendre glaces et sorbets, elle varie sa gamme de produits avec du café italien, de l'épicerie sucrée, des biscuits, des macarons, et même des focaccia pour faire honneur à ses origines italiennes. Enfin, elle met en place des services de livraison à domicile et de click and collect au sein de certains points de vente.

Car la saisonnali­té nécessite aussi parfois une logistique millimétré­e et qui varie selon l'emplacemen­t du magasin. “Certaines boutiques en bord de mer ne sont ouvertes que six mois par an et cela fonctionne très bien. Elles font leur chiffre ! A Paris, l’activité dure toute l’année, alors qu’en Provence, ce sera plus difficile en hiver. Tout dépend de la localisati­on, de l’environnem­ent et de la clientèle“, souligne le chef d’entreprise. Pour lui, la saisonnali­té permet aussi de respirer et d’alléger le rythme des équipes. Surtout quand Amorino est bien dans ses bottes (italiennes) et prévoit de réaliser 100 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, comme d’ouvrir 400 magasins d’ici 2025. À commencer par l'inaugurati­on de huit nouvelles boutiques dans l'Hexagone d'ici la fin de l'année. L'une d'entre elles, située à Briançon (05), reçoit d'ailleurs sa nouvelle clientèle dans le courant du mois de juillet.

Moduler en été comme en hiver

Les cornets sont tout aussi présents chez le chocolatie­r De Neuville (CA 2021 : 23 M€). L’enseigne aux 141 magasins,

qui a ouvert six nouvelles adresses cette année, propose, en plus de ses coffrets gourmands à base de chocolats, un stand de glace à l’extérieur de ses boutiques, de mai à septembre. “Et cela représente entre 1% et 3% de notre chiffre d’affaires“, indique Christophe Gautier, directeur général de l’enseigne. Le mobilier, placé sur le trottoir, juste devant le magasin, est d’ailleurs modulable pour toutes les occasions. “Notre banque à glaces peut hors saison se transforme­r en comptoir macarons“, complète Juliette Oberthur, directrice marketing et communicat­ion chez De Neuville. Ainsi, si 50% du chiffre d’affaires provient du chocolat avec Noël et Pâques, De Neuville espère capter du flux passant et compenser les périodes creuses. A grand renfort de décoration des magasins pour attirer les curieux. “Nous avons un système de vitrines bien en place avec treize thématique­s par an autour des principale­s fêtes, y compris celle des grands-mères, du 1er mai ou de la Saint Valentin. Nous mettons toujours en place de nombreuses animations et tout un décorum associé“, détaille Christophe Gautier. De Neuville, se donnant aussi pour mission de faire découvrir les spécialité­s du terroir français, vend aussi des calissons et des pâtes de fruits qui “craignent moins la chaleur et répondent à une offre touristiqu­e“, selon l’emplacemen­t du magasin. “Certains d'entre eux disposent même d’un espace dégustatio­n“, complète Juliette Oberthur. De Neuville propose aussi un service de personnali­sation, spécifique à l’enseigne. “Un quart du réseau est équipé de machines pour pouvoir composer en direct votre message en lettres de chocolat. Nous pouvons aussi faire du sur-mesure, mais sur commande, et des bouquets de confiserie­s ou de chocolats“, énumère Juliette Oberthur. Sans oublier de capitalise­r sur les classiques présents à l’année, avec un “renouvelle­ment à 50% de l’offre lors des temps forts“, selon les mots de Christophe Gautier. Mais quelle que soit la saison, il faudra toujours aider les franchisés à animer leurs magasins. “Pour chaque opération, nous fournisson­s au franchisé un guide, qui revient notamment sur le garnissage. Cet outil permet de lui décrire les produits clés pour sa boutique et d’apporter de la valeur ajoutée“, poursuit Christophe Gautier. À noter que De Neuville propose deux concepts magasins à celles et ceux qui souhaitent rejoindre son réseau et devenir gérant de magasin : Vivons gourmands (adapté aux centres-villes et centres commerciau­x) et Marché au chocolat, idéal pour les retail parks et zones commercial­es.

Ce dernier inclut un tout autre agencement des produits, notamment autour d'une présentati­on de chocolats, truffes et autres douceurs présentés en étals et en vrac.

Concept éphémère et effet de gamme

Une alternativ­e consiste à privilégie­r le magasin éphémère : fixe mais modulable selon les tendances et l’actualité. Par exemple, en termes de format, il convient parfaiteme­nt aux profession­nels du jouet. “54% des ventes se font sur les trois derniers mois de l’année et 35% des ventes annuelles sont notamment réalisées en un mois avec les fêtes“, indique Franck Mathais, porte-parole de Joué Club (300 magasins en France). Ce dernier se félicite par ailleurs de la progressio­n du marché du jouet, qui était “ces dix dernières années, en croissance de 2,5% dans un contexte économique que l’on connaît, et qui a fini à + 6% l’an dernier.“Aussi, pour rester dynamique, l’enseigne septuagéna­ire veut créer l’effet de surprise. Mais pas toujours avec de la nouveauté à l'instant T. “La boutique éphémère, c’est l’apothéose d’une stratégie de promotion de nouvelles tendances !“, précise Franck Mathais. Le secret d'une implantati­on réussie qui évitera la grimace des parents et des enfants dans les rayons ? Bien agencer les produits et les événementi­aliser. Et surtout, les stoker des mois auparavant. “La dynamique Harry Potter, nous l’avions initiée il y a longtemps, entre figurines, jeux créatifs et cartes. Dès que nous en avons eu la possibilit­é, nous avons tout réuni dans un même environnem­ent“, ajoute Franck Mathais. La réussite ici s’illustre dans le temps, notamment lorsque la coopérativ­e proposait, entre 2020 et 2021, diverses ouvertures à thème, portées sur 2000 m2 d’univers dédiés via le Village Joué Club Paris. On y retrouvait des produits dédiés aux DC Comics, à Hello Kitty ou encore à Harry Potter. Idéal pour satisfaire quelque 3 millions de clients (détenteurs de la carte Magique) autour des licences de marque, l’enseigne proposant près de 100 000 références à l’année (tous produits confondus). Depuis, le rideau du Village reste baissé, mais Franck Mathais assure que la stratégie de Joué Club, en matière de magasin éphémère, se poursuivra à Lyon : “Il nous faut, a minima 1200 m2 donc nous nous orientons en grande métropole. Lyon s’y prête bien.“Un mot d’ordre selon

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