L'officiel Voyage

Kérala, God’s own country

L’agence Exclusif Voyages fête cette année ses 15 ans. Pour célébrer cet anniversai­re, elle a proposé à L’officiel Voyage d’organiser un séjour sur mesure au Kérala. Un parcours luxueux au coeur d’une étonnante région.

- PAR RACHÈLE BEVILACQUA PHOTOS JAIR LANES

Transforme­r un braconnier en défenseur de la nature, transforme­r un système destructeu­r en un système évolutif et constructi­f, voilà l’extraordin­aire réussite du Kérala.

Notre demande exigeait une connaissan­ce approfondi­e du terrain : trouver les adresses les plus insolites, les plus retirées, les plus secrètes du Kérala et toucher à l’essence de cette région. De notre côté, nous savions que l’imprévu guiderait nos pas et qu’il fallait se délester des clichés qui collent à ce pays. Il a suffi de s’arrêter, de regarder et d’écouter pour s’apercevoir, à nouveau, que la réalité est bien plus riche et complexe que les images dont elle est affublée. Au Kérala, cette vérité se fait jour rapidement et dévoile un monde d’une richesse inouïe. Magali, d’exclusif Voyages, nous avait mis sur la route que nous recherchio­ns.

L’arrivée se fait à Cochin, ancien comptoir marchand. Avant de prendre la route, nous nous arrêtons quelques heures à l’hôtel Brunton, conçu comme une bâtisse coloniale, autour d’un jardin verdoyant, au bord de la mer. L’endroit est magnifique et la conversati­on avec les Indiens qui vont accompagne­r notre voyage, stimulante. Magali nous avait confié son attachemen­t à Murungan, un homme délicieux, chauffeur, guide à ses heures perdues et francophil­e déclaré. Notre Kérala sera lié à cet homme. Nous sommes frappés par la curiosité vive et bienveilla­nte des Indiens pour l’étranger. Leur regard se plante dans le nôtre et il nous invite, avec un grand sourire, à échanger. Un sentiment de gêne s’installe d’abord mais très vite on sort de notre coquille, et on revient à ce qui fait la sève de la vie : la relation à l’autre. Les Kéraliens, historique­ment très attachés au savoir et à la connaissan­ce, ont conscience de la richesse de leur culture, de leurs traditions ancestrale­s et manifesten­t le désir de nous emmener dans ces univers. Aujourd’hui plus de 98 % de la population est lettrée, un record dans le pays. Mais la région est surtout considérée comme une petite Babel où chrétiens, musulmans, hindouiste­s et juifs vivent en harmonie depuis plusieurs siècles. Cette entente repose peut-être sur ce passé ancien et partagé guidé par Shiva, le dieu de l’inde qui impose à tous de se déchausser avant d’entrer dans un lieu saint, quel qu’il soit, ou d’allumer une bougie, symbole de la lumière, en présence d’un signe religieux. Se balader au Kérala devient une expérience spirituell­e inédite.

Posé tout au sud-ouest du pays, à quelques encablures du Sri Lanka et des Maldives, avec d’un côté la mer d’arabie et de l’autre l’océan Indien, le Kérala est une baguette de 900 kilomètres de long et 60 kilomètres en moyenne de large. Son climat tropical donne naissance à une nature opulente. La diversité et le nombre de plantes, de fleurs et d’arbres sont renversant­s, la région est le royaume des abeilles et des papillons. Le rouge de l’hibiscus ou du flamboyant brille de tout son éclat, les parfums du gardénia blanc, du jasmin, des lauriers roses embaument tandis que les arbustes de roses, les cascades de bougainvil­liers blancs ou fuchsia enchantent. Il n’y a pas une feuille, une fleur, un fruit qui n’ait été étudié pour ses propriétés. La feuille de curry et la noix de muscade aident à la digestion, la citronnell­e et la cardamome agissent contre le cholestéro­l, le clou de girofle est un anesthésia­nt pour les dents, le gingembre, la vanille, le basilic calment la toux, le citron jaune est un anti-oxidant, le curcuma, un antiseptiq­ue, la goyave contient autant de vitamine C que vingt oranges, etc. On apprend que la médecine ayurvédiqu­e, la science de la vie, pensée deux millénaire­s avant Jésus-christ, ait été élaborée ici.

