La guerre des camemberts n’est toujours pas finie
Le tribunal administratif de Caen a annulé des injonctions de la répression des fraudes. Il a donné raison à des industriels tels Lactalis, Gillot ou Isigny-sainte-mère, qui arborent le mot « Normandie » sur des étiquettes de camemberts.
Le tribunal administratif de Caen a donné raison, le 12 février 2024, à des industriels tels Lactalis, Gillot ou Isigny-saintemère qui arborent le mot « Normandie » sur des étiquettes de camemberts n’étant pas fabriqués selon le cahier des charges de L’AOP (Appellation d’origine protégée). Le tribunal a ainsi annulé les injonctions de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) de 2021 et 2022.
Sur la forme, mais pas sur le fond
Dès mardi 13 février, L’ODG (Organisme de défense et de gestion) des quatre fromages AOP de Normandie et le Cnaol (Conseil national des appellations d’origine laitières) ont réaffirmé que «seule L’AOP Camembert de Normandie peut utiliser le terme Normandie ». «Le tribunal administratif de Caen a annulé des injonctions de la DGCCRF pour des raisons de forme, mais il ne remet rien en cause sur le fond », défendent-ils.
L’ODG et le Cnaol jugent que «les décisions du 12 février du tribunal administratif de Caen ne doivent pas faire oublier que le principe de protection de L’AOP a été réaffirmé par le Conseil d’état, par ses décisions du 22 juillet 2022 et du 4 décembre 2023, ni détourner les opérateurs et L’ODG de leur engagement dans le développement de la qualité et de la notoriété de L’AOP Camembert de Normandie. L’interdiction d’utiliser la mention » Camembert fabriqué en Normandie « en application de la réglementation européenne des Appellations d’origine Protégées a été jugée comme un principe intangible en 2022 par le Conseil d’état, plus haute juridiction administrative de l’état ».
En effet, le 22 juillet 2022, il a été jugé pour les fromages ne répondant pas au cahier des charges : «il ne saurait être fait mention, en association avec le terme générique » camembert », de l’origine « Normandie », laquelle ne constitue pas un terme générique ». Le 4 décembre dernier, le Conseil d’état dans les mêmes termes a réitéré ce jugement. »
«La large protection est la naturelle contrepartie à la valorisation de tous les efforts continuellement consentis depuis des décennies par les éleveurs et transformateurs pour valoriser ce patrimoine gastronomique. Des entreprises contestent les conditions de mise en oeuvre de cette protection », expliquent l’organisme et le conseil national.
Appel à l’apaisement
Benoît Duval, éleveur dans l’orne et président de L’ODG Camembert de Normandie, et David Aubrée, directeur de la fromagerie Réo et président de l’association des fromages AOP de la région Normandie, « appellent les entreprises concernées à ne plus perdre de temps dans les contentieux et à s’adapter, et dans le respect du droit, à créer de la valeur avec leurs marques et à la partager avec les producteurs de lait ».
L’organisme et le conseil national « souhaitent que chacun trouve sa place sur le marché dans le respect de L’AOP Camembert de Normandie, au bénéfice des producteurs et transformateurs qui respectent le cahier des charges. » Ils « invitent donc les entreprises concernées à l’apaisement et à s’adapter sur les marchés au profit de la filière dans son ensemble, en faisant preuve de leur grande capacité d’innovation ».
« L’AOP Camembert de Normandie est protégée contre toute utilisation commerciale directe ou indirecte de sa dénomination et les étiquettes des Camemberts non AOP ne peuvent comporter des mentions prêtant à confusion pour le consommateur y compris sur la provenance du lait », réaffirment-ils.