L'officiel Hommes

IGLOOGHOST, L’ABUS DE MUSIQUE EST BON POUR LA SANTÉ

- https://iglooghost.bandcamp.com/

L’officiel Hommes: Quels sont vos premiers souvenirs musicaux ?

Iglooghost : Des bips et des sons à peine discernabl­es, dans des chansons entendues à la dérobée quand j’étais tout petit. J’en garde un souvenir ému, et je discerne aujourd’hui des analogies tonales avec ce que je fais – même si c’est des trucs un peu foireux que j’aimais alors, comme Linkin Park.

D’où viennent vos chansons ?

Je pense davantage en termes d’album. Tout ce que je finis doit trouver sa place dans un certain univers. Je travaille en suivant une ligne directrice, qui réunit les chansons. J’aime construire un genre d’arc narratif, en modulant les couleurs, comme s’il s’agissait de briques de Lego.

Quel élément déclenche l’écriture? Un beat, une mélodie, une pure projection mentale?

Je m’assois sur une chaise guidé par un mélange déroutant d’inspiratio­n et de panique.

Faire de la musique est magique, mais je ne serais pas honnête si je n’ajoutais pas que 50 % de l’inspiratio­n vient du désir de ne pas me sentir comme un loser absolu. C’est ce sentiment un peu écoeurant qui m’a fait découvrir des sources secrètes et des puits fantastiqu­es…

Qui sont vos modèles?

Plus jeune, je rêvais de prendre leur place. Je me demandais quelle sensation cela me procurerai­t.

Cela me paraît aujourd’hui moins essentiel. J’espère plutôt que lorsque j’aurai 50 ans, je serai toujours en mesure de me surprendre. Je trouve incroyable que certains vieux maîtres de leur art aient toujours les yeux pétillants et enfantins. Si vous arrivez, ne serait-ce qu’après dix ans de carrière, à conserver une production décente et ne pas être blasé, chapeau !

Préférez-vous que les gens rêvassent ou dansent en vous écoutant?

Les deux approches donnent à mon cerveau un grand sourire plein de dents !

Rêvez-vous de musique ?

Plein de chansons me viennent dans les aéroports, les trains, dans un état de demiconsci­ence… Je n’ai jamais été foutu de les retranscri­re fidèlement sur un ordinateur. C’est arrivé une seule fois, pour la chanson Amu’s Hoop.

Quelles chansons auriez-vous aimé avoir écrites ?

Celles produites par mon cerveau que mes mains refusent de reproduire. J’espère y arriver un jour.

Qu’écoutez-vous ces jours-ci?

Je n’écoute plus de musique électroniq­ue depuis deux ans, de peur de plagier des producteur­s super talentueux. De la musique chorale, primitive. L’écrivaine Ursula Le Guin a publié un album très étrange, Music & Poetry of the Kesh, du folk spéculatif…

Quel adjectif aimez-vous voir associé à votre musique ?

Puissante. Accrocheus­e. J’espère que pour chaque séance de “binging” nocturne sur Youtube que je rends émotionnel­lement significat­ive, je donne aussi envie aux auditeurs de prendre un marteau et de défoncer leur ordinateur.

Quel est votre son préféré et celui que vous détestez ?

J’adore celui des choses rayées, ou écrasées, qui n’existeraie­nt pas dans la réalité. Et je déteste tous ceux dont je me suis trop servi.

Quelles autres formes d’art vous inspirent?

Certaines peintures murales préhistori­ques. Des silhouette­s en bâtons s’attaquant à des bisons… C’est fou.

Les réseaux sociaux ont certes permis l’émergence d’artistes, mais ils rendent aussi plus difficile de se distinguer, tant l’offre est désormais illimitée. Est-ce que ce contexte rend plus excitante la création?

Je n’en sais rien. C’est tout ce que j’ai connu. Je ne peux que me baser sur les anecdotes invérifiab­les racontées par des vieux cons – mais qui veut se fier à un boomer qui avait assez d’argent pour se payer un clavier Fairlight CMI? Je veux juste faire de la musique pour ne pas faner. Cette histoire de contexte est tout en bas de la liste de ce qui me préoccupe.

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