La Marne (édition Meaux)

Polémique autour de l’aide à un commerce sinistré

La communauté de communes a proposé à la gérante d’un salon d’esthétique sinistré de s’installer dans la Maison du tourisme. Une décision qui n’a pas fait l’unanimité.

- Gurvan Abjean

L’élan de solidarité qui se manifeste à Crécy-la-Chapelle depuis les inondation­s n’est pas feint. Mais pour certains, il ne faut pas pousser le bouchon trop loin. L’installati­on d’une commerçant­e sinistrée au premier étage de la Maison du tourisme a ainsi suscité un débat houleux lors du conseil communauta­ire qui s’est tenu mercredi 29 juin. Quatre mois de travaux minimum

Corinne Lecart, gérante du salon d’esthétique « Le Jardin de la beauté », dans la rue du Général-Leclerc, ne travaille plus depuis un mois. Ses deux salariés sont au chômage technique. Son local est dévasté. Le parquet flottant n’est plus qu’un lointain souvenir. L’odeur de moisi a imprégné les lieux. Ce qui reste de son matériel est empilé dans des cartons au milieu desquels elle se faufile comme elle peut. La durée des travaux est estimée à environ quatre mois.

En attendant, la communauté de communes lui a donc proposé de s’installer dans un local vide de la Maison du tourisme, sur le principe d’un bail précaire

de quatre mois moyennant un faible loyer, environ 200 euros. Jusque-là, elle n’avait aucune solution de repli. « C’est la saison la plus importante de l’année. Elle est déjà fichue. Quand ils m’ont proposé cette solution, j’ai écarquillé les yeux, j’étais très surprise et reconnaiss­ante. Je ne m’y attendais pas. » Ce sont des agents de la Chambre du commerce et de

l’industrie et de la Chambre des métiers qui ont sollicité le Pays créçois pour venir en aide à l’esthéticie­nne. Corinne Lecart tient à le souligner : « Je n’ai pas fait la démarche. Je n’y ai même pas pensé ! Mais je trouve que la communauté de communes est dans son rôle, celui de préserver le tissu économique. » Patricia Lemoine, présidente de la CCPC, ne s’attendait pas à débattre pendant 15 minutes sur cette délibérati­on. Et pourtant. Sébastien Chimot, leader de l’opposition à Crécy, a très vite pris la parole. Il y voit une atteinte à la concurrenc­e : « Il y a une inégalité de traitement par rapport aux autres commerçant­s sinistrés et notamment par rapport à l’autre salon d’esthétique de la commune, lui aussi sinistré (ndlr, il fait référence au salon Cabotine de la place du Marché). Il aurait fallu proposer la même chose à tout le monde. » Valérie Pottiez-Husson, maire d’Esbly et vice-présidente du Pays créçois, lui a répondu : « Elle est la seule pour laquelle nous avons été sollicités. L’autre gérante a trouvé une solution de son côté. »

« Je trouve ça un peu gonflé »

Effectivem­ent, Christophe Cotillard, patron du salon de coiffure Chris by Paris, permet

à Céline Alves, gérante de l’institut Cabotine, d’utiliser la petite cabine située dans son salon. La jeune femme doit la partager avec une autre esthéticie­nne déjà en place. « Ce n’est pas une solution viable, explique la jeune femme. Ca me permet de prendre quelques clientes notamment pour les mariages et les baptêmes, les rendezvous déjà calés. Mais j’ai une grosse perte d’activité. J’avais 230 m2 avant avec un Spa ! Mes cinq employées sont au chômage. » Elle avoue l’avoir eu « un peu mauvaise » quand elle a appris la nouvelle : « Elle a besoin de travailler comme tout le monde, c’est normal, je comprends tout à fait. Mais lui permettre de s’installer sur la place du Marché alors que moi, je n’y suis plus, je trouve ça un peu gonflé… Avec un loyer de 200 euros en plus… C’est plus de 1 000 euros normalemen­t. » Elle craint de perdre une partie de sa clientèle au profit du Jardin de la beauté. Car elle non plus ne rouvrira pas avant fin septembre, au mieux.

Le débat s’est emporté lorsque Jean-Louis Vaudescal a interpellé Sébastien Chimot.

J.-L. Vaudescal : « J’espère que tu ne te retrouvera­s jamais dans cette situation »

S. Chimot : « Je n’ai pas de leçon à recevoir, j’étais le premier avec les bottes dans l’eau à Crécy ! » (moue dubitative de Bernard Carouge, maire de Crécy). J.-L. Vaudescal : « Tu n’as pas non plus de leçon à donner… »

S. Chimot et F. Molet votent contre

Ambiance… Franz Molet, maire de Voulangis et lui-même commerçant, a soutenu Sébastien Chimot. Il a été le seul. Les élus ont voté pour cette installati­on à une large majorité : 2 votes contre, 5 abstention­s et 42 votes pour. « Il ne faut pas

se tromper, a lancé Jean-Louis

Vaudescal. La grande majorité du conseil est favorable à cette aide. »

Corinne Lecart peut souffler. Elle doit s’installer à la Maison du tourisme cette semaine.

 ??  ?? Corinne Lecart au milieu de ce qu’il reste de son salon d’esthétique. Elle doit s’installer provisoire­ment dans la Maison du tourisme cette semaine.
Corinne Lecart au milieu de ce qu’il reste de son salon d’esthétique. Elle doit s’installer provisoire­ment dans la Maison du tourisme cette semaine.

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