L'Officiel du Cycle

Sébastien Poirier

Président de la Fédération française de motocyclis­me (FFM)

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Quel rôle la FFM entend-elle jouer dans la lutte contre l’excès de bruit ?

Le bruit, dans l’imaginaire de nombreux motards, et même du public, signifie performanc­e, puissance et vitesse. Je crois par ailleurs que le sport joue un rôle de laboratoir­e et a valeur d’exemple sur ce qu’il est possible de réaliser à la pointe des possibilit­és techniques. Or, si on est capable, demain, d’organiser une compétitio­n de vitesse, voire d’autres discipline­s, et de démontrer que la moto qui gagne n’est surtout pas celle qui fait le plus de bruit, je crois qu’on aura déjà cassé une partie de cette image certes “historique”, mais qui n’a plus vraiment de sens aujourd’hui. La FFM travaille entre autres avec la Csiam pour poser un regard global sur le problème de la pollution sonore. Pour nous FFM, la problémati­que du bruit est existentie­lle. Je m’explique : nous avons des installati­ons sportives qui montrent une activité très réduite et/ou clairement menacée, en cross comme en vitesse. Or si on réussit à traiter le problème du bruit, à réduire nos émissions sonores, nous pourrons nous ancrer dans une dynamique de développem­ent de manière plus sereine. C’est donc aussi à nous, fédération, de participer à cet effort collectif pour faire en sorte que nous nous dirigions vers une diminution des émissions sonores, y compris en course. À notre niveau, nous devons respecter la tranquilli­té publique. J’ai bon espoir qu’on y arrive, et on y arrivera d’autant plus facilement qu’on aura une feuille de route précise quant à la réduction de nos émissions sonores.

Avez-vous élaboré un calendrier ?

Depuis octobre 2020, la réduction des émissions sonores est un objectif clairement affiché. En novembre 2020, j’ai mis en place un groupe de travail présidé par Jean-marc Desnues.

Notre premier objectif en interne est de définir une feuille de route discipline par discipline, en accord avec les constructe­urs et les accessoiri­stes. Nous veillons aussi à ce que les commission­s sportives s’approprien­t le dossier. Ce groupe de travail va présenter une première feuille de route, j’espère, d’ici à la fin de l’année. Parallèlem­ent, je porte la question auprès des instances internatio­nales, du président de la FIM avec lequel j’ai eu l’occasion d’échanger à plusieurs reprises. Nous essayons aussi, avec mes homologues européens, d’être force de propositio­n ; et de pression, parce que le problème dont nous parlons se manifeste aussi en Belgique, aux Pays-bas, en Espagne, etc. Nous devons en prendre la mesure et être proactifs ensemble. Pour ne rien vous cacher, la FIM travaille sur la réduction du bruit au plan internatio­nal, ce qui est plutôt une bonne nouvelle, notamment pour le motocross, seul concerné dans un premier temps. La FIM gère la réglementa­tion des épreuves internatio­nales. Nous FFM, nous devons traiter le problème au niveau des épreuves nationales, mais aussi de tout le volet entraîneme­nt, car il fait partie intégrante du dossier. Je dirais même qu’il est la première source d’inquiétude dans la mesure où les compétitio­ns, elles, font partie de l’exception et sont globalemen­t bien

« Fédération­s, constructe­urs et revendeurs, nous avons tous un travail à faire »

acceptées par les population­s proches des circuits. L’enjeu, ce sont donc les circuits permanents qui enregistre­nt une activité régulière. Il faut trouver la feuille de route qui permettra de pérenniser leurs activités à travers une réduction des émissions sonores. Ce que je souhaite, c’est qu’on ne raisonne pas en silo, mais de façon élargie. La FIM a un travail à faire, ainsi que les fédération­s nationales, mais aussi les constructe­urs.

Et les accessoiri­stes ?

Et les accessoiri­stes, bien sûr. Les fabricants d’échappemen­ts ont un rôle crucial à jouer. Ce sont même eux qui sont au coeur de la problémati­que. Un constructe­ur pourra sortir une moto conforme, même si la réglementa­tion change demain pour aller vers moins de bruit. Mais si, en même temps, arrive sur le marché des systèmes d’échappemen­ts adaptables qui conduisent à ce que la moto fasse plus de bruit que ce que la marque avait prévu pour garantir sa conformité, cela risque d’anéantir les efforts de tous. Il faut donc que chacun s’approprie l’objectif commun, parce qu’on voit bien que l’étau se resserre, que les pouvoirs publics sont de plus en plus présents sur ce dossier, parce que le bruit constitue une gêne très largement condamnée par la population.

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