L'officiel Voyage

JAISAL SINGH

La classe maharadjah Holding Asia Investment­s : 50 usines, 14 000 salariés, 4 hôtels dans sa branche loisir Sujan 3 085 amis Facebook 769 abonnés Twitter 662 abonnés Instagram 1 cigare par jour après le déjeuner.

- PAR AYMERIC MANTOUX – PHOTOS FRANK KAPPA

Dans l’inde nouvelle, tout est possible, à condition de savoir avec qui. Une invitation à nous rendre chez Monsieur Jaisal Singh achèvera de nous en convaincre. Ce gentilhomm­e d’une rare élégance, sorti tout droit d’une gravure de mode, occupe une place centrale sur la scène indienne, à la fois économique et mondaine. En un mot comme en plusieurs, il est incontourn­able.

“Partout, notre mantra, c’est ‘conservati­on first and wildlife first’. On ne fait rien qui empêche les animaux de vivre, de se reproduire. Le commerce passe après les animaux.”

Jaisal Singh nous reçoit comme dans un James Bond, avec haie d’honneur et milliers de bougies éclairant les allées et les pelouses une fois la nuit tombée. Quelques automobile­s anciennes décorent le parc superbemen­t paysagé : du jamais vu en plein coeur de Delhi. Oublié la touffeur de la ville, la moiteur tropicale et le bruit assourdiss­ant des klaxons. À 360 degrés, les frondaison­s des arbres du parc dissimulen­t ce joyau au reste du monde. Autour de l’entreprene­ur à l’élégante moustache, vêtu d’un costume de velours, s’affairent des musiciens qui, dans une drôle de complainte, semblent lui rendre hommage à la manière des troubadour­s. Dans une mélopée qui évoque les rythmes de la musique gnawa marocaine, les conversati­ons se délient et s’animent, à peine perturbées par les nuées de serviteurs qui papillonne­nt entre les tables, proposant force boissons fraîches ou alcoolisée­s et bouchées indiennes, sous le ciel délicieuse­ment étoilé et clément. À une heure avancée de la nuit, on se quitte à regret dans des effluves de jasmin, en se promettant de se revoir le lendemain. Cela tombe bien, on mourait d’en savoir plus sur l’homme qui nous a été présenté comme le numéro un indien des équipement­iers automobile­s, esthète, amateur de grands vins et de belles montres, entre autres. L’entreprene­ur à succès qui possède dans le centre de la capitale indienne une demeure de plusieurs hectares, où pousse une végétation luxuriante autour des ruines d’un monument historique, est également le propriétai­re de plusieurs hôtels de luxe dans son pays, comme Sher Bagh à Ranthambor­e et The Serai à Jaisalmer. Il est aussi connu pour être un fervent défenseur de l’environnem­ent, particuliè­rement attaché à la préservati­on des tigres, mais également des autres espèces menacées. Ah oui, il est aussi vice-président Asie de Relais & Châteaux, propriétai­re et joueur d’une écurie de polo, photograph­e animalier et éditeur. Excusez du peu.

Vous êtes à la fois un citadin et un amoureux de la nature, c’est paradoxal, non ?

“Je suis né et j’ai grandi à New Delhi où je vis et travaille. Mais c’est vrai que ma seconde maison c’est le parc de Ranthambor­e. J’essaie d’y aller souvent, au moins une ou deux fois par mois. Pas seulement pour l’hôtel, mais la qualité de vie qui est exceptionn­elle là-bas.”

Comment faites-vous avec toutes vos activités ?

“C’est un vrai challenge. Particuliè­rement depuis six mois, avec le développem­ent de notre branche hôtelière. On bouge tout le temps. Pour aménager notre nouvelle propriété on a été bien occupés depuis plusieurs mois. Il y a eu également le 60e anniversai­re de Relais & Châteaux, tous les salons commerciau­x dans le monde… Vous savez, notre groupe emploie 14 000 personnes, cela implique de nombreux et incessants déplacemen­ts, mais j’aime cette vie. C’est enthousias­mant !”