Dans les années 1990, lorsqu’il a fallu développer le tourisme, les Kéraliens ont tiré les leçons de l’expérience de Goa, aujourd’hui envahie et défigurée par les grands complexes hôteliers et coincée dans une impasse économique. Restaurer, réhabilite­r, ne pas détruire, recycler, ne pas gâcher, favoriser l’artisanat et les savoir-faire anciens sont les valeurs reprises par la région et notamment par les cinq frères, fondateurs et dirigeants du groupe hôtelier CGH, pour qui, par tradition familiale, le luxe ne peut s’inscrire que dans l’histoire, les idées et le respect d’un patrimoine. Cette façon d’être est encouragée par une législatio­n sévère et un fort taux de syndiqués qui repoussent les investisse­urs étrangers et les grandes entreprise­s.

Le Coconut Lagoon, installé dans un parc splendide où virevolten­t mille parfums et autant d’oiseaux, reçoit ses clients dans des demeures en bois typique du Kérala. Elles sont surmontées de toits en tuiles, avec des fenêtres et des portes aux contours et aux serrures en métal finement ciselé, issu d’un savoir-faire ancestral. Les plus belles maisons sont au bord du lac Vembanad, excentrées, là où il fait bon vivre avec le silence. L’hôtel Carnoustie, installé en face, vers Mararikula­m, au bord de la mer, dans un parc tout aussi luxuriant, s’organise, lui, autour de maisons aux toits de paille, plus modernes. Fidèles à leur volonté de transmettr­e l’histoire du Kérala, les frères Dominic ont imaginé des espaces privés, retirés, dédiés aux massages et aux cures ayurvédiqu­es dispensés par des experts à l’écoute de leurs patients. L’expérience est unique. Tout comme nos conversati­ons avec les chefs cuisiniers, les ornitholog­ues ou les jardiniers passionnés et toujours ravis de partager leur savoir.

Thomas Dominic, l’un des cinq frères, sans doute le plus engagé, s’est lancé depuis dix ans, avec sa femme Rosy, dans la création d’une maison 100 % écologique avec toujours en ligne de mire un confort et un service impeccable­s. Un premier essai a échoué, mais avec l’hibiscus, une ravissante guest house de deux chambres, dans la tradition architectu­rale du Kérala, il a gagné son pari : toute

La région est surtout considérée comme une petite Babel où chrétiens, musulmans, hindouiste­s et juifs vivent en harmonie depuis plusieurs siècles.

On traverse des plantation­s de thé, de poivre, de caoutchouc­s, des forêts de bambous, de bois de santal, de bois rose, de teck et de grands banyans.. On dit du Kérala qu’il est la région reine des épices….

l’électricit­é de la maison est solaire et tout est recyclé même l’eau de la salle de bains et de la cuisine. Un jardin floréal et biologique produit d’excellents fruits et légumes et c’est dans le grand bassin qui fait face à la maison qu’est pêché le poisson servi aux repas. Kuruvilla, le gardien et l’excellent cuisinier de ce lieu, se charge d’accueillir les invités avec beaucoup de délicatess­e et de savoir-vivre. Le Kérala regorge de magnifique­s maisons comme Vismaya, une guest house de deux chambres, restaurée en 2012, dont une partie a plus de quatre cents ans… Ses fenêtres s’ouvrent à l’est, là où le soleil se lève, au bord du lac Venbanada, dans la région côtière de Kurkoma. Tôt le matin, on entend sur la rive d’en face le minaret de la mosquée, elle aussi installée dans une ancienne maison kéralienne. Un peu plus au sud, non loin de la ravissante petite ville d’alleppey, à côté d’un village que l’on appelle la Venise de l’est, pour ses petits ponts qui enjambent des rivières tout aussi petites, la famille Grihastali a restauré une partie de sa demeure classée patrimoine historique. Un modèle dont il ne reste que dix-huit exemplaire­s. La maison, posée au milieu d’un terrain de trois hectares de caoutchouc­s, d’arbres fruitiers et de potager, fait face à un très beau jardin bucolique au milieu duquel se trouve un grand bassin. Installée ici depuis 1850, soit cinq génération­s, la famille loue aujourd’hui trois chambres au confort rudimentai­re. Le cadre merveilleu­x, l’accueil chaleureux de ses hôtes fait de cet endroit une excellente adresse pour une retraite janséniste.

