De la nécessité de trouver un compromis politique
Environ 250 personnes ont assisté mercredi 21 février 2024 à la réunion publique organisée par l’association pour la quatre voies Avranches-granville.
Toutes les chaises installées dans la salle Michel Fraboulet de Saint-pair-sur-mer étaient occupées. Des personnes se tenaient debout au fond de la salle, pour entendre Régis Yver, le président de l’association pour la défense de cet axe routier entre Avranches et Granville. L’association est forte de 3 000 adhérents, dont 65 communes, des élus, des représentants du monde économique du territoire, qui plaident pour une voie express, qui permettra de désenclaver le Sud Manche.
Un dossier de… 1990
Un véritable serpent de mer dont les origines remontent au milieu des années 1990. La première enquête publique, défavorable, remonte à 1995. Ce dossier a connu bien des péripéties et des rebondissements depuis, malgré l’ouverture des contournements de Sartilly en 2015 puis de Marcey-les-grèves en 2019.
Cette réunion faisait suite également au nouveau projet d’aménagement de la D673, voté en séance plénière le 15 décembre 2023 par le conseil départemental de la Manche (lire page 2). Le Département a été contraint de revoir sa copie, après le rapport défavorable de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) en mars 2021. La raison : l’évolution de la réglementation en matière environnementale sur les zones humides. « Les compensations écologiques étaient devenues trop importantes », expliquait Catherine-brunaud Rhyn, lors d’un point presse de mi-mandat, avec son binôme conseiller départemental, Antoine Delaunay.
«On a balayé l’humain »
Dans son discours introductif, Régis Yver a rappelé l’historique du dossier depuis près de trente ans, fustigeant « une écologie à géométrie variable » lorsque « une agence d’état (NDRL : la DREAL) finance une association (NDRL : Manche Nature) qui lutte contre un projet qu’elle instruit elle-même. »
Celui-ci souhaiterait que « le droit constant ne s’applique pas seulement au niveau fiscal, et que les projets votés avant le passage des lois (en référence à la décision de la DREAL de mars 2021) soient mis en oeuvre», sachant que la Déclaration d’utilité publique (DUP) pour le projet de 2x2 voies datait de 2006. « Les victimes, ce sont les riverains, les usagers, les chefs d’entreprises qui ont financé par leurs impôts ces études! Pour des raisons environnementales, on a balayé l’humain ! »
L’attractivité du territoire en question
Vidéos et plans à l’appui, ont ensuite été présentés les enjeux liés à l’aménagement de « la route de l’enfer » : a sécurisation des riverains, la nécessité de résoudre le problème de la mise en danger des patients transportés vers les hôpitaux, le manque d’attractivité pour l’industrie, le tourisme et d’une manière générale la pérennité de l’activité économique. «Ce n’est pas évident de trouver du personnel dans ces conditions avec une circulation compliquée entre Avranches et Granville », a témoigné Dominique Eudes, président de l’union des métiers et des industries de la Manche. «Comment va-t-on faire pour attirer des jeunes sur notre territoire alors que 25 % des entreprises artisanales du secteur vont être à reprendre dans les dix années à venir», s’est alarmé Benoît Rabel, élu à la Chambre des métiers et de l’artisanat de la Manche.
Trouver un consensus
Dès lors, l’association propose un projet répondant à quatre objectifs : efficacité en terme de fluidité, exemplaire au niveau environnemental (avec bassins de décantation, plantation d’arbres et restauration des espaces naturels à l’image de celui de la vallée de la Guérinette sur le contournement de Marcey), faisant l’objet d’un consensus politique et urgent dans sa réalisation.
« Concernant le nouveau projet du département, entre Saint-pair-sur-mer et Sartilly, le compte n’y est pas», martèle Régis Yver. «Ce qui nous énerve aussi, c’est la revente envisagée des terrains acquis en vue de la réalisation de la 2x2 voies. Nous espérons un sursaut du Département car on ne peut pas monter un projet contre les élus et la population. Aujourd’hui, le Département est au milieu du gué. L’association va batailler, mais on ne va pas le faire pendant dix ans. Je pense avant tout aux riverains qui vivent dans une situation catastrophique. Nous ne nous battons plus pour une 2x2 voies sur toute la longueur entre Granville et Avranches, mais bien pour une voie express. Nous sommes pragmatiques, nous voulons trouver un compromis politique. »
Le président de l’association a ainsi rappelé que le Code de l’environnement permettait l’utilisation de la raison impérative d’intérêt public majeur afin d’obtenir une dérogation pour ce projet, comme l’a prôné en novembre 2023 le sénateur (LR) Philippe Bas.
Un courrier au Premier ministre
L’association et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Ouest-normandie, par la voix de son président Daniel Dufeu, envisagent par ailleurs d’adresser un courrier, signé par un maximum d’élus, au Premier ministre, afin que Gabriel Attal vienne lui-même voir la situation sur le terrain, « dans un territoire où l’on se sent abandonnés par rapport aux métropoles et mettre ainsi autour de la table des personnes qui ont l’ambition de réaliser une route pour plus de fluidité sur la D673. Cela fait deux ans et demi que l’on tourne en rond, a conclu Régis Yver. Le Département ne peut pas aller à l’encontre d’un territoire. La balle est dans son camp ! »