La Gazette Val d'Oise

Guéguerre à coup de peinture autour du théâtre de l’Usine

- • Jérôme CAVARETTA

Fermé depuis fin 2023, le théâtre de l’Usine n’était plus que théâtre. L’espace de quelques jours, la dernière partie de son nom historique avait été recouverte d’une épaisse couche de peinture, suscitant l’émoi du collectif des artistes de l’Usine. Avant de réapparaît­re comme par enchanteme­nt.

Effacé avant de ressuscite­r sans crier gare. Le temps de quelques jours, une épaisse couche de peinture blanche a recouvert une partie de son nom. Le théâtre de l’Usine n’était plus que théâtre. Sur le fronton du repaire culturel éragnien fermé depuis fin 2023, les mots de l’Usine avaient mystérieus­ement disparu. Seul avait survécu Théâtre.

« Une marque déposée »

Comme si la page du théâtre de l’Usine, dont le fondateur Hubert Jappelle est décédé en novembre 2020 à l’âge de 82 ans, devait être définitive­ment tournée. Son histoire balayée. Ensevelie. Et puis, comme par enchanteme­nt, le théâtre de l’Usine a retrouvé toute son entièreté. L’oeuvre de la guéguerre à coup de peinture autour de la dénominati­on de l’équipement et de sa propriété intellectu­elle que se livrent désormais Nicolas Jappelle, le fils du fondateur du théâtre de l’Usine et le collectif des artistes de l’Usine, créé pour que le théâtre continue de vivre.

Contraint de plier bagage en décembre faute de subvention­s, le premier ne souhaite plus associer le nom théâtre de l’Usine à l’ancienne papeterie, propriété de la Ville d’Eragny, qui a hébergé la compagnie Hubert-Jappelle pendant quatre décennies. A contrario, le collectif juge que le théâtre de l’Usine est indissocia­ble du lieu. Nicolas Jappelle a fait effacer les mots de l’Usine.

Le collectif les a aussitôt rétablis.

« Le nom théâtre de l’Usine est une marque déposée, justifie Nicolas Jappelle. C’est un nom beaucoup trop lié à la compagnie Hubert-Jappelle, c’est notre image, notre réputation, c’est aussi le nom de la société, notre adresse mail... Je dois emmener ce nom avec moi, d’autant que j’ai le projet de créer un théâtre de l’Usine itinérant qui irait à la rencontre des population­s éloignées de la culture. Et puis, ma famille préfère que le nom théâtre de l’Usine disparaiss­e. J’aurais aimé que le collectif m’appelle mais le dialogue est rompu. J’avais une montagne d’arguments à lui soumettre... »

Le théâtre de l’Usine amputé d’une partie de son nom : l’émoi a instantané­ment saisi le collectif de l’Usine qui a publié sur les réseaux sociaux un long message pour dire tout son désarroi. Sa déterminat­ion aussi.

« Rouleau de peinture vengeur »

« Depuis 1986, date de la première saison proposée par Hubert Jappelle, le Théâtre situé d’abord rue de la papeterie, puis chemin d’Andrésy, s’appelait de l’Usine. Théâtre De L’Usine. Depuis hier, et par la volonté d’un rouleau de peinture vengeur, il n’est plus que théâtre. Fallait-il qu’il soit en colère ce rouleau de peinture blanche ! Fallait-il qu’il soit en colère pour déchaîner ainsi sa volonté d’effacement, pour s’en prendre à ces mots de l’Usine et vouloir les faire disparaîtr­e de nos vues pour qu’à terme, ils disparaiss­ent de nos mémoires. »

Et de prévenir : « C’est naïf un rouleau imbibé de peinture blanche pour croire que notre théâtre cessera d’être de l’Usine. Car tant que nous serons debout et animés de notre énergie créatrice, ce Théâtre ne cessera pas d’être Théâtre de l’Usine. Par notre volonté, notre travail, par nos projets, nous y veillerons. Faroucheme­nt. » Par la magie d’un petit coup de peinture aussi.

Et maintenant, que va-t-il se passer ? « Je ne vais pas remettre un coup de peinture, souffle Nicolas Jappelle. Je vais simplement surveiller la situation, on verra la suite... Je ne peux pas en vouloir au collectif, ça me fait rire. » Drôle de guéguerre.

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