La Gazette de la Manche

« 27 boucheries disparues en 35 ans »

Il reste trois boucheries dans le centre-ville d’Avranches. Les spécialist­es de la viande se souviennen­t d’un temps pas si lointain où l’on pouvait en trouver plus d’une vingtaine. Ils nous parlent de ce changement.

- Thomas Savalle

Les clients défilent le samedi matin dans les boucheries du centre- ville. Il faut cependant savoir que le nombre de ces profession­nels a chuté considérab­lement. « Il y a 20 ans on pouvait en compter une vingtaine » , estime Bruno Leboulange­r, le patron de la boucherie VBA. Deux minutes lui suffisent pour en citer onze. « Nous en trouvions : rue Saint-Gervais, route de Mortain et sur la place Patton… » Monique, cliente de la boucherie, complète en ajoutant les trois boucheries chevalines qui ont disparu depuis que le cheval est devenu un animal de compagnie. Philippe Villain, boucher près de la mairie, lui parle de « 27 boucheries disparues en 35 ans. »

Trois en centre-ville

À Avranches, on compte désormais trois boucheries en centrevill­e. La chute semble vertigineu­se, mais a touché toute la France et depuis bien longtemps. D’ailleurs, Avranches a été épargnée par rapport à d’autres villes comme Saint-Malo qui compte seulement une boucherie de plus pour près de 50 000 habitants. L’apparition des grandes surfaces a favorisé une autre façon d’acheter la viande. « Attention, les boucheries ont fermé pour de multiples raisons. Les bouchers partaient à la retraite et n’ont pas trouvé de repreneur pour leur boutique » , expliquent Philippe Vilain et Bruno Leboulange­r, les deux bouchers.

Des raisons multiples

« Ce ne sont pas les grandes surfaces qui nous cassent » , précise Philippe Villain. La consommati­on de viande a baissé depuis les multiples campagnes de commu- nication du gouverneme­nt invitant à consommer moins de viande. « Les gens continuent d’en acheter, mais ils font cependant plus attention à la fréquence » , explique Jean-Philippe Grouazel.

Le scandale de « la vache folle a aussi eu un impact sur la consommati­on. Tout comme les agriculteu­rs qui proposent de la viande directemen­t aux

consommate­urs » , poursuit son père. Pour lui, la façon de s’alimenter est différente « la viande coûtait moins cher avant, c’est devenu un produit de luxe. » Les gens mangeaient plus de viande selon Jean-Philippe. La ville a pris aussi une autre dimension au niveau de l’urbanisme.

8 tonnes de viande par semaine

Le centre-ville a changé avec des commerces en périphérie. Le patron de la boucherie VBA s’est d’ailleurs adapté à ce changement. « Nous voulions préparer l’avenir en nous installant devant

une zone commercial­e. Environ 80 % de nos clients vont en grande surface.

C’était pour nous une évidence de nous installer ici » , explique Bruno Boulanger. Il voulait rendre plus accessible son commerce. La boucherie VBA reste une grosse machine désormais. L’entreprise emploie trente personnes dans ces quatre boucheries : les deux d’ Avranches, une à Villedieu-les-Poêles et celle SaintPair-sur-Mer. Il dépote 6 à 8 tonnes de viande par semaine. Un salarié achète la viande en direct chez les éleveurs. « Il faut tout valoriser pour que cela soit rentable. » La boucherie multiplie les clients du particulie­r, aux collectivi­tés en passant par la restaurati­on.

Une histoire de famille

C’est avant tout une histoire de famille pour la boucherie Vilain qui existe depuis 37 ans. Philippe Vilain a prolongé l’histoire d’une génération.

Bernard Grouazel a repris l’affaire de son père puis a laissé la main à son fils Jean-Philippe. Retraité depuis 12 ans, Bernard passe régulièrem­ent donner des conseils à la jeune génération. Il vient aussi discuter avec les clients.

Du porte-à-porte depuis 1947

Une des originalit­és de cette boucherie est de faire du porteà-porte depuis 1947. « Je livre le mardi à Genêts. Le jeudi je passe à Vains, Saint-Léonard et Saint-Jean-le-Thomas. Nous sommes les seuls à proposer ce service » , explique Jean-Philippe. Autrefois, tous les bouchers proposaien­t ce service et la boucherie Grouazel a voulu continuer. « Nous sommes désormais les seuls. Ce n’est pas d’une grande rentabilit­é mais nous allons continuer à proposer ce service. »

« La viande coûtait moins avant »

 ??  ?? Jean-Philippe et Bernard Grouazel devant leur camion. Philippe Vilain et son boucher Jean-Luc Coulon, et Bruno Leboulange­r.
Jean-Philippe et Bernard Grouazel devant leur camion. Philippe Vilain et son boucher Jean-Luc Coulon, et Bruno Leboulange­r.

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