Isabelle Mézières : « J’ai cette force de caractère qui dérange »
Ex-adjointe à la culture de Jean-Pierre Béquet, Isabelle Mézières, 57 ans, a pris la mairie d’Auvers-sur-Oise en mars 2014 avant d’être largement réélue en 2020 (73 %).
➜ 10 ans, ça passe vite... ou pas ?
Isabelle Mézières : Ça passe super vite quand on est prise dedans. Je ne pensais pas que le temps filerait aussi rapidement. Je me disais qu’être maire pendant 25 ans comme mon prédécesseur, ce n’était pas possible. On ne s’ennuie pas. Quand on avance vite et que ça se passe bien, on se projette toujours.
➜ De quelles réalisations êtes-vous la plus fière ?
La médiathèque et la maison de la solidarité. Ce sont deux lieux de vie que nous avons construits avec mon équipe. Je suis surtout très fière du travail des 110 agents et cadres de la municipalité. Ils ont compris qu’Auvers est un village et ils sont très investis. Si vous faites de jolis outils, mais que les agents n’y mettent pas leur coeur, ça ne fonctionne pas.
Quelque part, je suis aussi fière d’avoir réussi à dépolitiser Auvers. On n’a pas augmenté les impôts et on a aussi réalisé 16 millions d’euros d’investissements en dix ans.
➜ En 2014, vous étiez soutenue par la droite, mais vous disiez être libre. Est-ce toujours le cas ?
Oui. Quand je me suis présentée, j’ai été voir les élus voisins, des grands noms de la politique comme Philippe Houillon, Stéphanie Von Euw et Axel Poniatowski pour prendre conseil.
J’avais quand même un cador du Ps à battre. Ce n’était pas n’importe qui Jean-Pierre Béquet, c’est un vrai homme politique. Comment faire quand on est une liste apolitique ? Je n’ai jamais voulu m’encarter, je ne le suis toujours pas et je ne le serai jamais. On n’a pas besoin d’être dans un parti pour réussir à gérer une ville. Dans mon équipe, il y a toutes les tendances... sauf les extrêmes.
➜ Les premiers conseils municipaux étaient houleux. Aujourd’hui, le climat semble plus apaisé, non ?
Le premier mandat a été horrible humainement et très difficile pour les agents, mes colistiers et ma famille. C’était d’une extrême violence. J’ai reçu des menaces de mort, j’ai été agressée physiquement, il y a eu des dégradations à mon domicile... Tout cela était mené par la gauche pour me déstabiliser et me décourager de me représenter... mais, j’ai été réélue à 73 % en 2020. Ils ont lâché prise au 2e mandat. Aujourd’hui, c’est calme. Il y a toujours des échanges vigoureux, mais il n’y a plus cette violence. Ce n’était pas vivable.
Je ne suis pas facilement impressionnable, mais j’ai eu des moments difficiles. Quand j’ai été agressée et insultée, ça a fait de la peine à ma famille et je ne voulais pas leur faire de mal. J’en ai parlé avec mon mari et mes enfants et je leur ai demandé s’il fallait que j’arrête. Ils m’ont dit : « Non, tu dois continuer. » Il fallait passer au-dessus de ces mesquineries.
L’agression physique a été la plus dure à supporter parce que je n’ai pas pu me défendre. Je suis une femme forte, mais quand on se fait taper dessus, on est sidéré. Je n’oublierai jamais. Aujourd’hui, je pense que cela se serait passé différemment.
Les premières plaintes datent de 2017 et je n’ai pas de nouvelles de ces affaires. J’ai vite compris qu’il s’agissait d’un complot politique de la Cgt. Ça ne me touche pas. Je suis bien dans mes baskets.
➜ Quels sont vos échecs ? Les dossiers non aboutis ?
C’est un peu prétentieux de dire ça, mais je n’en vois pas.
➜ Même la maison de la Santé qui a vu partir tous les médecins ?
Je ne l’ai pas vécu comme un échec... Peut-être humainement parce que je me suis trompée. J’ai fait confiance, mais je n’ai pas vu que mes interlocuteurs n’étaient pas de belles personnes. Mea culpa. Quand je donne ma confiance, c’est un peu « à l’ancienne ». Ils n’ont pas respecté leur parole. Aujourd’hui, il y a des infirmières, une kiné, une sage-femme... J’ai bon espoir de retrouver des médecins avant la fin de l’année. On est en discussion et ça avance très bien.
➜ Après votre élection, on vous a reproché votre tempérament. Vous avez été comparée à un bulldozer...
Je suis fidèle à moi-même. Je ne me suis pas laissée influencer et j’ai gardé le cap pour les Auversois. J’ai cette force de caractère qui dérange. Je reste libre et ça me donne de la force. Je n’ai pas de fragilité avec mon conseil et mes cadres. À Auvers, on est libres !
➜ Le logement social est toujours sujet à débat à Auvers...
Au bout de six ans de procédure, on a gagné devant le Conseil d’État. Ils ont reconnu que la pénalité infligée par le préfet était disproportionnée. L’État m’a remboursé 375 000 €, mais ils me doivent encore trois ans de pénalité. J’aimerais que le préfet me rembourse ce qu’il me doit et qu’il respecte cette décision de justice. Le problème reste le même à Auvers : pas de foncier et 80 % de terres agricoles, des zones inondables et des carrières. On ne pourra pas construire 500 logements sociaux et je payerai toujours des pénalités Sru.
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Bien sûr ! Je travaille déjà sur le prochain mandat. Je reste motivée comme au premier jour... Tant que les Auversois sont avec moi et partagent mes projets, je m’engagerai à fond pour eux.