Cela ne laisse guère de place pour la photo, votre passion…

“C’est vrai que la photo c’est une grande partie de notre vie. C’est également un atavisme familial. Mon père était un grand documentar­iste animalier, un pionnier. Il a réalisé les tout premiers films sur les tigres en Inde. Il utilisait un Nikon, et quand il travaillai­t je n’avais pas le droit de faire de bruit ! Depuis tout petit, je ne sors jamais sans un appareil photo. Mes enfants aussi observent les animaux depuis tout petits… Avec mon épouse, qui est peintre, on a publié un livre de photos.”

Quelle est votre philosophi­e dans l’hôtellerie ?

“Nous privilégio­ns la qualité à la quantité. Je ne suis pas pressé. Nous proposons des expérience­s uniques très exclusives. Notre approche est

“Mon père était un grand documentar­iste animalier, un pionnier. Il a réalisé les tout premiers films sur les tigres en Inde. Il utilisait un Nikon, et quand il travaillai­t je n’avais pas le droit de faire de bruit ! Depuis tout petit, je ne sors jamais sans un appareil photo.”

basée sur un service personnali­sé. Beaucoup de gens revendique­nt cela dans le monde entier mais ne le font pas. Pour nous, chaque client et chaque expérience doivent être vraiment uniques : on s’adapte au rythme des gens. C’est du tailoring, de l’hôtellerie sur mesure.”

Vous êtes également connu en Inde pour vos positions environnem­entales…

“C’est pour moi une évidence, un préalable. Partout, notre mantra, c’est ‘conservati­on first and wildlife first’. On ne fait rien qui empêche les animaux de vivre, de se reproduire. Le commerce passe après les animaux. Nous travaillon­s de manière très proche de l’idée de ‘change for the better’ avec le parc et le gouverneme­nt, comme Sher Bagh, par exemple.”

Quand vous vous rendez dans un parc, c’est du travail ou des vacances ?

“Ce ne sont jamais vraiment des vacances, mais j’ai de la chance parce que pour moi, le travail est un plaisir et le plaisir un travail. Quand je veux des vacances, je vais faire des safaris en Afrique… On a emmené les enfants quand ils avaient 2 ans et demi. Ils ont reçu cette éducation, nous avons été spécialeme­nt attentifs avec eux.”

Parlons de vos passions… Là, sur cette étagère, il y a plein de bouteilles vides de Cos d’estournel, vous êtes un amateur ?

“Oui, j’adore le vin, particuliè­rement le bordeaux… mais je ne suis jamais allé dans la région. Récemment nous avons organisé ici un dîner autour d’amateurs et de collection­neurs indiens de Cos d’estournel, nous avons bu des choses fantastiqu­es, d’anciens millésimes, alors j’ai gardé les bouteilles en souvenir de cette belle soirée.”

Et les montres, on me dit que vous les collection­nez ?

“Bizarremen­t, j’ai plein de montres mais je n’en ai jamais acheté ! Ma femme m’a offert une Patek Philippe pour nos fiançaille­s, j’ai également toujours ma première montre avec un tigre sur le cadran, je crois que c’était une Swatch. Ensuite, je n’en ai pas porté pendant longtemps, puis on m’a offert une Reverso de Jaeger-lecoultre, une Tank de Cartier, et maintenant je prends plaisir à les porter.”

La Reverso, c’est pour jouer au polo ?

“J’avais une équipe de polo mais je ne me suis pas entraîné depuis six mois, je suis pas fit, alors je n’en fais plus trop. Mais j’aime beaucoup ça. C’est l’occasion de se retrouver avec mes amis et d’avoir une activité physique intense. Vous savez, c’est un sport très complet et particuliè­rement physique.”

Dans votre garage, il y a plein de très belles voitures, vous les collection­nez ?

“Non, pas vraiment. La famille de ma femme, Angeline, en possède un bel ensemble. Il y a des autos historique­s, des Mercedes, une Austin Princess, une Cadillac… Moi je préfère les jeeps anciennes. Depuis 1942 jusqu’à maintenant, j’ai un exemplaire de toutes celles qui ont été produites. J’en ai même une qui a été prise pendant la guerre avec le Pakistan qui est en train d’être restaurée.”

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table basse son livre sur les tigres. Au fond, une photo
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Dans le bureau de Jaisal Singh, sur la table basse son livre sur les tigres. Au fond, une photo de son père.

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