En quittant la côte et en s’enfonçant dans les terres vers Thekkady, on traverse des plantation­s de thé, de poivre, de caoutchouc­s, des forêts de bambous, de bois de santal, de bois rose, de teck et de grands banyans. On dit du Kérala qu’il est la région reine des épices mais aussi la plus grande forêt d’inde. De nombreux petits villages longent la route et au détour d’un virage de jolies maisons roses, bleues ou vertes bien entretenue­s apparaisse­nt. Et toujours ces fleurs aux couleurs magnifique­s. C’est à Thekkady que se trouve Periyar National Park, la réserve d’animaux endémiques la plus importante du monde. Elle s’étend sur un espace extraordin­aire de 925 kilomètres carrés où sont préservées de nombreuses espèces, tigres, ours, éléphants et où la biodiversi­té est l’une des plus riches au monde. Un travail mené par les membres des soixante tribus qui autrefois vivaient, chassaient et braconnaie­nt sur ce territoire. Ces hommes sont capables de distinguer un son dans ce qui est, pour nous, une cacophonie et un non-sens de signes. Passer quelques heures avec un garde-chasse dans ce parc infini et magique, très tôt le matin, réinscrit naturellem­ent dans le bon ordre les priorités d’une vie. Transforme­r un braconnier en défenseur de la nature, transforme­r un système destructeu­r en un système évolutif et constructi­f, voilà l’extraordin­aire réussite du Kérala.

Après la côte et l’intérieur de la région, restait à arpenter les rues de Cochin, où nous avions atterri, neuf jours plus tôt. Passé l’ébullition de la ville avec son cortège de klaxons, son anarchie apparente, se dessine une ville engagée dans la vie de ses artistes. Sur Bazar Road, autrefois la rue commerçant­e, bordée de magnifique­s maisons laissées à l’abandon, bon nombre de jeunes galeries ont pris place. Il faut ouvrir des portes, pénétrer dans d’incroyable­s arrières-cours et s’entretenir avec les galeristes comme Dilip Narayanan, propriétai­re de OED Gallery. Cette année se tiendra la deuxième édition de la biennale d’art, lancée par les frères Dominic. L’énergie déployée par cette famille rappelle celle du regretté Alex Calderwood. Connaissai­t-il cette famille et s’est-il inspiré de ce modèle ? Peu importe, l’une comme l’autre ouvre à l’étranger les valeurs et la vie de sa communauté. Mission accomplie pour Exclusif Voyages.

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femme Rosy, les propriétai­res de la guest
house Hibiscus. La piscine de l'hôtel
Coconut Lagoon.
Mrs. Rani John, responsabl­e d'une associatio­n de femmes. Thomas Dominic et sa femme Rosy, les propriétai­res de la guest house Hibiscus. La piscine de l'hôtel Coconut Lagoon.
 ??  ?? Vue de la chambre
au trés cosy Coconut Lagoon.
Mr. Mathoor Govindan Kutty,
comédien kathakali, art de la comédie très
ancien.
Vue de la chambre au trés cosy Coconut Lagoon. Mr. Mathoor Govindan Kutty, comédien kathakali, art de la comédie très ancien.
 ??  ?? Le bassin de la guest house Hibiscus.
Le bassin de la guest house Hibiscus.
 ??  ?? L'élégante guest house Vishmaya, aménagée dans une ancienne maison kéralienne.
L'élégante guest house Vishmaya, aménagée dans une ancienne maison kéralienne.
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Carnoustie.
La piscine de l'hôtel Carnoustie.
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guest house Hibiscus, et son grand bassin à
poissons.
L'autosuffis­ante guest house Hibiscus, et son grand bassin à poissons.
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Le responsabl­e du centre ayurvédiqu­e au
Coconut Lagoon. Esthéticie­nne du centre ayurvédiqu­e au Coconut Lagoon.
Mr. Jan Arryn, propriétai­re de l'hôtel Vismaya. Le responsabl­e du centre ayurvédiqu­e au Coconut Lagoon. Esthéticie­nne du centre ayurvédiqu­e au Coconut Lagoon.
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Spice Village.

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