Philippe Rouleau : « J’aime le combat ! »
Adjoint aux finances de 2008 à 2014, Philippe Rouleau (Lr), 62 ans, a été élu maire le 29 mars 2014 après une victoire dès le 1er tour. Il dresse le bilan de dix années à la tête de la ville.
➜ Quel regard portez-vous sur ces dix années ?
Être maire, c’est passionnant ! Je comprends ceux qui ont du mal à s’arrêter, même s’il m’arrive d’avoir des moments de découragement. Quand vous travaillez d’arrache-pied, à l’écoute de tout le monde, et que sur les réseaux sociaux, on ment, on vous maltraite… Ces réseaux ont un pouvoir déformant par rapport à la majorité silencieuse. Je suis très content d’arriver bientôt aux élections municipales car c’est la vraie démocratie ! Une anecdote parmi d’autres : une Herblaysienne de 13 ans, dans un club de patinage artistique à Cergy, née en France. Ses parents d’origine portugaise n’ont pas fait le nécessaire pour qu’elle prenne la nationalité française. Pour faire les championnats de France, elle doit avoir la nationalité. J’ai été alerté. On était à deux semaines des championnats. L’histoire est belle, je me décarcasse, j’appelle le sous-préfet qui a été super réactif. Ce matin, elle m’envoie un message en me disant : « Je suis française ». Elle pourra faire les championnats. Des moments comme ça où on change la vie, c’est extraordinaire ! C’est ça qui me fait tenir.
➜ Quelles sont les choses dont vous êtes le plus fier ?
Lors du premier mandat, nous avons fait la Maison des associations, en récupérant l’école bleue.
Les anciens maires en parlaient depuis trente ou quarante ans ! On a aussi créé la route, le chemin de Pontoise, qui traverse le Trou Poulet, cet endroit bien connu. C’est une reconquête républicaine ! Il fallait beaucoup de courage, être gonflé, pour le faire et j’en suis très fier. Les anciens maires n’ont pas osé. J’y passe souvent pour vérifier qu’elle reste bien. Il y a la ludo-médiathèque dont mes prédécesseurs rêvaient. Un très bel équipement intergénérationnel qui a connu une petite phase [des problèmes de cohabitation au sein de l’équipement] liée à son énorme succès. Et puis le centre-ville. Il fallait être très courageux. Un ancien maire m’a dit : « Bravo, je n’aurais pas osé faire ça ». Des travaux sur trois places, avec toutes les contraintes, c’était pas évident, ça a pris 18 mois. Et puis je suis aussi fier du lien créé avec la population, y compris les enfants.
➜ Des regrets, des échecs, comme par exemple la résidence de personnes âgées des Érables ou la Mjc ?
C’est un peu présomptueux de dire ça mais je n’ai pas de regret sur tout ce que j’ai pu faire. Pour la Rpa, on était partis sur un projet qui ne s’est pas avéré à la hauteur de ce qu’on imaginait. On a stoppé ce projet pour repartir sur un autre projet. C’est pas parce qu’il y a une contestation que je vis ça comme un échec. La contestation est normale. Pour la Mjc (Ndlr, la Ville avait cessé son subventionnement, entraînant la liquidation de l’association), elle n’était pas à la hauteur de mes ambitions pour la jeunesse. Les gens qui étaient contre ma décision ont compris ensuite. Il se passe plein de choses à l’Espace André-Malraux.
➜ En 2020, vous aviez promis de ne pas augmenter les impôts. Pourtant, vous augmentez cette année de 8,5 % la part commune de la taxe foncière.
Nombre de maires ont augmenté les impôts l’année dernière. J’ai tenu bon en espérant que la situation s’améliore mais elle s’est détériorée. C’était soit ça, soit diminuer la qualité de service : moins de sécurité, moins de culture. Je n’ai pas fait ce choix. Si j’ai l’opportunité, je baisserai le taux.
➜ Vous avez fait de la lutte contre l’insécurité une priorité, est-ce que la situation s’est améliorée dans tous les quartiers ?
Quand j’ai été élu, il y avait sept policiers [municipaux], loin d’avoir le niveau de formation actuel. Si j’avais résolu tous les problèmes de sécurité, on m’aurait repéré et nommé ministre de l’Intérieur ! (rires) J’ai pris conscience, dès 2014, de la sécurité et j’ai pris ça à bras-lecorps. J’ai armé les policiers municipaux et multiplié leur nombre par quatre ou cinq. On a de la vidéoprotection. Il y a toujours des problèmes, mais si je n’avais pas mis autant de moyens, c’est sûr que ça se serait détérioré.
➜ Vous défendez l’idée, pour lutter contre l’urbanisation, d’un golf aux Bayonnes. À l’heure de la transition écologique, cela pose question à beaucoup de gens. N’est-ce pas un projet décalé ?
Ça me fait rire ! J’aime le combat, mais ce que je n’aime pas, ce sont les positions dogmatiques. Je rappelle que j’ai stoppé un projet d’extension des Bayonnes de 800 logements. J’ai encore les plans. Le promoteur n’était pas très content. Je ne crois pas que ce soit très écologique que de faire 800 logements à cet endroit-là. Un golf, c’est quoi ? Pour l’essentiel, c’est du gazon. Il y aura des plans d’eau, des arbres… La seule chose qu’on me rétorque, c’est l’arrosage. On n’arrose plus les golfs. Je sais bien qu’il y a un dérèglement climatique. On cherche en fait à empêcher ce type d’aménagement pour des raisons qui ne sont pas écologiques. C’est le symbole auquel on s’attaque, même s’ils s’en défendent. Pour eux, un golf, c’est pour les riches. C’est pas ma conception. J’ai trouvé cette opportunité.
➜ Pourquoi un golf ?
Si on ne fait pas un golf, on fait quoi ?
➜ Vous pourriez conserver les terres agricoles.
Est-ce que l’agriculture c’est écologique ? Est-ce que ça assure une biodiversité ? Est-ce qu’ils ne mettent pas un paquet de produits là-dessus ? Est-ce que les gens des Bayonnes n’ont pas protesté en disant trouver des traces vertes sur leurs balcons ? Il y avait 26 hectares. Je me suis demandé ce qu’on pouvait y faire et je trouve que ça valorise la ville. C’est un beau projet qui, dans l’équilibre financier global, ne nous coûtera rien et même nous rapportera. C’est un poumon vert dans une zone très urbanisée. Si je ne le fais pas, on m’obligera un jour à y faire des logements. Mon opposition parlait de faire un parc. Ça s’arrose un parc. Qui va l’entretenir, le sécuriser ? C’est pas raisonnable. C’est pas 8 % d’augmentation des impôts qu’il faut alors prévoir ! Beaucoup me disent de ne pas lâcher. Je rappelle que j’ai été élu avec 61 %, avec le golf dans mon programme. Donc rendez-vous en 2026.
➜ Vous serez donc candidat.
Oui.