Portrait : Olivier Saillard
Olivier Saillard, directeur du Palais Galliera, installe “Le Musée éphémère de la mode” à Florence. Portrait de l’historien, auteur, performeur et commissaire d’exposition.
On dit qu’en mode, le temps est un éternel recommencement. Certains disent qu’elle est rapide, qu’elle doit être une satisfaction immédiate; d’autres revendiquent l’accès à une mode réfléchie, qui se laisse désirer, qui chasse le fashion burn-out et prône une consommation vestimentaire régulée. Au milieu, se tient Olivier Saillard, historien et intellectuel mais surtout agitateur joyeux de la mode contemporaine. “Olivier s’approche avec et par les mots de l’univers du vêtement, sans ignorer tout ce que la mode véhicule d’autre, à propos de l’individu qui s’y soumet et de la société qui la produit”, résume Violetta Sanchez, ancien mannequin, actrice et muse de l’historien. Que ce soit dans les expositions qu’il présente au Palais Galliera ou à travers les performances qu’il réalise depuis 2012, Olivier Saillard offre une manière différente d’appréhender la mode et le vêtement.
Et on aurait tort de ne pas regarder ce qu’il produit comme un ensemble, rappelle Lapo Cianchi, directeur de la communication et des événements de la fondation Pitti Immagine Discovery, l’institution à l’origine de l’exposition “Le Musée éphémère de la mode” : “Olivier est intelligent, ironique même envers lui-même. Son approche de la mode doit être envisagée comme un tout. Lorsqu’on regarde ses performances, il y a une idée de retrouver le passé sans se figer dans la nostalgie, mais en saisissant le présent.” The Impossible Wardrobe, Eternity Dress, Cloakroom,
Models Never Talk, Sur-exposition et enfin Couture essentielle : s’il est important de citer le nom de ces performances, c’est qu’avec elles Olivier Saillard crée sa propre temporalité. Un espace durant lequel il peut parler du présent en saisissant le passé et sortir la mode de son écrin de luxe pour la livrer au regard de tous. Marie Collin, directrice des arts vivants et plastiques au Festival d’automne, qui accueille régulièrement ses performances, témoigne : “C’est la créativité, l’originalité du talent d’olivier Saillard et sa connaissance profonde de l’histoire du vêtement et de la mode qui nous intéressent. Sa manière unique de s’emparer de ce domaine à la fois frivole, commercial et un peu vain en le décortiquant avec humour, fantaisie et passion. Il s’agit donc davantage d’art que de mode dans son travail.” Celui dont le mémoire de fin d’étude portait sur le corps traité comme vêtement questionne sans cesse la gestuelle face à l’habit, qu’il s’agisse de celle du
conservateur ou de celle du consommateur. “Une des choses marquantes chez Olivier est le soin unique qu’il accorde à cette forme très personnelle d’une poétique du geste. Il écrit de magnifiques partitions qui dévoilent ou qui habillent une idée, un mot, des souvenirs, et cela, souvent avec un simple mouvement. Il pose avec une grande élégance des gestes sur
une scène”, explique Aymar Crosnier, directeur général adjoint et responsable de la programmation du Centre national de la danse. Si “Le Musée éphémère de la mode” est une exposition, on peut tout de même compter sur l’art de la mise en scène d’olivier Saillard. Créée en partenariat avec le musée des Offices de Florence, cette exposition présentera des tenues et costumes issus des archives du Palazzo Pitti et du Palais Galleria, ainsi que certaines pièces issues de collections privées. “La manière traditionnelle d’exposer est en train de disparaître et c’est ce à quoi renvoie le titre de l’exposition, même si le contenu provient d’archives de musées. Notre réflexion porte donc sur ce que sont les musées aujourd’hui, ce qu’ils signifient et quel est leur rôle dans la mode”, explique Lapo Cianchi. Une nouvelle manière d’exposer la mode dans les musées, qui se veut une contribution pour le futur. Un avenir qui ne peut s’envisager sans un rapport de force entre le passé et le présent : “Peut-être est-ce l’essence
de la mode ?” s’interroge Lapo Cianchi. C’est en tout cas la force d’olivier Saillard.
“Le Musée éphémère de la mode”, du 14 juin au 22 octobre au Palazzo Pitti, à Florence. www.pittimmagine.com